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MODERNITE

Publié le par Cositas de toros

 

       La corrida "moderne" implique la faena "moderne" dépourvue du ligazón.

 

     Luis Miguel Dominguín déclarait : «… Ensuite, lier. Si un toro admet cinq, six, sept passes, quelles qu’elles soient, elles doivent être liées. Là où la passe s’achève, il faut reprendre le toro et le conduire jusqu’à la terminaison de la suivante et enchaîner la troisième. Une passe ici, une autre plus loin, aussi bonnes soient-elles ne font pas se lever les gens, et pourtant les gens vont à la plaza avec l’espoir de se lever pour applaudir. Telle est mon opinion, sans prétendre détenir la vérité. »

 

     Aujourd’hui, c’est l’excès de derechazos, de demi-passes, de molinetes, du clinquant inefficace car au bout du compte, le toro n’est pas toréé et encore moins dominé : une faena faite de bribes, de fragments.

     À ce toro non dominé, le torero s’expose à l’ultime difficulté : à l’instant de la mise à mort, la bête bouge et l’homme éprouve quelques problèmes pour cadrer le toro et porter l’estocade. Le toro "moderne", ni original, ni avant-gardiste mais futuriste, hélas, manquant de bravoure et accusant de la faiblesse ne permet pas au diestro, les sempiternelles séries de derechazos en ligne ou en rond qui sont, actuellement, la base de la faena "moderne". C’est monotone, pauvre, improductif.

 

 

     Comme l’écrivait El Tío Pepe (Jean-Pierre Darracq) dans Genèse de la corrida moderne : « … En effet, c’est en début de faena, lorsque le toro, reposé du tercio de piques, ayant couru aux banderilles, a retrouvé la vigueur de l’élan qu’il convient de l’attaquer à gauche, aussitôt après un aller-retour par le haut, ou encore suite à une trinchera et une passe de la firma. Certes, les naturelles à toro vif seront davantage périlleuses que celles de fin de faena, mais le risque sera compensé par l’efficacité, autrement dit la domination. "Joselito", Marcial Lalanda attaquaient ainsi ; et surtout, un fois le combat engagé, ils ne donnaient plus à l’adversaire le temps de respirer. Faenas courtes ou moyennes, conduites sans répit, où la main droite au moment de l’estocade, portée sans entracte, car le matador tenait en main l’épée qui tue. Entre ce procédé énergique, viril, où la notion de lutte à mort conservait tout son sens, et le préfabriqué actuel – ces lignes ont été écrites en 1989 et 1990, ndlr –, la différence est si sensible que si j’en avais le pouvoir j’opterais sans hésiter pour un retour à la période 1929-1939. (On notera que, comme par hasard, le néfaste "Manolete" a pris l’alternative en 1939, et la Fiesta n’en a jamais guéri.) »

 

     Et ça, c’est envoyé !

 

   

     En 1975, El Tío Pepe s’entretenait avec le maestro Luis Fuentes Bejarano à Séville. Celui-ci attachait la plus grande importance à l’unicité de la faena de muleta : « … au bout de quelques années je suis arrivé à la conclusion qu’il n’existe qu’une seule règle immuable : lier la faena. Pour moi, cela signifie être toujours au même endroit, à la même place ( en el mismo sitio). Quand on donne une passe, peu importe comment, l’important c’est surtout de ne pas faire ces ridicules petits sauts en arrière afin de se replacer de nouveau devant le toro. Le torero doit se placer toujours sur son terrain propre, sans permettre au toro de le lui manger (sic). Une passe peut être aussi bonne qu’on voudra, mais si, pour engendrer la suivante, il faut céder du terrain au profit d’un autre terrain qui n’est plus le tien la passe est mauvaise. L’important, c’est que le torero reste toujours à sa place, sans autre correctif que la nécessité indispensable de tourner sur ses pieds afin d’être prêt à enchaîner la passe suivante. »

 

     Il faut tenir compte de ce que tous les toros ne se prêtent pas à une faena liée et templada. Liée, peut-être, mais liée et templada à la fois, voila un autre problème quand le toro devant vous lance des derrotes ou serre sur un côté, ou alors qui avance au pas, qui s’arrête à la moitié du voyage… Souvent, certains toros ont été mal piqués et si souvent trop en arrière !

 

     El Tío Pepe rajoutait ceci : « Une faena liée, commencée et terminée dans le même terrain, ou dans un terrain très proche, est une faena plutôt courte, car une faena courte est une faena qui va a más ; au contraire, plus la faena s’allonge, moins elle est liée, et, fatalement, elle va a menos. Trop de toreros cèdent à cette exigence stupide des publics qui réclament davantage de passes, et cette concession démagogique est préjudiciable à l’unicité de la faena : la faena perd valeur et intérêt. »

 

     Il est bien évident que les toros que l’on "consomme" aujourd’hui, sont en grande partie responsables du confus et du désordre des faenas. Quelle faena devant un toro immobilisé, asphyxié, étouffé par sa graisse, tombant au sol, dont le torero provoque la "charge" par un coup d’épée sur le mufle ?

     Toréer, c’est lié des passes. Le ligazón est la condition de l’efficacité. Et comme l’écrivait encore le "Tío" : « C’est ce que l’on devrait enseigner dans les écoles de tauromachie, plutôt que de fignoler les derechazos. »

 

     Et toc, deuxième envoi !

 

          « Je vous préviens, cher Myrmidon,

           Qu’à la fin de l’envoi, je touche ! »

                 Edmond Rostand, Cyrano de Bergerac.

 

     Le "Tío", en plein dans le mille !

                                                                       Gilbert Lamarque

 

 RECTIFICATIF

 

20/09/2020. Photo Armelle Douet

Précisions de la part d'Hugo Boudé.

 

      "... Je m'entraîne chez Denis Labarthe qui m'a pris sous son aile à Soustons, les week-end et non à Lachepaillet. Dans les arènes de Bayonne, c'est en semaine, et je m'y entraîne avec Alexis Ducasse et Lionel Lohiague. Mais celui dont on peut dire qu'il est mon "mentor" est bien Denis Labarthe. A très bientôt. Abrazos." 

 

20/09/2020. Photo Armelle Douet
20/09/2020. Photo Armelle Douet

 

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