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L'amphithéâtre et l'imperator

Publié le par Cositas de toros

            La planète brûle, les glaciers fondent, les migrants meurent dans nos océans et nos mers poubelles et à la frontière biélorusse. La "blonde gironde aux yeux marine" trouve plus urgent de priver les mineurs français de l’entrée de nos arènes plutôt que de tendre la main aux mineurs migrants. La pauvreté en France a fait un bond en avant, une femme est tuée par son conjoint tous les trois jours. Le virus revient – il ne nous a jamais quittés. La COP 26, cette illusion de « pacte pour le climat » est un échec mais la France retient son souffle : faut-il ou non introduire dans la langue française un nouveau pronom ? Le pronom personnel "inclusif", « iel », décliné en « iels », « ielle » ou « ielles ». Neutre ou "non-binaire", ce pronom s’emploierait pour désigner une personne « qui ne se retrouve ni dans le genre masculin ni le genre féminin. »
On croit rêver ! Une tempête dans un verre d’eau orchestrée par les réseaux sociaux. Zemmour, « iel » et consorts, assez !

     Parlons de choses sérieuses dans un monde futile et négligeable, celui du mundillo !
     Noël porteur de bienfaits et l’année nouvelle, d’espérances, nous amènent à extravaguer. Plus que rêver, extravaguons.

 

   

      Et si la Monumental de Barcelone retentissait à nouveau des clameurs aficionadas aux environs de 18 heures ? Si cette plaza emblématique retrouvait son lustre d’antan, sa place dans la tauromachie, plaza qui a offert le plus de spectacles taurins lors du dernier quart du siècle dernier ?
     Car les toros n’y sont pas interdits ainsi que dans toute la Catalogne. Ce sont les indépendantistes qui ont perpétré la liquidation de la tauromachie devenant effective après que José Tomas ait rempli la Monumental en septembre 2011. Dix ans !
     La tauromachie est l’emblème de l’Espagne et cet outrage est basé uniquement sur l’agissement haineux de ceux qui nient leur pays et Madrid principalement. L’Espagne les dérange et les arènes de Catalogne sont orphelines.
     Les toros ne sont pas interdits à Barcelone. Cette offense votée au Parlement catalan en 2010 a été démantelée en 2016 quand l’arrêt de la Cour constitutionnelle l’a annulée par huit voix pour et trois contre, arguant que la chambre catalane avait outrepassé les pouvoirs de l’État. 
    Techniquement et légalement, l’un de nous, s'il le souhaite, peut, demain, organiser la fête des toros à Barcelone. Mais pour cela, il ne faut pas être frileux. Pour ça, il vous faut : un homme d’affaires muy bravo, un secteur solidaire – utopie – et des toreros aussi braves que l’homme d’affaires. Relever le défi et ne pas tomber dans le sectarisme des censeurs.
     Une annonce du retour des toros à Barcelone engendrerait un énorme ouragan et submergerait les médias, un symbole.
     Regardez le triomphe de Morante de la Puebla durant cette temporada, lui seul, a secoué le cocotier. Il a redonné de l’oxygène à un secteur presque moribond où nombre d’entre-nous n’y trouvons plus qu’ennui et désintérêt.

Morantus imperator

 


     Le mundillo s’immole, Morante, lui, sans apoderado, a pris les trastos pour vivre une résurrection. Petite révolution dans la sphère taurine, il a opté pour la variété des "encastes" aidant les hommes d’affaires modestes qui seuls se battaient pour la survie et a ouvert des "cartels" à de jeunes toreros. Avec des arguments, on redonne l’espoir, on ne se cache plus derrière la pandémie. 

     Le jury du Prix National de Tauromachie a récompensé José Antonio Morante Camacho pour sa « personnalité créative singulière d’un artiste qui recrée et renouvelle la tauromachie classique pour le public d’aujourd’hui. » Il a également souligné « son engagement pour la tauromachie à une période particulièrement difficile après la crise provoquée par le COVID-19, dans laquelle le diestro, assumant sa responsabilité de figure de proue de la tauromachie, a diversifié ses actions, misant sur la variété des "encastes", et "cartels", menant la tête de l’escalafón lors d’une saison au cours de laquelle il a effectué des actions mémorables dans les principales plazas espagnoles. »
     Il mériterait aussi la médaille des Beaux-Arts vue la dimension esthétique de sa tauromachie. Mais elle a un contenu politique indéniable. Il est peu probable qu’un ministère de ce gouvernement décerne sa médaille à un artiste/torero qui a manifesté sa sympathie pour Vox.
     Par contre, le Prix National de Tauromachie est décerné par un jury composé de représentants des différents secteurs de la tauromachie. Par ce prix, Morante est reconnu pour son mérite.

