CADEAU DE NOEL
LA RÉVOLTE DU TAUREAU
Aujourd’hui, nous vous offrons en guise de cadeau de Noël, un poème d'André MONTAGARD (Illustrations Henry COUVE), extrait d'un recueil intitulé:
LA FIESTA DU SANG.
Ce recueil a été écrit à l'intention de Paul RICARD, édité aux éditions BENDOR et achevé d'imprimer sur les presses des DISTILLERIES RICARD Sainte-Marthe à Marseille le 01 décembre 1956.
Patrick SOUX
Réponse du Taureau de Combat à ceux qui le plaignent de mourir dans l’arène
Pourquoi me plaignez-vous ? Quel transport vous anime
Et pourquoi de douceur vouloir fleurir mes pas ?
Merci d’avoir pour moi cet élan magnanime,
Mais gardez vos bontés, Messieurs je n’en veux pas !
Pour les agneaux bêlants, pour les brebis peureuses,
Et tous les animaux par vous domestiqués,
Réservez vos faveurs, vos pitiés généreuses,
Moi, je suis un taureau, Messieurs, vous vous moquez.
Mon frère malheureux, castré, veule, et stupide,
Le bœuf, trainant sa peine à longueur de sillon,
Et ruminant sa honte et son rêve torpide,
Plaignez-le de subir le joug de l’aiguillon.
Moi, je suis l’étalon farouche et prolifique,
Sûr de sa race forte et de sa liberté,
Balayant de mes crins mon torse magnifique,
Je promène au soleil mon ardente fierté !
Je suis le roi puissant de la lande sauvage,
Mon sourd mugissement fait courber les roseaux,
Et sur le sol rugueux que mon sabot ravage,
L’herbe rare s’enflamme au feu de mes naseaux.
Ce qu’il me faut à moi, c’est l’ampleur de l’arène,
Voir dans ma furia rouler les picadors,
Et tournoyer au vent de la grâce souveraine,
Des banderilleros et des toréadors.
C’est la foule enivrée, excitant mon courage,
Hurlant "Bravo toro" quand je fonce éperdu,
Et, quand sous la capa que je foule avec rage,
J’écrase un matador par ma corne étendu.
Dans le scintillement rutilant des épées,
Et dans le flamboiement pourpre des muletas,
Je veux mourir l’œil plein de visions d’épopées,
Aux cris des hidalgos et des señoritas.
Et j’irais, grâce à vous, sans panache et sans lutte,
Garrotté lâchement, la bricole en sautoir,
Tomber sous le marteau dégradant d’une brute,
Dans le silence morne et froid d’un abattoir ?
Allons Messieurs, épargnez moi ce ridicule,
N’insultez pas ainsi mon orgueil sans remords,
Quand le lion lui-même à mon assaut recule,
Au prix de votre sang veuillez payer ma mort !
Et ne me blâmez pas d’aborder la bataille,
De préférer périr par un coup d’espada,
Affrontant seul à seul un héros de ma taille,
Honneur au torero ! Gloire à la Corrida !
Nous vous souhaitons à tous, de passer d'agréables fêtes de Noël dans la joie et le partage.