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belles feuilles

L’ART DE LA PIQUE (3)

Publié le par Cositas de toros

 

 

LE DÉROULEMENT

DU TERCIO

 

 

 

Le tercio de piques occupe dans la corrida un rôle important.

Il se situe en début de corrida, lorsque le toro est en pleine possession de  toutes ses facultés. C’est un moment fort de la corrida, où le toro s’exprime seul. Sans être le collaborateur de l’homme ou lui servant de faire valoir. Face au cavalier qui le meurtrit avec sa puya, il déploie sa force et extériorise son instinct offensif.

Par excellence, c’est le tercio du toro.

Le rôle primordial de ce tercio est de tester l’agressivité de l’animal : sa bravoure.

Sur le plan physique, son rôle est d’amenuiser la puissance, la force brutale du toro pour le rendre plus malléable par une blessure qui doit saigner abondamment.

Les picadors à la fin du XVIIIème siècle étaient très populaires. Leurs noms apparaissaient en aussi gros caractères sur les affiches que ceux des matadors, ce qui n’est plus le cas aujourd’hui. Leurs costumes étaient brodés d’argent alors que ceux des matadors étaient brodés de fil blanc. Ils jouissaient d’une grande considération qui était due à leur façon de manœuvrer en piste en toute liberté et à leur guise. Ils avaient pris la relève des nobles, qui, au cours des siècles précédents étaient les prédécesseurs de cette forme de toreo. Pour la plupart d’entre eux, ils étaient d’anciens bouviers (vaqueros) se servant de leur outil de travail : une pique (garrocha) qui se transformera plus tard en la pique que l’on connait actuellement.

Avant 1927, trois picadors étaient en piste à la sortie du toro. Ils se tenaient à la gauche du toril et se plaçaient perpendiculairement à la barrière, à trois pas de cette dernière. Le plus près de la porte du toril était le picador le plus jeune dans la profession, il devait assurer la première rencontre. Par ordre d’ancienneté, les deux autres picadors se plaçaient après lui, le plus ancien étant le plus éloigné.

De nos jours, deux picadors seulement sortent en piste, alors que le toro s’y trouve déjà « passé » de cape par les toreros à pied.

Les picadors défilent au paseo avec la même convention qui régit les subalternes à pied. Pour chaque « cuadrilla » le picador le plus ancien dans la profession est à droite lorsque l’on regarde le paseo de face. Généralement, six picadors font le paseo à Madrid, les deux picadors de réserve règlementaire engagés par l’empressa y figurent également.

Les raies concentriques tracées dans la piste servent à délimiter la distance minimale entre le toro et le cavalier avant leur rencontre, soit deux mètres. Ces deux lignes se situent : La première à 7 mètres des barrières, la seconde à 9 mètres. Le sens de déplacement dans la piste fut précisé dans les règlements antérieurs. Le picador doit longer les barrières dans les sens inverse des aiguilles d’une montre, c'est-à-dire, se déplacer vers la droite. L’usage est conservé, bien que le règlement de 1962, actuellement en vigueur, soit muet sur ce point.

Pour une bonne exécution de la suerte, le picador doit se tenir un peu éloigné des barrières, sans dépasser la ligne.

Il doit présenter son cheval de face, légèrement de biais par rapport à la charge du toro. Le cite, qui consiste à provoquer le toro peut s’effectuer par la voix ou le geste, en soulevant la pique ou bien en faisant tinter l’étrier.

Au moment du cite par le picador, le règlement stipule qu’aucune personne ne pourra avancer plus loin que l’étrier gauche. Interdiction formelle également à quiconque de se trouver du côté droit.

Dans le cas d’une corrida de  trois toreros, l’on peut se trouver en piste à gauche du cheval : le torero qui doit lidier le toro, deux subalternes de sa cuadrilla et les deux autres toreros du cartel.Le troisième subalterne de la cuadrilla sera aux côtés du deuxième picador en piste, généralement prés de la porte des chevaux.