     Alors, revenons à l’extravagance et à la Monumental. Quel meilleur torero que Morante pour jouer l’ambassadeur sachant que les toros ne sont pas interdits. Il ne manque que la volonté de les programmer et de les célébrer.

Le grand évènement de l’année 2022
     Barcelone, Morante et les toros, une affiche révolutionnaire. À bien y réfléchir, ce n’est qu’une question de travail, de volonté, d’engagement envers les aficionados, la tauromachie, la corrida.
     Qui peut nous empêcher de rêver, de divaguer un peu ?

                                               Gilbert Lamarque

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San Fermin 2022

Publié le par Cositas de toros

                 

             

                La Casa de Misericordia n’exclut pas totalement que le nombre de corridas puisse être augmenté, s’élevant à plus d’une dizaine après l’annonce par le Conseil municipal de vouloir prolonger les Sanfermines en 2022, si, bien sûr, la situation épidémiologique le permet.
     La Casa de Misericordia a rendu public le choix des ganaderias qui seront combattues. José María Marco, président de la Commission taurine a confirmé que l’équipe de veedores est déjà sur le terrain. À moins d’un incident imprévu, ce seront les mêmes élevages prévus pour 2020. « Tous ont des toros pour San Fermín, c’est donc un devoir de justice et de morale d’annoncer les mêmes corridas qui ont été programmées et qui auraient dû avoir lieu ».
- Le fer de Miura, emblématique de Pampelune
- Victoriano del Río qui a remporté à plusieurs reprises le prix Carriquiri
- Cebada Gago, bien sûr, qui rejoindra les Corrales del Gas
- Jandilla présent lors des deux dernières éditions
- José Escolar, un autre fer emblématique comme Nuñez del Cuvillo
- Fuente Ymbro qui devait rejoindre la Feria 2020 pour remplacer El Puerto de San Lorenzo
- La Palmosilla, la nouveauté attendue en 2020 après la corrida à La Maestranza de Séville, sera incluse dans l’abonnement
- Pour le rejón, les toros du maestro Capea pour sa régularité
- Enfin, pour la novillada piquée, les toros navarrais de Pincha seront à nouveau présents après leur belle prestation de 2019.

     Concernant l’extension des festivités, José María Marco a déclaré qu’« elle sera étudiée au sein de la Casa de Misericordia et ce qui sera possible sera décidé ».
Ceci semble malgré tout compliqué dans le contexte actuel. Pour des raisons économiques, une prolongation des fêtes sera préjudiciable pour le porte-monnaie. Une prolongation de trois jours lui sera fatale.


 


     José María Marco a remercié Morante de la Puebla pour avoir remis le montant du Prix National de Tauromachie à la Casa de Misericordia. Depuis plus de 300 ans, La Casa de Misericordia continue d’être une référence dans la ville pour venir en aide aux plus défavorisés. À l’heure actuelle, cette institution, fondée en 1706, continue de maintenir son principe fondateur de base : donner la priorité aux personnes ayant les plus grands besoins socio-économiques, nées à Pampelune ou enregistrées dans la capitale navarraise. 
     En plus des dons et de l’aide qu’elle reçoit de la population de Pampelune, la Casa de Misericordia gère les arènes de la ville.

 


     Ce don de 30 000 euros pour les personnes âgées sans ressources est le bienvenu. Les finances de la Casa de Misericordia ne recevant plus les bénéfices des spectacles taurins depuis deux ans.
     Morante, au sommet de son art en cette temporada 2021, a effectué là, sa plus grande faena !
La générosité, autre valeur de la tauromachie. Palmas.
                                   

                                                                     Gilbert Lamarque

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Des taureaux dans les Balkans

Publié le par Cositas de toros

 « Une planète qui s’étend… »
                         écrivait Jean Lacouture dans Le Monde daté du 5 juin 1971.

