Après une bonne temporada 2019 dans les Arènes Maurice Lauche d’Aire-sur-l'Adour, la Junta des Peñas avait concocté un cartel de luxe pour 2020. Malheureusement les circonstances liées au Covid nous ont contraints à renoncer et à décider de l’annulation à notre grand regret .
Afin que l’année 2020 ne soit pas tout à fait une année blanche pour la Junta, elle a décidé d’entretenir l’afición en organisant en cette fin de saison, une Tienta, le Vendredi 25 Septembre à partir de 19 h à la Ganaderia Dussau .
Avec le concours des familles Piles et Dussau, la tienta sera aussi l’occasion de permettre aux acteurs taurins, ganadero et toreros locaux, de rester mobilisés dans l’attente de jours meilleurs .
Comme de coutume, un moment de convivialité partagée suivra la partie taurine.
Après tant de corridas, il serait bon de gracier Jacques Durand
par Jean-Marcel Bouguerau, rédacteur en chef de Libération de 1981 à 1987. (article faisant suite à celui de mercredi 26/08).
13 août 2012
« Depuis le 1er juillet, les lecteurs de Libération sont privés de trois rubriques : les mots croisés, les échecs et une page que, depuis quelques années, ne connaissaient que les lecteurs du sud de la Loire, la page tauromachique, et avec elle la plume d’un écrivain, Jacques Durand, que tous les aficionados vénèrent autant que les connaisseurs de la petite reine vénéraient Antoine Blondin. Car c’est le talent du journaliste-écrivain de vous entraîner derrière les personnages des sportifs, des jockeys, des toreros et, à travers eux, dans leurs mythologies, leurs histoires. Lorsqu'en 1986, avec Gérard Dupuy, j’ai embauché Jacques à Libération, je ne lui ai donné qu’un conseil : « Il faut que la mercière de Roubaix comprenne la tauromachie. »
Il a fait beaucoup mieux. Si la mercière lit Jacques Durand, elle y a trouvé, grâce à la sensualité imagée de son écriture foisonnante, baroque, pleine d’images surprenantes, quelque chose qui pourra la rapprocher des meilleures évocations de l’art tauromachique. Car Durand écrit de manière gourmande, avec un plaisir d’écriture qui transpire de chacun de ses papiers.
Lorsqu'il parle du torero gitan Rafael de Paula, il raconte que, même lors de ses pires prestations, il avait « quelque chose » en plus qui faisait que ses admirateurs les lui pardonnaient, espérant qu’un jour il montrerait le meilleur. Ce qu’il fit, en signant, il y a trente ans, l’une des plus belles faenas du XXe siècle qui, comme le rapporte Jacques Durand, fut « déchirante, profonde, infinie et inénarrable ». Ou sur le stoïcisme des toreros. Exemple : José Tomás, l’un des plus grands, qui, le 9 avril 2000 à Saragosse : reçoit un grand coup de corne en haut de la cuisse droite. Diamètre de la blessure : 5 centimètres. Longueur totale des 3 trajectoires : 47 centimètres avec dissection du nerf sciatique. Tomás, comme si de rien n’était. Rien n’est. Il ne jette pas un œil à sa blessure, interdit à quiconque de la regarder, repart au combat sans boiter, renonce aux démonstrations de douleur, comme le lacédomien, la poitrine dévorée par le renard caché sous sa tunique, tue son toro, va à la barrière, se lave lentement les mains, reçoit une oreille, salue au centre de la piste et part à l’infirmerie. » Comme le joueur de flûte de Hamelin qui charmait les bêtes de son seul instrument, le torero crée de la beauté à partir de la charge brute d’un taureau sauvage et meurtrier. Il s’agit de dévier cette charge, de la domestiquer, de la ralentir jusqu'à ce que l’homme, le corps dans le berceau des cornes, lui impose son rythme. L’aficionado est celui qui peut attendre des heures ce moment magique.
Les lecteurs de Libération vont donc être privés de trois rubriques dont l’une était, depuis plus d’un quart de siècle, l’un des marqueurs de l’originalité de ce journal. Imagine-t’on l’Équipe virer le hussard Blondin, l’Obs se séparant de Robert Scipion ou le Point de Georges Pérec et de leurs mots croisés ? Il est étrange, au moment où la presse pâtit de la concurrence d’Internet, que Libération se prive de ces rubriques, d’autant plus étrange, s’agissant des mots croisés, que celle-ci est l’une des dernières qui ne peut exister sans le papier ! Car on n’est pas obligé d’aimer la corrida pour goûter la prose de Durand comme on pouvait détester le tiercé et aimer Hatzfeld*, ne jamais regarder un match de tennis et adorer Daney*.
