VICISSITUDES "TAUROMACHIQUES" : LES MOJIGANGAS
Complément.
Cette scène bizarre représentée par cette planche, peut surprendre. C’est en effet une singulière fantaisie que de faire travailler à la pique un taureau par un picador monté sur l’une des deux mules attelées à un carrosse. Il y a deux conducteurs, armés de piques, au cas où le taureau les attaquerait. A la portière, se penche un rejoneador prêt à se servir de son arme, le cas échéant. Deux laquais se tiennent debout à l’arrière du carrosse, selon l’usage à cette époque, et des toreros, la cape rejetée sur l’épaule, semblent contempler de loin cette scène. Ce style fantaisiste de course appartient au genre dit "inventions à pantomimes", mojigangas, terme exact fort en vogue au XVIIIe siècle.
Une de ces courses fut célébrée le 27 juin 1787 sur la place d’Aranjuez. L’affiche annonce qu’ " on verra sur la place le fameux Maure Muza avec Fatima son épouse, en habits de leur nation, sur un très beau landau traîné par un âne superbe, harnaché en cheval, avec queue et frein, accompagnés de deux piqueurs sur chevaux de carton et deux laquais, avec passes de cape et pose de rosettes et banderoles et autres figures de passe-temps" .
Avec moins d’imagination et de fantaisie, ce toreo grotesque s’est prolongé jusqu’à nos jours. Les soirs d’été toréent parfois des bandes appelées charlotades.
Gilbert LAMARQUE