Le toro charge donc en ligne droite ; autrefois, le toro n’avait pas toujours une charge rectiligne car le picador était mobile ( A noter que de nos jours le picador est immobile lorsqu’il cite). Quand le toro fonce et arrive à bonne distance, le picador place sa pique à la base du morillo en appuyant de tout son poids (puyazo). Au cours de cette manœuvre il doit manier la bride du cheval vers la gauche afin de le faire pivoter, pour éviter d’enfermer le toro et pouvoir ainsi juger du caractère de celui-ci sous le châtiment. Il peut repiquer le toro pour défendre sa monture si celui-ci recharge, même s’il n’y a pas eu de quite permettant de replacer les deux protagonistes. Par contre il ne doit pas faire pivoter sa monture vers la droite afin de couper la retraite du taureau (carioca), ni s’adosser aux planches, ni piquer en arrière ou sur le côté, ne pas attendre aussi que le toro soit collé au peto pour le piquer. Toutes ces manœuvres donnant un châtiment excessif, auraient des conséquences fâcheuses pour la suite du combat (lidia).

Le picador ne doit pas abandonner son cheval, ni en changer au cours du premier tiers. Interdiction est faite au « monosabio » de tenir le cheval par la bride et aux toreros ou à quiconque de tirer le toro par la queue (quite coleando), à moins d’un danger extrême, c'est-à-dire pour sauver quelqu’un d’un coup de corne.

La bravoure d’un toro, (son instinct offensif) sera jugée par rapport à la manière dont il se comportera face au picador.

L’archétype du toro bravo est celui qui accepte plusieurs piques (trois et plus) dans le même terrain et avec détermination, attaque le groupe équestre immobile dès qu’il l’aperçoit ou à la moindre sollicitation, le cherchant même parfois. Au contact du cavalier, il pousse de toutes ses forces, en appui sur le train arrière, la tête basse non mobile sur le flanc ou le poitrail de la monture. Le terrain idéal pour provoquer le toro, mettre en évidence et apprécier sa qualité d’attaque est celui qui se trouve à l’opposé du toril.

Il y a une gradation dans l’appréciation de la bravoure exprimée. Diverses appellations sont employées pour en indiquer le degré : Bravucon, Bravito, De Bandera.

A l’inverse du toro bravo, il y a le manso (couard) qui refuse de s’attaquer au picador ou le fait dans un style incertain, par à coups, donnant des coups de tête pour se défendre et désarmer le piquero dont la pique le blesse. La mansedumbre comme la bravoure est aussi graduée par des qualificatifs : Mansote, Mansurron, Manso Perdido.

La corrida, concours de ganaderias, est celle où le toro doit être mis en valeur. Le tercio de piques s’y déroule avec beaucoup de sérieux pour permettre de juger la bravoure du toro, bravoure qui est le critère de valeur le plus important pour désigner les meilleurs toros. Certaines règles régissent les corridas concours : Outre les deux cercles concentriques habituels, on trace à l’opposé du toril deux lignes radiales aux barrières, ce qui permet de délimiter l’emplacement idéal pour le bon déroulement du tercio et apprécier la bravoure intrinsèque des toros en compétition.

Plusieurs piques prises dans le même terrain éloigné du toril sont une preuve de la qualité de la bravoure exprimée.

De même, lorsque le châtiment subi sera suffisant compte tenu des conditions physiques de l’animal, pour augmenter le nombre de piques possibles (autre critère de bravoure pure) acceptées par un toro, le tercio peut se prolonger en piquant avec le « regaton » (bout de hampe opposée au fer), rencontres supplémentaires sans trop de dommage pour le toro, mais probantes pour mettre en valeur son agressivité face au picador.

Cette suerte n’est utilisée qu’en corrida concours, ou dans des cas très exeptionnels.

Dans ce type de corrida, les éleveurs présentent en général des toros dont ils estiment que le comportement sera excellent, se basant exclusivement sur leur filiation. Si le comportement du toro est exemplaire, grâce de la vie leur est faite : C’est L’indulto.

Après guérison des blessures occasionnées par la pique, le toro restera dans l’élevage et servira de reproducteur.

Prochaine parution : Conclusion vendredi 26/01

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L’ART DE LA PIQUE (2)

Publié le par Cositas de toros

 

 

LE PICADOR

ET SA MONTURE

 

Considérons avec attention les protagonistes de la première suerte d’une corrida.

 

Le cheval : On utilise de nos jours des chevaux de forte corpulence qui n’ont plus la ressemblance avec ceux utilisés à la fin du XVIII ème siècle, qui étaient des chevaux de petite taille, généralement de race andalouse.