     « On parle de la "planète des taureaux". Petite planète, jusqu’en 1971, dont les limites se situaient à l’ouest en Baja-California, à l’est du côté de Fréjus, au nord dans la région de Vichy, et, au sud, sur les rives du lac Titicaca. Mais voilà que nous allons nous sentir plus à l’aise avec le brusque élargissement de l’espace tauromachique que nous vaut ce mois de juin : le 13, une corrida donnée à Jaén (Andalousie occidentale) avec la participation du Cordobès, sera retransmise en mondiovision et par satellite dans quatorze pays, dont la Chine (apparemment l’impopulaire). Le lendemain, c’est le camp socialiste qui est investi : une corrida est prévue le 14 à Belgrade – précédent qui donnera peut-être l’occasion à Luis Miguel Dominguín de réaliser son vieux rêve : toréer à Moscou. [...] »


 

 
     À Barcelone, le 2 septembre de cette même année, le jeune Robert Piles reçoit l’alternative des mains de son parrain Luis Miguel Dominguín, témoin Palomo Linares au cours d’une corrida de Torrestrella.

 


     À Belgrade, un mois plus tard, corridas au programme d’une semaine espagnole en terre yougoslave. Luis Miguel et Roberto sont au paseo, accompagnés du rejoneador Alfredo Conde. Belgrade, capitale de la Yougoslavie du temps du maréchal Tito, aujourd’hui capitale de la Serbie depuis 2006, le Monténégro ayant repris son indépendance. 


     En 1971, Tito n’était plus en odeur de sainteté – normal pour un communiste de verdad –, les manifestations se succédaient révélant un réel malaise politique et social.
   

      Le mauvais temps de la seconde semaine de septembre a contraint les corridas à être reportées à deux reprises, et l’attente suscitée par ces deux festivités a été quelque peu refroidie par les prix des places, prix multipliés par trois fois celui d’un match de football à Belgrade !
     Elles eurent donc lieu les 3 et 4 octobre dans le Tashmajdan Stadium, le "Tas", aménagé pour la  circonstance.
     À cette occasion, Dominguín portera pour la dernière fois, le costume dessiné par Picasso, le peintre communiste. Un communiste en cachant un autre, en la personne du dirigeant communiste de l’ex-Yougoslavie, le maréchal Tito. Celui-ci devenu aficionado après avoir découvert la corrida en juillet 1937 à Valencia alors qu’il combattait avec le bataillon Dimitrov, l’unité balkanique des Brigades internationales contre Franco ; il avait 45 ans. Aficionado, peut-être, combattant, cela est plus improbable. Cette version nous conviendrait volontiers, mais après que le dirigeant yougoslave Milan Gorkic, faussement accusé d'espionnage ayant été fusillé par Staline, c'est à Tito que l'on proposa la direction du parti. Il vint à Paris où il organise le passage des Brigades internationales vers l'Espagne, encourageant les émigrés yougoslaves à rejoindre les brigades afin de les sauver de la répression stalinienne. Lui-même passa par la péninsule et porte le soupçon d'avoir participé aux liquidations des trotskistes... Alors ?

     Rappelons aussi que le frère de Luis Miguel, Domingo, lui-même ancien torero, était un militant actif du Parti Communiste espagnol clandestin ; il s’exilera pour échapper à la police franquiste. (voir Cositas du 15 avril 2021 : "L.M. Dominguín, leaders des unes, le fiston et le tonton".

 


     À la présidence, se trouvait l’avocat madrilène Manuel Amorós González décernant généreusement les plus hauts trophées au trio.
     Les toros – nous pouvons supposer la venue de novillos – de ces deux après-midi, étaient de Carlos Nuñez, pour la première et de Salvador Guardiola pour la seconde ; pas des monstres mais de présentation correcte pour les lieux. Il était souvent offert à l’œil de l’aficionado espagnol à cette époque, le même type de gabarit. Autant vous dire que Dominguín, Piles et le cavalier Conde coupèrent oreilles et queues !

