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LE CHEVAL DE CORRIDA - 10

Publié le par Cositas de toros

                              TEMPS PESANT ET FUTUR LOINTAIN

 

     Se projeter dans le futur aussi bien proche que lointain est devenu pour la plupart, difficile. Cette maudite anxiété, cette actualité plombante modifient la perception du temps et tout le monde ne dispose pas d’un moral d’acier.

Il devient difficile pour certains de distinguer un mardi d’un jeudi, le temps leur semble étrange. Chez les uns, il s’étire, chez les autres, il passe plus vite.

 

L'ennui

   

     Quand tout va trop vite, le temps permet une pause à beaucoup de gens inquiets, sous pression. C’est une rupture radicale avec le quotidien. Et après la stupeur, c’est la peur pour certains d’être confrontés à l’ennui. Le temps sera long, il se traduit en intervalles vides, flippants pour les uns. Pour les uns et les autres, le temps est horriblement lent, et alors que faire ?

 

L'ennui définitif

 

     Aujourd’hui, on ne le remplira pas, on l’organisera avec des rendez-vous avec… soi-même. Et plutôt que boire son café d’après déjeuner au lance-pierre, dégustons-le en une demi heure. Mais c’est vrai, il sera froid. Et alors ? Cela vous fera peut-être réagir et passer à une source potentielle d’activité.

Essayons, et si nous n’y arrivons pas, remettons tout cela à demain.

Nous avons le temps ! 

 

 

 

     Pour ne pas rester face à vous même, moment désagréable, lisez donc Un roi sans divertissement de Jean Giono - le livre de Pierre Sansot sur la lenteur, exposé dans ces colonnes il y a peu, a trouvé quelques échos chez certains d'entre vous.

Cela fera 50 ans cette année que Giono est mort. En hommage à l'écrivain et à son oeuvre, procurez-vous ce roman "labyrinthique" !

Hiver 1843. Dans un petit village du Trièves que la neige a coupé du monde, une jeune femme disparaît. On a beau fouiller les environs dès le dégel, son corps reste introuvable. L'année suivante, alors qu'un épais manteau blanc recouvre à nouveau le village, un deuxième habitant est "rayé de la surface du globe", bientôt suivi par deux autres. Qui fait disparaître ces villageois et pourquoi ? C'est ce que se demande le capitaine de gendarmerie Langlois, appelé en renfort...

Jean Giono a qualifié de "plus grande malédiction de l'univers" l'ennui, face à face impitoyable avec soi-même. Une grande lumière tempère cependant la noirceur de ce texte : ce sont les liens d'amitié, d'empathie qui unissent les personnages. Humanité consolatrice que celle de ces "amateurs d'âmes" qui ne sont pas nés de la dernière pluie, savent aimer, compatir et aussi lire, comme le lecteur, entre les lignes.

 

 

L'Obs, page 45, illustration de Pep Montserrat

     Oui, le Covid-19 occupe le centre du ruedo. Le toro battu, oui, blessé (hélas), à mort, non, espérons-le.

    

L’Obs/N°2893-16/04/2020, page 47 :

Alors que son pays est l’un des plus touchés par le Covid-19, le grand écrivain Javier Marías, confiné en Espagne, répond à "L’Obs".

     « … Nos politiciens, qu’importe leur parti, sont médiocres et irresponsables, mais, sur ce point, j’ai bien peur que les citoyens de n’importe quel pays ne puissent dire la même chose de leur dirigeant, à de rares exceptions près. Si nous regardons Trump, Boris Johnson, Erdogan, Orbán, Duterte, Kaczynski, Maduro, Daniel Ortega au Nicaragua… Il y a de quoi se mettre à trembler. Et le pire c’est qu’à peu près tous ont été nommés ou élus, y compris Poutine, Dieu du Ciel ! Y compris Bolsonaro, re-Dieu du Ciel ! Je me dis parfois que de nos jours trop de gens sont devenus idiots. Ça oui, c’est une pandémie sans espoir de guérison... »

 

 

     Le "dossier" sur le cheval de corrida est arrivé à son terme, aussi en ai-je fini de mes élucubrations que je vous inflige depuis le 28 mars. Si cela en a agacé quelques uns parmi vous, ce dont le plumitif frustré que je suis ne doute pas, c’est fâcheux.