Depuis déjà plusieurs décennies, le cheval du picador n’est plus la victime d’un sacrifice comme le croient certains ou comme d’autres l’imaginent.

Il est devenu le fruit de l’évolution de sa fonction, dressé et habitué aux chocs qu’occasionnent le toro de combat lors de leur confrontation, même si en certaines circonstances, des affrontements violents se produisent.

Il n’y a plus de comparaison avec certaines scènes de boucherie qui se déroulaient en piste avant la mise en vigueur de la protection que l’on retrouve aujourd’hui appelée « caparaçon » et qui, lui aussi, c’est amélioré depuis 1927.

Cette protection est faite d’une solide toile non transperçable et rembourrée de coton, fixée et compartimentée par des pompons rouges, des lanières de cuir permettant son ajustage et sa fixation sur le cheval, son poids ne devant pas dépasser 30 Kilos. Le cheval une fois pourvu de son caparaçon règlementaire sera équipé d’une selle et de son harnachement. Un large étrier de métal (estribo ou desquilla) est monté sur le côté droit et rappelle l’étrier arabe.

Le cheval, animal sensible et peureux, subira une pratique devenue courante qui consiste à lui administrer un calmant avant la corrida. On lui bouchera les oreilles avec du papier journal pour l’isoler des bruits extérieurs. Son œil droit sera porteur d’un bandeau de couleur rouge.

Toutes ces opérations sont effectuées dans le but de lui permettre d’accomplir correctement sa besogne.

Le maniement du cheval se pratique en rênes d’appuis, c’est la façon de le conduire d’une seule main, la gauche. Seul l’éperon gauche sera utilisé pour le diriger, il faudra vérifier s’il est sensible de la bouche et s’assurer de ses aptitudes à répondre aux commandements. Certains chevaux peuvent être refusés par les vétérinaires. A cet effet, on leur perfore l’oreille gauche, signe distinctif de rejet afin de plus être utilisés comme monture de picador.

Le Picador : Le picador est un torero à cheval, survivance de l’époque lointaine où, combattre le toro à cheval avec la lance était un apanage de la noblesse. Par la suite, la lance deviendra « Rejon » dans un cas, puya dans l’autre.

Le picador est habillé d’une veste analogue à celle des toreros à pied (chaquetilla) pouvant être indifféremment brodée d’or, d’argent ou de jais. Il est coiffé d’un chapeau de feutre de castor (castoreño) très épais, à calotte rouge et à larges bords, orné d’un pompon de couleur. Ce chapeau est muni d’une jugulaire (barboquero).

Son pantalon est en daim de couleur jaune. Sa jambe droite est protégée par une botte cuissarde articulée appelée « mona » ou « gregoriana » du nom de son inventeur Grégorio GALLO. La chaussure gauche est une chaussure à bout renforcé et semelle de fer, surmontée d’une guêtre de même métal.

Depuis déjà de nombreuses années, le picador est devenu un subalterne aux ordres de son maestro qui doit être, aux yeux du public, le seul responsable dans l’art et la manière d’effectuer ce tercio fondamental qu’est la suerte de  piques.

Prochaine parution : Le déroulement du tercio Lundi 22/01

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L’ART DE LA PIQUE (1)

Publié le par Cositas de toros

 

 

Par Patrick SOUX

Trouvé dans une bibliothèque taurine  bien fournie, aménagée et très bien organisée, un texte composé de trois chapitres :

  • La pique et son montage
  • Le picador et sa monture
  • Le déroulement du tercio

Coécrit par Jean LICHAIRE et Christian CARTOUX avec des illustrations signées Jacques MICHEL, publié avec l’aimable autorisation de l’union des clubs taurins fédérés nîmois édité par Arles CA en 1988.

Je soumets à votre lecture ces trois chapitres très intéressants. Une « conclusion » faite de remarques personnelles étayée par des textes de revisteros reconnus conclura cette publication.

Aujourd’hui :

 

LA PIQUE

ET SON MONTAGE

 

La pique est l’arme spécifique utilisée par le picador. Son rôle principal est d’entailler le cuir du Toro, de provoquer une blessure qui doit saigner abondamment, car la zone où elle doit théoriquement pénétrer est très vascularisée.

