Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

LE CHEVAL DE CORRIDA - 3

Publié le par Cositas de toros

    

    Nous n’avons pas connu l’Âge de glace et le temps des dinosaures, par contre nous vivons  depuis peu, l’Âge du gel – hydroalcoolique – malgré sa pénurie, et la disparition en politique, des dinosaures troqués par une vague de morveux nés mal entendants et mal voyants, nébuleux et paradoxaux qui ne valent guère mieux.

Il est difficile dans cette période angoissante, d’entrevoir un horizon heureux.

« La France a peur » disait Roger Gicquel. Contre la menace invisible mais bien réelle, n’en déplaise à quelques illuminés, il reste le confinement. Assignés à résidence, ayons une pensée pour les autres, assignés à s’exposer.

              

 

                          LE CHEVAL DE CORRIDA

 

3e partie : le picador dans l’arène, en tienta, les cuadras de caballos.

 

     L’acoso y derribo, vu au chapitre précédent, pourrait être qualifié de pratique intermédiaire entre la tauromachie d’origine chevaleresque et le travail du picador indispensable à la corrida à pied, populaire.

Les premières affiches annonçant les corridas à pied mentionnaient le nom des picadors (varilargueros) au même titre que celui des matadors porteurs des capes destinées à protéger le cavalier avec autant d’efficacité que d’élégance et à placer le taureau pour l’estocade.

Que dire des chevaux utilisés ? D’abord, que, contrairement aux destriers de l’Ancien Régime, ils n’appartenaient pas au picador mais à l’organisateur de la corrida qui devait acheter auprès d’un adjudicateur entre vingt et quarante (trois ou quatre par picador) pour une course de six à huit taureaux. Ensuite, ils ne faisaient pas l’objet de spécificités très rigoureuses. Que s’était-il passé pour que le cheval de corrida se trouve à ce point discrédité depuis que les Bourbons avaient contraint les nobles et leurs chevaux à quitter le devant de la scène ? Tout porte à croire que le retrait des hauts personnages convaincus de la pureté de leur sang et de celui de leur monture avait entraîné chez le cheval, la perte de son statut de héros respectable. Il redevenait le vilain de l’affaire, condamné à l’éventration en tant qu’outil jetable réduit à une simple fonction utilitaire. Le détenteur du marché de la fourniture des chevaux s’engageait d’ailleurs dans le contrat, à évacuer leur dépouille vers les lieux d’enterrement ou d’incinération, même s’il « se voyait autorisé à négocier les peaux et les crins des chevaux tués... »

Après que les aristocrates toreros avaient abandonné le rôle principal de la corrida officielle à des hommes du peuple attirés par le professionnalisme, le cheval est resté dans l’arène à travers la figure du picador. Aujourd’hui, celui-ci fait partie de la cuadrilla de subalternes aux ordres du matador. Sa fonction consiste à enfoncer la pointe métallique en de ça du morillo du taureau pour tester sa bravoure, le fatiguer, et le contraindre à baisser la tête, a humillar.

Dans ce contexte, le cheval permet au plus grand nombre d’évaluer la bravoure, la "race", le caractère spontané de l’animal voulu comme sauvage.

 

Tienta chez Casanueva. 15 juillet 2019. Picador Laurent Langlois.

   

     Qu’on le reconnaisse ou non, son rôle se révélera donc fondamental au cours de la tienta, cette partie entièrement dévolue au processus de sélection. Ici, le picador et le torero invités par l’éleveur se substituent matériellement à ce dernier afin d’assurer le succès d’une opération fondée sur la croyance que les qualités psychiques des animaux se transmettent à travers la sélection. La tienta est dédiée à l’ensemble des vaches de un à deux ans, ainsi qu’aux erales présélectionnés  en tant qu’étalons potentiels ; ils sont tous soumis dans un premier temps au test de la pique. Quelques éleveurs "romantiques" ont tendance à se contenter de cette épreuve qui ne blesse que légèrement l’animal, mais permet de jauger la part de "sauvage" recherchée. Souvent, même s’ils ne l’avouent pas, ils se désintéressent assez vite du travail à la cape du torero ; c’est pourtant ce dernier épisode qui est censé mettre en valeur les qualités du bicho pour les séquences plutôt ancrés dans le "culturel", dans l’artistique contemporains et favorables au succès public du torero.

Les veaux et les génisses qui ont failli au test lors de cette phase initiale, n’iront pas plus loin, stoppés par l’impératif « puerta » du ganadero, « puerta » direction l’abattoir. Par contre, les bêtes conservées jusque là après l’épreuve du cheval seront "toréées" à la cape, dans l’espoir d’une vie consacrée à la reproduction.

Ce cheval de picador contrairement à son semblable utilisé dans le campo et souvent, aujourd’hui remplacé par le cheval-vapeur, continue d’imposer sa robuste présence, mais plus athlétique, sportif et affiné.

 

undefined
Le cheval-vapeur

 

      Ce cheval de corrida, actuellement est beaucoup plus choyé que ne l’était son aïeul avant que ne naisse le caparaçon. Il est le maître-étalon de la bravoure, l’outil indispensable à l’amélioration, donc à l’avenir de la ganaderia.

Quelques cuadras de caballos :

- Alain Bonijol qui a bousculé le concept de cheval de picador en présentant des jeunes chevaux légers et plus mobiles pouvant apporter une revalorisation du tercio de piques. Ces chevaux font l’apprentissage de leur métier et ils sont donc particulièrement aptes à affronter les toros, quelle que soit leur puissance.

- La Cuadra de Caballos de Picar de Antonio Peña Cruz.

- La Cuadrilla d’El Puyero de José García qui officie à Las Ventas, qui remplaça à Vic, celle d’Alain Bonijol lors de la dernière temporada.

- Philippe Heyral, descendant d’une dynastie d’empresas de caballos à Nîmes, considère qu’un cheval de picador doit-être conduit au mors (importance de la "bouche") et non à l’étrier gauche.

 

Philippe Heyral

     Son grand-père Jacques a inventé le peto en 1929, qui, à l’époque protégeait l’avant du cheval car on crai  gnait la blessure mortelle de face, droit au coeur. A cette époque, on attendait et recevait le toro de face… a caballo levantado, de frente ou en rectitud. Le toro et le picador restent sur la même ligne, l’un en face de l’autre. Mais cette façon de piquer est en réalité rarement usitée depuis Guerrita, qui transposa dans l’arène la façon de piquer en usage dans les tientas, c’est-à-dire de profil.

 

Picar a caballo levantado. Cuadra Bonijol

     La suerte dite a caballo levantado, à cheval cabré, résulte aujourd’hui d’une poussée du toro sur le cheval et non plus d’une adroite figure cavalière visant à épargner la monture. Autrefois, il était question, en même temps que l’on freinait la charge du bicho à bout de bras, disons, à bout de pique, de faire cabrer sa monture, lui ordonnant d’effectuer un quart de tour pour ouvrir la sortie sur le torero de turno, toujours à la tête du cheval, offrant la possibilité d’un quite.

Je m’abstiendrai de traiter des actuelles suertes de pique avec le cheval présenté de profil…

 

… à suivre

                                                                                                  Gilbert Lamarque

 

Commenter cet article