Voici un ultime échantillon de cette prose unique : ce jour-là Jacques Durand rend compte du dernier livre d’un ancien torero, Alain Montcouquiol, le Fumeur de souvenirs (éditions Verdier), un titre qui, d’après Durand, « indique la liberté zigzagante du récit ». L’auteur comme les Indiens, communique par la fumée et d’ailleurs, joli signe, son premier habit de lumières, offert par le torero Chacarte, portait déjà la présence de cette nicotine mémorielle. Il était tabac et or. Sa mémoire Marlboro dépose donc, non sans mélancolie, ses fines cendres dans ces pages où il ressuscite ses fantômes. On ne s’en plaindra pas. On ne lui conseillera pas d’aller fumer dehors sur le trottoir. Avec ces cibiches du souvenir, son voyage par tafs. En vagabondant. On en grille une, par exemple, dans la canicule à Valdepeñas où une main, sortie par la vitre d’une voiture de torero filant vers les toros, semble, par jeu, toréer l’air torride.
Un jeu ? Au même moment, au passage de la voiture, des femmes en noir se signent. La peur referme l’enfantillage. On en grille une autre au buffet de la gare de Floirac, attablé avec Manolo Chopera et Antonio Ordoñez, et une « phrase éblouissante » d'Ordoñez en fait rougeoyer une de Sartre, comme on allume une clope à une autre : « L’émotion est une intuition de l’absolu. » Comme Rafael de Paula, Jacques Durand avait « quelque chose » en plus dont on risque de nous priver. Il n’est pas trop tard pour revenir sur cette décision. Après tant de corridas et d’oreilles méritées, il serait judicieux de gracier Jacques Durand. »
En vain.
* Jean Hatzfeld, journaliste et écrivain, prix Médicis en 2007, prix de Littérature sportive en 2011, a reçu de nombreuses autres distinctions, collabora à Libération, L’Équipe magazine, Autrement, LeMonde, Actuel…
** Serge Daney, critique de cinéma et journaliste. Il fut rédacteur en chef des Cahiers du cinéma, et travailla dix ans pour Libération.
C'est avec une frustration certaine, que la Novillada piquée de Garlin est poussée vers la sortie de la temporada 2020. Alors que la Peña Taurine Garlinoise s'était organisée pour que se déroule le Dimanche 11 octobre, sa 8ème Novillada consécutive du fer de Pedraza de Yeltes (annonce largement diffusée aux médias taurins le 9 avril 2020), nous apprenons par un communiqué de ce 21 août, que la Ville de Dax programme à son tour une novillada de ce fer le Dimanche 27 septembre, soit 2 semaines avant.
Chacun se fera son opinion, mais nous considérons cette démarche peu scrupuleuse vis à vis d'une arène qui a présenté cet élevage en France en Avril 2013 (et non pas dans la cité thermale comme stipulé ici ou là). L'histoire s'écrit mais ne se réécrit pas. Cela n'enlève aucun mérite à la commission taurine dacquoise de l'époque d'avoir lancé en 2014 ce fer à l'échelon corrida, et si de nombreux succès indéniables s'y sont produits, Garlin et « Pedraza » ont été également récompensés à plusieurs reprises dans notre catégorie (2014, 2015, 2018).
Que la commission taurine de Dax propose une corrida de Pedraza de Yeltes est tout à fait légitime. Par contre, en cette période critique que traversent toutes les ganaderias, la novillada matinale aurait pu provenir d’un autre élevage, nous semble-t-il.
Quoi qu’il en soit, devant cette double programmation du même fer à quinze jours d'intervalle, aussi imprévue qu'incohérente en ces temps de crise, il faut savoir raison garder. Nous avons donc pris la décision de nous retirer, non sans amertume, au risque de décevoir notre fidèle public.
Nous vous donnons cependant rendez-vous avec toujours autant de passion et d'aficion pour notre traditionnelle Novillada de Printemps, en Avril 2021.
Jacques Grignon-Dumoulin est mort le 13 novembre 2001 à l’âge de soixante-douze ans. André Fontaine écrivait dans Le Monde, le 16 novembre : « Jacques Grignon-Dumoulin avait la fougue et la silhouette trapue d’un bicho, d’un petit taureau, et une passion pour les corridas et le monde hispanique, dont il parlait et écrivait couramment la langue. »
Ce "petit taureau" était né à Hanoï – quelle incongruité ! , – d’un père administrateur des services civils d’Indochine. Il était entré au service étranger du journal Le Monde en 1956 pour s’y occuper, précisément, des questions ibéro-américaines. Il vécut à ce poste les années chaudes de la chute du dictateur cubain Trujillo et de l’avènement de Fidel Castro.