La pique comporte deux parties : L’arme proprement dite, « la puya » et la hampe en bois « le palo » sur laquelle elle est assujettie.

La pointe de la pique est en acier spécial à faible proportion de chrome pour permettre un affutage à la pierre à eau, précis et de grande qualité.

La forme de la puya a évolué comme la corrida avec le temps.

                                                                                             

 

 

De 1791 à 1917 fut utilisée la pique dite « citron » dont le buttoir en corde avait la forme de ce fruit.

 

 

 

 

 

 

 

Jugée trop dévastatrice, elle fut remplacée par la pique à rondelle (garde de forme ronde de 7 cm de diamètre) dont les effets furent parfois aussi destructeurs que ceux de ces devancières…

 

 

 

 

 

1962 vit l’apparition de la pique actuelle, qui elle aussi semble avoir besoin d’être légèrement modifiée. Actuellement sa pointe est pyramidale à trois faces (20 mm de base). Les trois arêtes de 29 mm de longueur sont excessivement tranchantes, un gabarit (escantillon) permet de vérifier ces dimensions. La base de cette pyramide repose sur un butoir en bois formé de trois parties qui se juxtaposent parfaitement. L’ensemble est maintenu par une cordelette enroulé en spirales  serrées et recouverte de vernis.A la base de ce butoir se trouve une garde fixe en acier appelée  « cruceta » dont le rôle est d’empêcher que la puya ne pénètre trop profond dans le morillo du toro.

La pointe pyramidale de la puya utilisée en novillada a une hauteur inférieure de 3 mm à celle utilisée en corrida.

La hampe « palo », généralement en bois de hêtre doit, selon le règlement, être légèrement gauchie, ce qui n’est pas toujours le cas.

Fransisco GOMEZ  PAQUIRO discipline l’action des subalternes dans l’arène et notamment celle des picadors très libres jusque là. Il leur retira entre autre la pique longue (vara larga) pour les doter d’une plus courte encore en vigueur aujourd’hui.

La longueur palo + puya sera comprise entre 2.55m et 2.70m. Les puyas sont groupées dans une caisse en bois qui comporte 18 compartiments séparés et envoyées par le fabricant à l’union des criadores de toros de lidia à Madrid pour être vérifiées et contrôlées.

Si elles sont reconnues conformes lors de ce contrôle, cet organisme apposera sur le buttoir de cordelette vernis, une bande de papier portant son cachet, la date de vérification et le numéro de chaque puya. L’inscription sera en rouge pour les piques utilisées en novillada et en noir pour celles devant être employées en corrida de toros, attestant ainsi que la puya est règlementaire et de bonne qualité. Un certificat récapitulant les numéros des 18 puyas contenues dans une caisse sera joint à l’intérieur de celle-ci. La caisse sera plombée pour éviter toute fraude.

En principe, le matin de la corrida, les picadors procèdent au montage des piques. Ils choisissent les hampes par ordre d’ancienneté dans la profession, ils les personnalisent par l’inscription de leur nom sur la partie haute. Ce montage s’effectue dans certaines arènes à la vue du public, en tous cas, toujours en présence du délégué aux piques désigné par l’autorité. Le délégué, en présence des picadors rompt les scellés, ouvre la caisse, vérifie les numéros des piques qu’elle contient avec ceux du certificat joint. Les picadors peuvent alors, par ordre d’ancienneté, choisir leurs puyas et procéder au montage de celles-ci sur les hampes qu’ils ont préalablement choisies.

Le règlement prévoit la façon de monter lapuya sur le palo ; il précise : « L’on veillera à ce que l’une des trois faces de la pyramide formant la pointe reste tournée vers le haut, c'est-à-dire coincide avec la partie convexe de la hampe » (« el hilo a bajo »…), qui règlementairement doit être légèrement gauchie. Une explication est donnée pour justifier ce montage « afin d’éviter d’arracher la peau du toro ».

Pour assurer un meilleur contact entre le bois du palo et le métal de la puya , on peut utiliser des lamelles de papier journal, certains picadors mettent un clou pour assujettir complètement l’ensemble, mais ce n’est pas une obligation.