 


     Dominguín fut accroché et roula au sol lors de la première corrida, et subit aussi une blessure à la main, le lendemain, blessure soignée à l’hôpital qui nécessita six points de suture. Le public, paraît-il, applaudit les toros beaucoup plus que les toreros !
     Josip Broz Tito meurt en 1980. Les toros ne revinrent jamais plus sur les bords du Danube.

                                                                Gilbert Lamarque

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Taus e buèus

Publié le par Cositas de toros


            La coutume si chère à Saint-Sever au XVIe siècle.

     Extraits de l’étude historique de Michel Le Grand – Archiviste des Landes – Les Courses de Taureaux dans le Sud-Ouest de la France jusqu’au début du XIXe siècle. Éditions Jean-Lacoste, Mont-de-Marsan. 1934.

            « Dans cette Chalosse où les courses sont de nos jours tellement goûtées, dans une ville où toreros et écarteurs travaillent encore chaque année bétail espagnol et vaches landaises – à Saint-Sever, l’antique Cap-de-Gascogne – voici que nous assistons dès le début du XVIe siècle non pas à une course isolée, mais bien aux manifestations répétées d’une coutume bien établie : la célébration de la fête patronale par des courses de taureaux.

 

Saint-Sever : abbatiale et place du Tour-du-Sol, gravure du 19e siècle


     Cette fête avait lieu, autrefois comme aujourd’hui, à la Saint-Jean d’été, le 21 juin. Ouvrons donc la collection des comptes du trésorier de Saint-Sever, heureusement conservée sans trop de lacunes depuis le XVIe siècle. Dans chaque compte annuel parvenu jusqu’à nous, un ou plusieurs articles du budget des dépenses, inscrits vers la date du 24 juin, font revivre sous nos yeux avec quelques détails l’organisation de ces courses déjà si lointaines.
     Sans trop nous attarder au chiffre des dépenses engagées pour ces courses – chiffre dont il est fort malaisé de donner actuellement une évaluation précise – notons surtout la nature des préparatifs des fêtes. En 1510, un certain Peyrot de Camer est payé pour "barrer les taureaux le jour de la Saint-Jean", autrement dit pour disposer les barrières de l’enceinte où se donnait la course. Le compte de 1513 est plus explicite, car il spécifie que c’est au Tour-du-Sol ( au Tornessor) qu’étaient placées ces barrières ; la course se faisait donc au cœur de la ville de Saint-Sever, sur l’emplacement approximatif de la place qui existe encore aujourd’hui : cette coutume de faire courir sur les places va rester en usage dans maintes localités de Gascogne jusqu’à la fin de l’ancien régime. Nouveaux détails dans les comptes de 1519 et de 1522 : le nommé Bernard de Camée reçoit un salaire pour débarrasser le Tour-du-Sol du bois qui l’encombre et le garnir de barrières.
     Ces documents, rédigés en gascon, puis en français, mentionnent formellement l’organisation de courses de taureaux, taus. L’on faisait probablement courir le jour de la Saint-Jean plusieurs animaux ; c’est ainsi qu’en 1555, divers articles du compte du trésorier (du 18 au 26 juin) concernent plusieurs achats faits à différents vachers : Pierre du Nouguer fournit un taureau pour vingt-deux francs bourdelois ; Arnaud du Brost en livre un second pour dix-huit franc de la même monnaie. Un vacher reçoit un salaire pour avoir conduit un animal de Bayrolle ( métairie encore existante aux environs de Saint-Sever) à Saint-Sever ; un crédit spécial couvre les frais d’un voyage à Renung (canton d’Aire-sur-l’Adour), où deux bouchers sont partis quérir un taureau.
     Cette course de l’année 1555 paraît donc importante ; naturellement le Tour-du-Sol est clôturé, cette fois-ci par deux charpentiers, "per garde que les taureaus ne sortissent fors ledit lieu Tornesor".
     Dépenses analogues en 1557-1558, où nous relevons en outre une coutume curieuse : la ville donne à un vacher, Arnaud de Bousta, le prix de la paire de souliers qu’il a dû chausser pour amener à Saint-Sever le taureau par lui vendu.
     Point n’est besoin d’insister : des courses semblables ont eu lieu en 1561, en 1567 et jusqu’à la fin du XVIe siècle. La formule usitée dans les articles des comptes du trésorier, "pour faire courir les taureaux le jour de Monsieur Saint-Jean, comme de coutume", indique suffisamment qu’il s’agit de la manifestation annuelle d’un usage solidement établi dans les mœurs de ce coin de Chalosse, – usage que nos textes font remonter à 1510, mais dont l’existence est assurément antérieure.
     A prendre les documents à la lettre, ces courses Saint-Séverines sont des courses de taureaux, taus ; mais la mise à mort n’y est sans doute pas plus pratiquée qu’à Moumour (Béarn, près d’Oloron où eut lieu une course au XVe siècle, organisée en 1469 ou au début de 1470, NDLR). En tout cas, les taureaux de Saint-Sever, comme ceux que nous verrons courir à Bazas et à Mont-de-Marsan, sont vraiment sauvages : le chroniqueur bordelais Gaufreteau fera la différence entre ce bétail et celui d’une course donnée à Bordeaux, en 1604, avec des animaux qui "Premièrement, n’étaient pas des plus furieux ni semblables à ceux qu’on fait courre à Bazas le jour et feste de la Saint-Jean, au Mont-de-Marsan à la Magdelaine et à Saint-Sever à la Saint-Jean aussi ; secundo, cette course se faisoit avec les chiens des bouchiers, car en un mot c’estoyent des bœufs…"

