Question d'objectivité
Dax, novillada non piquée, samedi 14 août.11h.
Rentrant au bercail après avoir musardé en Chalosse, pendant que les aficionados de la tarde se liquéfiaient sur les tendidos dacquois, je me suis mis à la reseña de la non piquée matinale, ma seule intrusion en terre "cul rouge", et jettant un œil sur les dernières news vomies par le net.
sudouest.fr/landes/mont-de-marsan titrait : « Le bétail marque les esprits durant la novillada sans picador de samedi. », et la suite : « Marion (sic) Navas et Marco Linares remportent les prix de cette novillada sans picador. Mais, c’est la qualité du bétail, venu de deux élevages des Landes, qui est surtout à relever. »
Ah, j’ai dû rater quelques épisodes !
Résultats bruts : Mario Navas déclaré vainqueur empoche 500 € et 200 € (prix de l’ACOSO), Marco Linares, second, 250 €, a remporté le VIIe Alfarero de Plata de Villaseca de la Sagra en juillet dernier.
Pas de prix pour encourager les ganaderos locaux…
Deux erales sortant du lot, un bon et un très bon avec du piquant.
J’ai un petit faible pour les novilladas non piquées et les jeunes qui s’y collent. Je privilégie l’animal, j’admire les jeunes pousses. Mes reseñas de ces spectacles dits "mineurs" sont aussi conséquentes que celles des corridas et novilladas piquées.
L’avenir de la corrida, s’il y en a encore un, est ici.
À Dax en cette matinée, ce sont aussi les acteurs à deux pattes qui m’ont plu, et que vient faire ce titre incongru, voire mensonger dans ce quotidien régional ? Ce n’est pas le seul. Ceci me rappelle « À Dax et nulle part ailleurs ! » pour parodier le slogan de Bayonne !
À l’issue de la course, les deux ganaderos saluèrent : solidarité ganadera, soit. À mon humble avis, les trois sociétaires d’Alma Serena, bien présentés, armures et robes dans le type de la maison, ne m’ont pas convaincus lors des trois lidias. Le premier n° 20, castaño claro bociblanco, sorti en 3e pour El Melli, n’est pas une eau de source. Le gamin exécute deux bonnes séries de la droite, la suite est à oublier, désarmé, faena longuette, des redondos par poignées… Le novillo plutôt désordonné dans la muleta était malgré tout supérieur au suivant du même fer, plutôt manso, ce n° 94, castaño claro, brochito, un peu violent, manquant de force malgré son moral, fléchissant des quatre sabots, auteur de demi-charges, par à-coups, hachazos à la sortie de la passe.
Ismael Martin banderille, c’est à souligner, et superbement, c’est aussi à souligner, puis la suite est brouillonne ne donnant pas assez d’air à cette bête. On lui pardonnera. Une lame entière, deux descabellos et salut au tiers.
Tristan Barroso hérita du plus lourd à Mont-de-Marsan, à Dax, itou. Ce n° 95, castaño claro, itou, est le mieux armé des six, belle présentation, le plus imposant donc, véritable novillo pour une piquée, jeune aussi, marqué à l’épaule du 9. Allez comprendre ! De jolis quites cape en mains entre Tristan et Eric Olivera. Un détail, la cape de l’élève de Badajoz est marquée à l’intérieur "José Tomás"… un peu fané, l’usure du temps. L’empreinte du maestro guidera t’elle le torerito jusqu’au zénith ? Pas de 3e paire de banderilles (?).
Bicho exigeant, Tristan ne baisse pas suffisamment la main, très conseillé du callejón, il écoute et se replace aux quatre "coins" du rond. De belles naturelles. Entière, avis, puntilla, l’eral se relève, descabellos, mort longue, deuxième avis… oreille (!).
Et ce n’est pas jeter la pierre au ganadero que d’écrire cela. Lui sait. Nous apprécions son bétail bien sorti maintes fois auparavant. Saluer, c’est un détail me direz-vous, des oreilles généreuses bien que l’on puisse rester équitables même à ce niveau de compétition, la musique qui joue encore après les multiples désarmés, encore des détails, tant que ce ne sont pas les détails qui tuent… et quelques subalternes qui devraient suivre les cours du soir… spécialité puntilla, bien que pour certains cela soit déjà trop tard !
Pour ce desafio qui n’en est pas vraiment un, sont sortis trois exemplaires de La Espera, noirs les trois, bien fait, pas un pouce de gras, le noir amincie. Le premier n° 35 qui ouvre les débats est le plus svelte et le moins brillant de la terna. Il a tendance à serrer corne gauche, charge par à-coups, tête haute en fin de passe. La muleta est souvent accrochée, Eric Olivera est "mangé". Le bicho n’est pas mis à son avantage, convenons-en. Entière un peu contraire, descabellos (8), deux avis, silence pour Eric, palmas au novillo (!).
Le second est le clou de la matinée, n° 56, mieux armé, veleto. Mario Navas le reçoit fort bien sous la capote. À la muleta, il l’amène au centre du ruedo par doblones. Le novillo charge buvant la flanelle. Le Salmantin nous offre trois superbes naturelles templadas puis d’autres séries des deux mains, confiant, relâché, main basse. Chacun est mis en valeur par l’autre. Quel aubaine, on assiste si souvent à de gros gâchis ! Manoletinas finales, un pinchazo, une entière de côté, puntillero désastreux. Une oreille et vuelta pour le bicho de La Espera, noblissime, débordant de caste.
Le n° 19 sorti en 5e a du jus, exigeant et Marco Linares a des ressources mais au fil du trasteo, le novillo prend le dessus. C’est ce que l’on appelle aller a menos. Dommage, après les jolies naturelles, tirant le bras, Marco échoue devant la bête qui distribue quelques hachazos. Entière très contraire efficace. Oreille, opinions divisées.
Tous les arrastres ont été applaudis. Averse d’avis. Du monde dans les gradins, le gentil public des matinées récréatives.
Bravo à Jean-François Majesté (La Espera), notre constante sympathie à Philippe Bats (Alma Serena) en attendant les futures bonnes sorties auxquelles nous étions habitués, enfants gâtés que nous sommes !
PS. En parcourant quelques bribes éparses sur d’autres supports, je me dis que nos yeux ne voient pas les mêmes détails, que nous avons parfois des absences. Tant que ce n’est pas de la tromperie, niant la réalité, en souhaitant en retirer quelques piètres intérêts. Qui sait ? Et puis quand on sollicite une invitation, une accréditation, il est inconvenant de cracher dans la soupe.
Photos "mobiles", "Au petit bonheur, la chance" !
Gilbert Lamarque