Une fois l’opération de montage terminé, le picador doit présenter ses piques au délégué. Si celui-ci reconnait que le montage est correct et conforme aux prescriptions du règlement, il donne son accord et le picador met un capuchon protecteur sur la pointe de chaque pique ; Dans le cas contraire, le délégué doit l’astreindre à se conformer au règlement. Les puyas montées sur les palos et vérifiées sont groupées et mises dans un placard fermé à clé. La clé sera conservée par le délégué ou le président de la corrida.

Avant la course, les piques sorties du placard seront disposée sur un râtelier dans le callejon à la vue du public, à une distance de 6m minimum de la porte des chevaux et sous la surveillance du délégué pendant le déroulement de la corrida.

La pique doit être remise au picador par une employé de l’empressa qui la reprendra à la fin du tercio.

 

Prochaine parution : Le picador et sa monture vendredi 19/01.

 

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L’HABILE ETUDIANT DE FALCES, eau-forte de 1815, planche n°14 de LA TAUROMAQUIA DE GOYA / CHICUELINA DE CRISTOBAL REYES à RISCLE le 5 août 2017.

Publié le par Cositas de toros

 

 

eau-forte de 1815, planche n°14 de

LA TAUROMAQUIA DE GOYA

 

 

 

                          

 

CHICUELINA

de Cristobal REYES 

à RISCLE, 05 Août 2017

 

 

Grand amateur de tauromachie, GOYA déclarait en 1771 à son ami le poète MORATIN : « Dans mon temps, j’ai su toréer, et je ne crains personne avec une épée à la main. »

La Tauromaquia est une série de trente trois gravures exécutées entre 1815 et 1816, qui retracent toutes les étapes des courses de taureaux. Cette œuvre fait suite au manuel publié par le torero PEPE HILLO en 1796, qui résumait l’évolution de l’art de toréer en Espagne. Un projet que Goya avait lui-même en tête depuis 1777, mais qu’il ne mit en œuvre que très lentement.

Amateur de courses, il rencontra dans le « haut » monde les toreros les plus célèbres. Mais c’était déjà le passé à l’époque où commence sa série nouvelle. La Tauromaquia est donc aussi un hommage nostalgique à une période de splendeur abolie.

La série de gravures nous montrent avec vivacité et précision les moments de la lutte entre le taureau et le torero, le plus souvent saisis avec puissance, l’arène divisée entre la lumière et l’ombre, alors que l’animal et l’homme s’affrontent dans un jeu à la fois spectaculaire et intensément dramatique.

Dans La Tauromaquia, GOYA a mis en lumière ces forces élémentaires, primaires qui sommeillent, cachées sous les conventions du civilisé, forces que font éclater les révolutions et qui, chez l’Espagnol, sont toujours à fleur de peau.

      … Et voici l’histoire et l’anecdote de notre étudiant de Falces :

Dans ses gravures, GOYA fera allusion à des héros, mais des héros réels, à des lutteurs dont ses contemporains ont gardé le souvenir. MORATIN, parlant de toreros fameux par leur jeu de cape, écrit : « Le très habile licencié de Falces y fut sans rival. » A cette mention, le peintre a pu joindre les souvenirs oraux de vieux amateurs. Ce fameux licencié est un personnage parfaitement historique. Il s’appelait Bernardo ALCALDE y MERINO et était originaire de Falces, bourg de Navarre, où il était né en 1709. Certains historiens du toreo le tiennent pour prêtre (peut-être seulement séminariste) entre autres D. José de DAZA qui, parlant du licencié dans un traité de 1778, écrit : « Dans les excellences et fantaisies en ce qui regarde les taureaux, aucun habile homme des autres régions d’Espagne ne l’égale ». Que fait donc ce « fameux licencié » qui a peut-être reçu les ordres ? GOYA nous le dit par le titre de sa gravure : L’habile étudiant de Falces, drapé de sa cape, se joue du taureau sans défense. Que ce qu’il représente soit entièrement conforme au vrai, nous en trouvons la confirmation dans un classique de la littérature taurine, D. José GOMARUSA. Dans sa lettre apologétique* de 1793, celui-ci décrit l’épisode représenté par GOYA. « Il déjoua – dit-il du licencié de Falces – plusieurs fois le taureau sans sortir du cercle qu’il avait lui-même tracé sur l’arène et cela, sans se dégager de sa cape rejetée sur son épaule. » Ce qui suppose, non seulement du courage, mais la parfaite connaissance de ce que les amateurs appellent « les terrains ». La renommée du licencié fut durable et encore à l’époque de GOYA, célébrée par D. José de la TIXERA, ami et collaborateur de PEPE HILLO.

