L'élégance catalane
Après Ángel Teruel, Jaime Ostos et Calatraveño, la Camarde poursuit son œuvre de destruction. Le torero catalan Joaquín Bernadó a lui aussi déposé les trastos à jamais, lundi 21 février 2022.
Il était né le 16 août 1935 à Santa Coloma de Gramanet (banlieue de Barcelone). Santa Coloma pour un torero, c’est pousser le détail à son paroxysme ! Très vite, encore enfant, sa famille s’installe dans le quartier du Raval à Barcelone, atmosphère taurine garantie.
Il prend l’alternative le 4 mars 1956 à Castellón des mains d’Antonio Bienvenuda avec Julio Aparicio pour témoin, les toros sont de Manuel Arranz. Le 10 juin de la même année, il confirme à Madrid. Il triomphe rapidement dans les grandes arènes d’Espagne et torée au Mexique environ 200 après-midi. Quant à Barcelone, il s’y produira 243 fois !
En revanche, il ne fit qu’un paseo à Bilbao en 1970 et il ne foula jamais le sable du Plumaçon à Mont-de-Marsan.
Pedro Balaña eut l’idée de l’associer avec Chamaco. Ce fut un véritable succès, Bernadó le classique, Chamaco l’extravagant.
Joaquín Bernadó sera matador 31 années durant, de 1956 à 1987.
Il alterne avec les plus grands de l’époque : Dominguín, Ordoñez, Pepe Luis et Manolo Vázquez, Puerta, Camino… Il possède une élégance naturelle et se plaît dans la simplicité. Le critique K-Hito le qualifiait de « torero tergal – tissu alors à la mode – et écrit : « Il ne se décoiffe jamais. C’est l’élégance avec montera ».
Il tua tous les types de toros, les plus "faciles" comme les plus durs et obtint de nombreux succès face aux Miura.
Il inventa une forme particulière de passe d’adorno, la bernadina*, proche de la manoletina.
Par contre, il péchait avec l’épée, se privant de nombreux triomphes.
Après sa despedida, il a été professeur à l’École de tauromachie Marcial Lalanda de Madrid et commentateur à Telemadrid.
Il n’a jamais compris la dérive anti-corrida des indépendantistes. Joaquín Bernadó Bertomeu s’était retiré à Canencia de la Sierra (Madrid), il avait 86 ans.
Salut Maestro !
* Bernadina : la muleta est présentée à l’envers, derrière le dos, l’estaquillador (le bâton) dans la main droite et la pointe de l’épée (dans le tissu) dans la main gauche. En sortie de passe, le torero effectue une rotation du corps en sens contraire de la trajectoire pour enchaîner avec la passe suivante.
Gilbert Lamarque