Il quitta en 1964 Le Monde pour l’ORTF, qui en fit quatre ans plus tard son directeur adjoint pour l’Amérique latine et bien plus tard, un grand reporter au service de la première chaîne de télévision.
C’est à l’antenne de cette première chaîne que – certains d’entre nous s’en souviennent certainement, et nous avons eu l’occasion de revoir à maintes reprises, cet extrait du journal télévisé – Jacques Grignon-Dumoulin a poussé un coup de gueule mémorable "en direct et en stéréo" :
« - Arrêtez le retour !
(Pas facile de garder son calme quand les conditions d’enregistrement ne sont pas toutes réunies et que les problèmes de son s’en mêlent).
- Vous enregistrez ? Est ce que je peux enregistrer ?
- Arrêtez le retour, bon Dieu !
(Quand ce ne sont pas les problèmes de son, c’est un désaccord avec son rédacteur en chef qui peut provoquer un problème).
- Laisse-moi travailler !
- On travaille à plusieurs.
- Tu m’emmerdes ! Tu me fais chier !
...
Gilles Bouleau disait de lui que c’était un homme délicieux et parfois un peu ronchon. On le surnommait Jacques Grognon-Dèslematin.
Le petit taureau avait du caractère !
Pourquoi donc un article en souvenir de ce Jacques grognon ?
Tout simplement parce que cet homme, journaliste, publiait de temps en temps, des articles tauromachiques dans le journal qui l’employait, le quotidien Le Monde.
Le 27 août 1957, il titrait :
« Une saison tauromachique rassurante. » dont voici un extrait :
« Déjà fortement avancée, la saison tauromachique 1957 restera sans aucun doute, par comparaison avec celles des années précédentes, une "temporada" heureuse, aussi bien pour les plus sévères connaisseurs que pour les simples "sympathisants", dont le flot grossissant voit les effets de rénovation poursuivis depuis la crise de 1953 par quelques grandes figures taurines et l’action de certains clubs (telle la fameuse Peña 7) n’ont pas été vains : un coup d’arrêt semble avoir été donné à la décadence progressive du spectacle tauromachique.
Les règles traditionnelles et essentielles de la corrida restent, jusqu'à présent au moins, en grande partie sauvegardées. La course "moderne", quelque peu défigurée certes par rapport à l’ancienne, n’est pas encore devenue, comme le laissent entendre les éternels mécontents, un "inutile massacre", une "ignoble farce".
À travers le drame des arènes, un mystère de très ancienne tradition populaire continue, malgré de graves manquements au rituel, à se dérouler chaque fois sous les yeux des spectateurs du vingtième siècle : un jeu de mort entre le courage, l’intelligence, l’adresse d’une part, et la force aveugle de l’autre, mystère auquel, il est vrai, le public est et a toujours été moins directement sensible qu’à la suavité d’une "véronique" savamment "distillée" ou à la lenteur déchirante d’une "naturelle" inspirée, toutes deux créations de l’artiste.
La bataille de San Isidro
Préparée dès la fin de l’hiver par un important remaniement des dirigeants des associations et clubs taurins accompagné d’énergiques appels à l’application du règlement actuel, la saison tauromachique 1957 s’est tout de suite annoncée fertile en événements de toute sorte.
Les premières courses passées, un conflit qui couvait depuis plus de deux ans a éclaté au grand jour. C’est à l’occasion de la fête madrilène de San Isidro, patron de la capitale, dont la célébration marque le véritable début de la "temporada" espagnole, que la sourde lutte entamée contre l’influence croissante et les prétentions du "trust" Camara – le tout-puissant "apoderado" (manager) – a dégénéré en bataille ouverte. »…
Gregorio Sánchez était, cette année-là, en haut de l’escalafón avec 73 corridas.
Autre pépite retrouvée dans les archives du journal en date du 21 août 1958 :
« Roquefort-des-Landes et la "fiesta de los toros". », extrait :
« C’est une sorte de pèlerinage aux sources de la tauromachie que de nombreux aficionados consacrent leur 15 août, malgré les "tentations" offertes par les grandes corridas de Bayonne et de Saint-Sébastien, en se rendant à Roquefort, petite bourgade enfouie au milieu de la forêt landaise. Non que ses traditions taurines y soient particulièrement anciennes – ses arènes de trois mille cinq cents places ont à peine six ans d’âge – ou que de grands maestros du "Ruedo" en aient jamais fait le théâtre de leurs prouesses.