     Vers le milieu du XVIe siècle, un genre de courses particulier que nous aurons maintes fois l’occasion de signaler jusqu’à la fin de l’ancien régime, se pratiquait déjà dans le Sud-Ouest : nous voulons parler de la "course aux bœufs et aux vaches" délivrés par les bouchers. Avant d’abattre les animaux, les bouchers ou leurs valets, généralement à la demande du public, les lâchaient par les rues des villes et des bourgs et le premier venu pouvait se payer le plaisir d’écarter une bête, à vrai dire assez inoffensive… Naturellement bousculades et accidents s’ensuivaient, qui forcèrent municipalités et corps de villes à condamner de telles pratiques. »  Michel Le Grand.

 

Mais c’est au XVIIe siècle que les interdictions sérieuses apparaissent.
     

   

Gilles Boutault, 1597-1661

     

     La première est d’origine ecclésiastique – une interdiction royale suivra –, elle réside dans la promulgation par le pape Pie V de la bulle De salute gregis, le 1er novembre 1567. « Le texte pontifical porte un interdit général sur les combats de taureaux et de bêtes féroces : les souverains qui les autoriseront dans leurs états se verront frappés d’excommunication ou d’anathème ; sous les mêmes peines, les particuliers devront s’abstenir de lutter contre les taureaux, à pied comme à cheval, et la sépulture ecclésiastique leur sera refusée s’ils succombent en de tels combats. Aux évêques, enfin, le soin de publier et de faire observer dans leurs diocèses les prescriptions de la bulle ».
     Et les évêques de Bazas et d’Aire vont s’appuyer sur elle pour entamer dans leurs diocèses contre les courses, une lutte sévère. À Aire, l’évêque Gilles Boutault, le champion de cette lutte, va prendre à cœur cette question des courses comme une affaire personnelle, et se décide à sévir, probablement au cours de l’année 1634. Outre Aire, cité épiscopale, ce diocèse comprenait deux villes d’importance, Saint-Sever et Mont-de-Marsan, les deux adeptes ferventes des courses de taureaux. Or, à l’interdiction formelle posée par l’évêque, les jurats saint-séverins vont se montrer en principe soumis, le syndic montois au contraire nettement récalcitrant.
     Nous passerons sur les détails, les interdits, les délibérations… toujours est-il que l’évêque Gilles Boutault quitta le siège épiscopal d’Aire pour celui d’Évreux en 1649, s’estimant satisfait. La partie était peut-être gagnée… pour quelque temps. Le silence des textes relatifs aux courses durant le dernier tiers du XVIIe siècle, permet de supposer que les ordonnances épiscopales, appuyées par l’interdiction royale de 1648, finirent par intimider les organisateurs ; toutefois des courses ont fort bien pu se donner à cette époque sans laisser de traces dans les documents parvenus jusqu’à nous. Il suffisait pour les autorités municipales de ne pas les officialiser, les instances locales restant au plus près de leurs citoyens. Lesquels citoyens prompts à se révolter s’ils se voient privés de leurs coutumes. Des courses donc, organisées sous le manteau dupant les hommes en soutane !