Merci de votre fidélité et souhaitons la bienvenue aux nouveaux abonnés. La famille s’agrandit… par ces régimes de confinement, est-ce raisonnable ?

 

Portez vous bien, chères et chers cloîtré(e)s.

 

Post tenebras lux

                           Après les ténèbres, la lumière.

 

 

"En mai fait ce qu'il te plaît"... tu parles !

      

     

 

 

 

               

                             LE CHEVAL DE CORRIDA

 

10e partie : le pruneau sur la tourtière.

 

    

    Pour être plus exhaustif, terminons par un livre que je vous invite à engloutir vivement pour enfin, boucler la boucle. D’un cheval l’autre est le premier récit de Bartabas, l’écuyer d’exception, metteur en scène, créateur de l’Académie du spectacle équestre de Versailles. Il retrace ici, son autoportrait à travers l’histoire des chevaux qui ont marqué sa vie. À 62 ans, le fondateur du Théâtre Zingaro raconte tous les chevaux qui l’ont accompagné. C’est un autoportrait mais indirect, un miroir où se réverbèrent les dizaines de chevaux qui ont été les siens depuis l’âge de 17 ans. Son premier s’appelait Hidalgo, puis suivirent Zingaro, Chapparo, Micha Figa, Quixote, Lautrec, Horizonte, Vinaigre, Van Gogh, Le Caravage… jusqu’à Tsar. Il nous raconte avec énergie mais aussi mélancolie, les passions qui ont rythmé sa vie. Il prépare sa dernière apparition sur scène. « Je ne vais pas continuer pour continuer, comme les vieux chanteurs. Place aux jeunes. »

 

Clément Marty, alias Bartabas

     Dans ce livre passionnant et émouvant, Bartabas fait de nombreuses références au monde taurin et à la tauromachie, use de termes taurins, du vocabulaire, cite Rafael de Paula, Christophe Yonnet décédé en juin 1996 qui, en pleine déroute lui avait cédé Dolaci « avant de s’évader de la vie. », traverse la planète, des arènes de Nîmes et Madrid, à Tokyo et New York.

Bartabas était signataire de la tribune pro corrida publiée le 17 octobre 2019, opposée à l’interdiction de la corrida aux mineurs.

Il offre à ses compagnons de route leur plus beau tour de piste. L’homme qui murmure à l’oreille des chevaux rend hommage aux destriers de sa vie.

Dans ce qu’il nomme « la caravane de mes nuits », il énumère chaque cheval qui a partagé son existence. Et dans cette liste incroyable, nous trouvons Antoñete, Arruza, Belmonte, Bombita, Cagancho, Chamaco, Chicuelo, Conchita Cintrón, Dominguín, El Cordobès, El Gallo, El Soro, El Viti, Espartaco, Frascuelo, Joselito, Manolete, Manzanares, Nimeño, Paquirri !

« Cheval taureau face au belluaire, dominant dominé, de ma frustration de n’avoir pu être matador, je me suis fait matamore, et le minotaure mangeur d’hommes n’était peut-être qu’un gamin farceur aux sabots ailés. »

Bartabas, « ce Bonaparte des arts éphémères, est surtout un autodidacte qui marche à l’instinct. » (Grégoire Leménager, L’Obs du 06/02/2020).

arts éphémères, tout comme l’art tauromachique.

 

« Les chevaux sont les maîtres à qui je soumets mon destin. » Bartabas.

 

                                                                 

FIN

                                                                              

Gilbert Lamarque

 

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