Ce qu’on sait voir en place de Roquefort, ce sont ces toros que les habitants et leur maire ont coutume de "s’offrir" une fois l’an et qu’ils choisissent régulièrement dans les élevages andalous réputés les plus "difficiles", souvent même mis à l’index chez les jeunes toreros "arrivés" comme chez les jeunes novilleros "d’avenir". C’est dire les difficultés rencontrées par le syndicat d’initiative pour décider des hommes à affronter des novillos-toros comme les Isaias et Tulio Vasquez (sic), élevage très "style 1900", à l’honneur à Roquefort depuis trois ans.Vendredi dernier cependant Miguelin, Soares et Luis Ortego (sic), riche de l’enthousiasme de ses dix-sept ans, se présentaient au paseo réglementaire devant des gradins combles, inondés de soleil.
Quoique assez inégal, le lot des frères Vasquez (sic) était impressionnant : des "brutes" rustiques, âgées dans l’ensemble de près de quatre ans, faisant très largement le poids (263 kilos en canal en moyenne) et coiffées de larges pitons.
Le physique des pensionnaires de Vasquez (sic) allait de pair avec leur "moral" ; pleins d’allant, puissants (quatre chutes des uhlans), durs de pattes et (arrivant à l’estocade la bouche cousue), ils furent dans l’ensemble d’une noblesse moyenne et accusèrent une caste plutôt relative. Devant de tels adversaires, les trois jeunes toreros n’étaient évidemment pas de taille… Miguelin ne "consentit" aucun de ses "bichos", dont le premier se prêtait pourtant à la lidia. Il s’en débarrassa au plus vite, du bout des doigts, de deux vilains coups de rapière de côté. Soares toréa honorablement de cape, traçant d’allègres "chicuelinas", et fut même excellent aux bâtonnets (dans une paire de banderilles au "sesgo por dentro"). Mais, hésitant et électrique avec la flanelle (muleta), il dut s’y prendre à de nombreuses reprises pour dépêcher – malproprement – ses novillos. Luis Ortego (sic) sauva heureusement l’après-midi devant son premier ennemi, qu’il accueillit par véroniques et toréa avec courage et décision de la droite et de la gauche. Sa franche entrée "a matar", pour une estocade tombée suivie d’un descabello, lui valut deux oreilles et les ovations d’un public touché par l’émouvant combat mené par ce frêle gamin. »…
Le cartel de ce vendredi 15 août était donc : 6 novillos de Isaïas y Tulio Vázquez pour Miguel Mateo "Miguelin", Armando Soares et Luis Ortega. Ortega n’obtint qu’une oreille et le 3èmenovillo fit la vuelta.
Le dimanche 12 août 1951, les arènes avaient été inaugurées lors d’une non piquée avec des erales de Mme veuve Lescot.
En 1959, le dimanche 9 août, défila un certain Paco Camino combattant des novillos de l’élevage de Juan Belmonte.
Jacques Grignon-Dumoulin avait privilégié la placita en pins de Roquefort laissant à d’autres revisteros les plazas plus huppées.
Il faisait partie de ce cercle très apprécié qui comptait dans ses rangs plusieurs illustres plumes.
Jean Cau, écrivain et journaliste à l’Express, à France Observateur, à Paris Match, natif de Bram dans l’Aude – terre d’ovalie, patrie des Spanghero et d’Henri Rancoule où l’accent roule tel les cailloux dans le torrent – dont les périples de ferias espagnoles en ferias françaises lui inspirèrent, notamment, Les oreilles et la queue, Sévillanes ou bien La folie corrida.
Jean Lacouture passionné de rugby et de tauromachie, aimait à rappeler que son père était chirurgien des arènes de Bordeaux et que, enfant, ses parents n’hésitaient pas à parler devant lui de leur "afición" pour la corrida. Peu de temps après la Libération, il publia dans les colonnes de Combat ses premières chroniques taurines. Par la suite, il en rédigera plusieurs pour le Nouvel Observateur. « La tauromachie, disait-il, c’est le double sentiment de la beauté et de l’angoisse. »
Nous lui devons Signes du taureau (1979), Corridas (1988).