 

Bernard d'Audijos. La révolte des invisibles


     Ah, sacrés Landais ! Ils réagiront encore et violemment cette fois-ci, de 1662 jusqu’en 1670, se soulevant contre la stricte application de l’impôt de la gabelle et trouvant un chef en la personne de Bernard d’Audijos, natif de Coudures. La Gascogne et en particulier la Chalosse furent durement secouées. Mais ceci est un autre combat. Irréductibles Landais ! 

                                                           Gilbert Lamarque
 

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12 DIAS 12 !

Publié le par Cositas de toros

      « Siete de julio…, ¡San Fermín! »

 

Enrique Maya, maire de Pampelune

               Après deux ans sans le chupinazo et le « Pobre de mi », la municipalité de Pampelune et son maire, Enrique Maya, sont à même de proposer trois jours de festivités supplémentaires, soit du 6 au 17 juillet, douze jours !
Voilà un fait nouveau mais pas inédit. En effet, jusque dans les années 1960, les fêtes et foires duraient jusqu’au 20 juillet.
Il semblerait « qu’un choix important devrait également concerner le programme taurin. » Les arènes fêteront le centenaire de leur inauguration qui eut lieu le 7 juillet 1922. Conçues par Francisco Urcola, elles ont été réaménagées par Rafael Moneo, agrandies permettant de recevoir 19 000 spectateurs.

Retour sur les origines

     À l’origine, les festivités du saint de la capitale navarraise étaient célébrées au Moyen Âge, le 10 octobre.
Avant que les Sanfermines voient le jour, le premier évêque de Pampelune était déjà vénéré.

     La tradition dit qu’il a été baptisé au IIIe siècle par le missionnaire Saturnino de Tolosa – le Toulouse haut-garonnais – dans un lieu connu aujourd’hui sous le nom de « pocico de San Cernin ou San Saturnino ». Contrairement à ce que l’on peut croire, San Saturnino est le véritable patron de Pampelune et non San Fermín qui détient le co-patronage de la Communauté Forale avec San Francisco Javier. Selon la tradition catholique, Firmin était le fils d’un sénateur romain à Pampelune, converti au christianisme. Saint Saturnin est considéré comme le premier évêque de Toulouse, martyrisé en 257 en étant attaché à un taureau furieux. La tradition fait souvent la confusion entre le martyre de saint Saturnin et celui de saint Firmin. Fermín a été ordonné prêtre à Toulouse avant de retourner dans la capitale navarraise comme évêque. Il sera décapité à Amiens au début du IVe siècle, vers l’année 303, mettant à mal le proverbe : « Les voyages forment la jeunesse ». Pour découvrir une autre façon de vivre ou de penser, Amiens ne fut pas la bonne destination !

Reliquaire de San Fermín, église San Lorenzo

     Son culte ne sera documenté qu’au XIIe siècle, importé d’Amiens dans les litanies dans lesquelles il apparaît dès le VIIIe siècle. Les reliques de Fermín furent transportées à Pampelune en 1196 et la ville aurait décidé de créer un évènement annuel mêlant la légende du martyre de saint Saturnin et du taureau à celle de la décapitation de saint Firmin.   

