Parcourant avec un fort intérêt et une réelle gourmandise, le beau livre d'Antonio et de José Carlos Arévalo, Les trois grands de la tauromachie française où les conversations de succèdent, j'ai pu noter la belle reconnaissance en Richard Milian, voici :
"Quelqu'un aussi qui m'a pas mal aidé c'est le maestro Richard Milian. Lui, comme le maestro Campuzano, ont un don : celui de l'enseignement. Ils n'ont pas besoin de prendre la muleta, il leur suffit de deux mots pour se faire comprendre. Ce sont les bons maestros, les vrais maestros. Certaines figuras sont incapables de transmettre ce qu'ils ont appris. On sait faire le toreo mais on n'a pas ce don".
Ces confessions sont empruntées à Sébastien Castella, la belle gratitude du maestro biterrois envers son aîné.
L'autre maestro, Campuzano, il s'agit de José Antonio qui fut son apoderado, associé plus tard à Luis Alvarez. " Ce sont des gens très bien, de bons apoderados pour de jeunes toreros mais pas quand il s'agit de figuras, de toreros qui veulent être aux commandes, gagner plus que les autres et qu'on ne leur impose pas les toros. J'en discutais souvent avec eux mais on n'arrivait plus à s'entendre. C'est pour ça que je suis parti". Sans commentaires.
Il fait ses débuts en novillada piquée à Mexico le 18 janvier 1999. Il envoie une légère aspiration à nos amis aturins : "Mon vrai début c'est le 1er mai de la même année à Aire-sur-l'Adour avec Marie Sara, El Fandi et Juan Bautista, devant des novillos de Yerbabuena..."Pour le maestro la Monumental ne vient qu'en second plan de la cité des bords de l'Adour. Les arènes Maurice-Lauche sont le théâtre de maints souvenirs aficionados et de diestros qui foulèrent le sable aturin. Chaque souvenir dispose de son envergure, de sa gravité, de son intérêt personnel.
Et enfin pour terminer, un hommage aux toros de Garcigrande, élevage avec lequel il s'entendait le mieux.
" Je suis toujours un pro Garcigrande, un pro Justo Hernández. C'est pour moi le toro idéal, j'adore les différentes variantes de son comportement (...) C'est un élevage qui se distingue aussi par sa bravoure. A la question "qu'est-ce pour toi un toro brave ? ", le maestro répond : " Ce n'est pas le toro qui prend trois, quatre ou dix piques et manque de race après, mais celui qui charge soixante fois par le bas, en baissant la tête et sans fléchir. Un toro auquel peuvent suffire deux bonnes piques. Les toros de Garcigrande ou de Victoriano, qui sont braves, il faut les piquer, les saigner, sinon tu le regretteras mais quand tu leur demandes après de suivre ta muleta au ras du sol et qu'ils viennent et reviennent, voilà la bravoure". Ce qui différencie le ressenti entre le diestro et l'aficionado !
Il "aime aussi les toros de Cuvillo, Jandilla, FuenteYmbro et particulièrement ceux d'Alcurrucén". Remontent en moi, les souvenirs de l'élevage des frères Lozano à Bilbao plusieurs saisons durant.
" Retiré des arènes, quel regard portes-tu, en tant qu'aficionado sur la corrida ? Je vois un changement générationnel (...) un renouveau aussi chez les organisateurs taurins, avec de jeunes empresarios comme José María Garzón, qui ne sont pas seulement des hommes d'affaires mais aussi de bons aficionados, avec du goût et de la sensibilité..." Objet que je partage pleinement et que je communique lors de chaque bilan de fin de saison !
"On veut du changement et c'est pour retourner à l'essence de la corrida, à son romantisme, à son côté plus artistique. Je m'y retrouve complètement et ça donne envie de revenir..." et le revoici, annoncé dans de nombreux cartels !
Trente ans se sont écoulés entre la première capea de Christian Nimeño à Tarascon et la première novillada non piquée de Sébastien Castella à Aignan !
Il ne vous faudra guère de temps pour dévorer Les trois grands de la tauromachie française par Antonio et José Carlos Arévalo. 142 pages. Magnifiques photos et légendes. Ed. Couleurs Garonne. 24,50 euros.
Gilbert Lamarque