Empègues
Un autre élément patrimonial mis en lumière pendant les jours de fêtes votives dans le Sud-Est : les empègues. Les connaissances de nos amis du Midi ne vont guère s’enrichir.
Il s’agit d’une coutume gardoise datant du XIXe siècle. L’empègue consiste à apposer autour des portes des maisons de petits symboles. Réalisés par les jeunes de la localité, ils servaient aux conscrits à signifier leur départ pour le service militaire. La tradition se perpétue avec les enfants accompagnés par les adultes du comité des fêtes où ces empègues, pour la plupart, évoquent la culture taurine.
Géographiquement la zone est limitée au sud du Gard comprenant la petite Camargue, les Costières et la Vaunage ainsi que la partie héraultaise où les traditions taurines camarguaises sont fortement marquées.
L’occitan "empeguar" signifie "coller". La racine en est "pégue", la colle. Dans cette région si chaude, l’été caniculaire 2022, toute la France "pégue"…
Les jeunes font la quête, le propriétaire qui a donné sa participation se voit apposer près de sa porte, la fameuse empègue. Ces pochoirs sont liés à la course camarguaise. Le dessin est accompagné des lettres VLJ, Vive La Jeunesse, "Viú lo Joven" en occitan.
On y retrouve les thèmes emblématiques : Le trident, la croix de Camargue, le crochet du raseteur, le cheval, le flamant rose et le bioú. Chaque détail est lié à la bouvine.
Ceci étant dit, je vous propose de parcourir Milhaud, village des Costières aux portes de Nîmes et de découvrir ses multiples empègues. Bordé au nord par la garrigue, au sud par la plaine agricole de la Vistrenque, le village de Milhaud est drainé par le Vieux Vistre. Commune urbaine peuplée de 5700 habitants, elle a connu les vicissitudes de sa grande voisine, Nîmes, Milhaud est située sur le tracé de la voie Domitienne.
Au moyen âge, le village est la possession des Comtes de Toulouse, de Simon de Montfort puis des évêques de Nîmes. Ceux-ci possèdent un vaste château entouré de fossés et flanqués de tours élevées. Il est détruit par les huguenots en 1622. Sont encore présentes d’anciennes et de nombreuses maisons vigneronnes.
Le village se serre entre l’A9 et la RN 113. Le chemin des arènes m’étant peu recommandé, j’ai opté pour les chemins de traverse, calmes et favorables aux trouvailles, prenant parfois un simple détour, toutes voiles dehors, le nez au vent et l’œil inquisiteur.
On ne convoque pas l’art mais ces éléments répétitifs, c’est du Street Art ! C’est faire quelque chose de si peu, tout ce qu’il y a de plus basique, l’Homo sapiens, ce créateur se prenant pour Dieu. Un anti dépresseur. Pas besoin d’aller claquer un billet au musée ! Il est là notre Van Gogh ! Des fragments de dialogues, un roman populaire, un livre ouvert aux intempéries ! Un ouvrage comme une récréation temporaire bientôt témoin d’une époque révolue. Des images publiques généralement réductrice. Le temps et les éléments auront raison d’elles. Les empègues, cher public, apparurent au XIXe siècle, entièrement d’époque…. s’effacèrent victimes du temps. Longue vie aux empègues, cadeau furtif !
Elles ont enterré le service national, la tradition se perpétuant par les cadets du XXIe siècle, petites œuvres méconnues, s’inscrivant dans la découverte patrimoniale d’humbles artistes ignorés.
Gilbert Lamarque