Les encierros

     C’est en 1591 que les habitants, lassés du fait que les Sanfermines soient sans cesse arrosées – non par le tinto ou le clarete, mais par la pluie – décident de les déplacer en juillet, les faisant coïncider avec les foires aux bestiaux. Le premier programme dont on dispose date précisément de cette année-là et consistait en une proclamation (pregón), un tournoi de lances, une pièce de théâtre en l’honneur du saint, un festival de danse, une procession et, le lendemain, une corrida. À l’origine, les Sanfermines ne duraient pas une semaine, mais seulement deux jours.
L’origine des encierros vient précisément de la route par laquelle les bergers emmenaient les toros de combat des près de La Ribera de Navarra à la plaza mayor, qui jusqu’en 1843 était la Plaza del Castillo. Un porte-étendard à cheval ouvrait la marche, les bergers fermaient la route. Quand les chicos ont commencé à courir devant les toros ? On ne le sait pas exactement mais Luis del Campo Jesús (1912-1995), médecin légiste à Pampelune, considéré comme « l’historien de la course de taureaux », partageait l’opinion des conseillers municipaux de 1787, lorsqu’ils affirmaient que « la fonction de conduire les taureaux est si ancienne à Pampelune que le début n’est pas connu », ou l’art de taper en touche !
D’autres théories disent que ce n’est qu’à la fin du XIXe siècle que cette coutume s’est mis en place. Toujours est-il que depuis 1852, l’itinéraire est pratiquement le même qu’aujourd’hui. À partir de cette époque, il n’y a eu qu’un seul changement dans la courbe finale, en 1922, année où les arènes ont été inaugurées. Depuis le parcours est inchangé. Concernant le départ, jusqu’en 1924, c’était à six heures du matin ! On passa ensuite à sept heures et nous voici depuis 1974 à huit.

Du « Riau-Riau » à « A San Fermín pedimos... »

     La composante religieuse s’est depuis, diluée. La procession à l’église de San Lorenzo pour célébrer les Vêpres des Sanfermines, en masse, s’est transformée, petit à petit, en un acte informel de protestation joyeuse sous le nom de « Riau-Riau », qui s’est ajouté officiellement au XXe siècle tout comme le chupinazo.
À partir de 1901, le chupinazo, la fusée a été lancée depuis la Plaza del Castillo pour signaler le début des festivités, fusée lancée par quelques quidams. C’est depuis 1941 que le chupinazo s’est réellement officialisé, lancé par la municipalité.
En ce qui concerne le chant « A San Fermín pedimos... » chanté trois fois devant la niche de San Fermín dans la côte de San Domingo avant le lâcher de l’encierro, il date de 1962. C’est un fragment de l’hymne de la peña La Unica, avec des paroles de Joaquín Zabalza, membre de Los Iruñako – Iruña, Pampelune en basque – et une musique du maestro Turillas.

Ernest Hemingway

     S’il y a bien un personnage qui a contribué à l’immortalisation des Sanfermines, c’est bien Ernest Hemingway. Personne controversée, il a été par ses écrits, le meilleur ambassadeur de la Fiesta à l’étranger. Son témoignage valait tellement que jusqu’à présent, ce sont des troupeaux de touristes qui se précipitent à Pampelune pour vivre cette fête devenue un des évènements de masse les plus importants au monde. La mairie a érigé un buste de l’écrivain sur l’allée Ernest Hemingway, of course. On sait que la tradition du foulard rouge est antérieure au vêtement blanc. Selon la tradition, la couleur rouge rappellerait le martyre de San Fermín mort décapité. Une autre théorie évoque l’année 1599, lorsqu’une épidémie frappe la ville. En guise de remède, un sceau avec la représentation des cinq plaies du Christ a été placé sur la poitrine du malade. Il est dit que le foulard rouge symbolise ces plaies qui, selon certains, auraient agi contre la peste. Pampelune continue de célébrer le Vœu des Cinq Plaies, el Voto de las Cinco Llagas, chaque Jeudi Saint en mémoire de cela. 

« Pobre de mi... »

     Et pour être complet – du moins, un peu plus accompli – rajoutons qu’en ce qui concerne les géants et les grosses têtes, los gigantes y los cabezudos, il existe des preuves de leur présence depuis le XVIe siècle, bien qu’au XVIIIe, ils soient tombés dans l’oubli. Carlos III avait interdit cette procession. C’est en 1860 que la municipalité commanda au sculpteur Tadeo Amorena, huit géants représentant quatre continents ou races. Aujourd’hui, la "troupe" est composée de 25 figurines.
Le « Pobre de mi… » qui est chanté à minuit le 14 juillet donne lieu au dernier acte des fêtes. C’est dans les années 1920, qu’un Pamplonais du nom de Julián Valencia et ses amis ont improvisé cette fin de fête. Le maire dit au revoir aux fêtards depuis le balcon de la mairie et invite tout le monde à venir participer aux festivités de l’année prochaine, pendant que chacun allume une bougie et retire son foulard.

     Retirera-t’on son foulard au soir du 17 juillet en 2022 ?
                                     

                                                       Gilbert Lamarque

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