Puis Pierre Veilletet né à Momuy (Landes) à deux pas des Pyrénées-Atlantiques béarnaises, reçut en 1973, le prix Albert-Londres. Journaliste au quotidien Sud Ouest dont il fut le rédacteur en chef jusqu'en 2000, il participa en 1979 au lancement des Cahiers de la corrida. La tauromachie le passionnait, il est l’auteur de belles pages de chroniques pour le journal ainsi que Afición (2005), album réunissant des photographies réalisées sur plus de trente ans par Michel Dieuzaide, sur les grandes figures de la tauromachie et les plazas françaises et espagnoles. En 1986, était édité Le peuple du toro sous sa direction et celle de Véronique Flanet, « un grand dossier » qui réunissait de belles plumes ainsi que des photographes talentueux. Il nous a quitté en janvier 2013.
Ces quatre figuras étaient avant tout des journalistes et reporters qui ajoutèrent à leur activité, le plaisir d’écrire sur cette passion commune, la tauromachie. Ils ont tous quitté aujourd'hui, la planète des toros.
J’ajouterai à cette courte mais éclatante énumération trois contemporains :
Jacques Durand, journaliste et écrivain, lui, se consacre pour la grande part à la tauromachie.
C’est Le matin de Paris qui imprima son premier article sur la corrida. Puis Serge July, directeur de la publication de Libération depuis 1974, le charge d’une page entière dans le journal. Jacques Durand en était le rédacteur et le reporter. Cette page ne changea pas durant toutes ces années : un article principal, une photo noir et blanc et une colonne d’actualités. C’est sous Nicolas Demorand codirecteur autocrate depuis le 1er mars 2011 qu’il en a été congédié le 1er juillet 2012 ; la direction du journal jugeant la chose taurine futile, d’un autre temps pouvant faire perdre des lecteurs. Il publie désormais la page hebdomadaire du jeudi aux éditions Atelier Baie, page appréciée des aficionados et autres littéraires. N’oublions pas qu’il a été aussi rédacteur en chef des émissions taurines de Canal + à l’époque dorée et il collabora également au magazine télévisé sur France 3 : Face au Toril. Jacques Durand possède la plus belle écriture des plumitifs taurins, franche et lumineuse. Il écrit sur la corrida de façon originale comme le fit avant lui Jean Lacouture. Au début des années quatre-vingt, la presse s’intéressait à la corrida comme à un sport avec un vocabulaire souvent impénétrable, de scores et de victoires. Ces deux journalistes amenèrent une langue qui fit briller l’objet tauromachique. Durand en est aujourd'hui le prolongateur et c’est un plaisir que de lire ses Chroniques de sable (2000), ou ses Chroniques taurines (2003) parmi environ les deux douzaines de ses ouvrages taurins.
Le très éclectique bayonnais, Francis Marmande qui collabore au Monde depuis 1977, écrivain, critique littéraire, critique (Jazz Magazine, 1971 à 2000) et musicien de jazz, aficionado et revistero, donne régulièrement au journal des articles traitant de jazz, de littérature et… de tauromachie à l’occasion de grands événements. À lire aux éditions Verdier : Curro, Romero y Curro Romero (2001), À partir du lapin (2002) et Rocío (2003).
Enfin, sur les pas de Pierre Veilletet, le Saint-Sevérin Yves Harté, cet autre landais, rédacteur en chef et directeur adjoint de l’information au quotidien régional Sud Ouest, qui reçut lui aussi en 1990, le prix Albert-Londres pour sa série de reportages sur la chute du mur de Berlin (mars 1989), imprégné depuis son enfance de la tradition taurine, écrivit pour le journal de nombreuses chroniques. Il faut lire La huitième couleur, « petit bijou serti de tendresse et de mélancolie ». De son Sud-Ouest natal, il en extrait un usage du monde, rêveur autant que précis, des taureaux et de la littérature.
Combien sont-ils les quotidiens et les hebdomadaires aujourd'hui à nous proposer de telles chroniques ou la moindre reseña ? Sud Ouest, La Dépêche du Midi, Midi Libre, La Provence, L’Indépendant, tous des quotidiens régionaux...
Jacques Grignon-Dumoulin est sorti de l’ombre le temps de cet article.
PS. Quelques textes de Pierre Veilletet et d’Yves Harté sont à déguster dans le livre de Marc Lavie, Un siècle de corridas aux éditions Sud Ouest.
La semaine prochaine, nous publierons la "Tribune" de Jean-Marcel Bouguereau, rédacteur en chef de Libération, de 1981 à 1987, datée du 13 août 2012 où il demande le retour de J. Durand à ce même journal.