Techniquement, GOYA améliore une légère esquisse en la traitant à l’eau-forte. Cette planche est évidente de vraisemblance et de précision, les détails nous en donnent une idée.

Le dessin pour la gravure est au Musée du Prado entre : « Un cavalier espagnol en place brisant des banderilles sans l’aide des chulos » et « Le fameux Martincho posant des banderilles al quiebro. » Respectivement, planches n° 13 et 15.

 

Francisco de GOYA y LUCIENTES, né près de Saragosse à Fuendetodos en 1746, mourra en exil à Bordeaux, le 16 avril 1828.

 

Voici comment d’un simple instantané original pris dans les modestes arènes de Riscle, Cristobal REYES, non moins modeste mais valeureux novillero, nous a rappelé par cette chicuelina enroulée, « le licencié de Falces » et nous a immergé dans l’Histoire et l’Art tauromachiques.

Et vuelta très fleurie au photographe !

 

*Lettre visant à défendre, à justifier une doctrine.

                                     

                                                                          Gilbert LAMARQUE

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CADEAU DE NOEL

Publié le par Cositas de toros

 

LA RÉVOLTE DU TAUREAU

 

 

 Aujourd’hui, nous vous offrons en guise de cadeau de Noël, un poème d'André MONTAGARD (Illustrations Henry COUVE),  extrait d'un recueil intitulé:

 

LA FIESTA DU SANG.

 

 Ce recueil a été écrit à l'intention de Paul RICARD, édité aux éditions BENDOR et achevé d'imprimer sur les presses des DISTILLERIES RICARD Sainte-Marthe à Marseille le 01 décembre 1956.

 

                                                                                               Patrick SOUX

 

 

 

                     Réponse du Taureau de Combat à ceux qui le plaignent de mourir dans l’arène

 

Pourquoi me plaignez-vous ? Quel transport vous anime

Et pourquoi de douceur vouloir fleurir mes pas ?

Merci d’avoir pour moi cet élan magnanime,

Mais gardez vos bontés, Messieurs je n’en veux pas !

 

Pour les agneaux bêlants, pour les brebis peureuses,

Et tous les animaux par vous domestiqués,

Réservez vos faveurs, vos pitiés généreuses,

Moi, je suis un taureau, Messieurs, vous vous moquez.

 

Mon frère malheureux, castré, veule, et stupide,

Le bœuf, trainant sa peine à longueur de sillon,

Et ruminant sa honte et son rêve torpide,

Plaignez-le de subir le joug de l’aiguillon.

 

Moi, je suis l’étalon farouche et prolifique,

Sûr de sa race forte et de sa liberté,

Balayant de mes crins mon torse magnifique,

Je promène au soleil mon ardente fierté !

 

Je suis le roi puissant de la lande sauvage,

Mon sourd mugissement fait courber les roseaux,

Et sur le sol rugueux que mon sabot ravage,

L’herbe rare s’enflamme au feu de mes naseaux.

 

 

Ce qu’il me faut à moi, c’est l’ampleur de l’arène,

Voir dans ma furia rouler les picadors,

Et tournoyer au vent de la grâce souveraine,

Des banderilleros et des toréadors.

 

C’est la foule enivrée, excitant mon courage,

Hurlant "Bravo toro" quand je fonce éperdu,

Et, quand sous la capa que je foule avec rage,

J’écrase un matador par ma corne étendu.

 

Dans le scintillement rutilant des épées,

Et dans le flamboiement pourpre des muletas,

Je veux mourir l’œil plein de visions d’épopées,

Aux cris des hidalgos et des señoritas.

 

Et j’irais, grâce à vous, sans panache et sans lutte,

Garrotté lâchement, la bricole en sautoir,

Tomber sous le marteau dégradant d’une brute,

Dans le silence morne et froid d’un  abattoir ?

 

Allons Messieurs, épargnez moi ce ridicule,

N’insultez pas ainsi mon orgueil sans remords,

Quand le lion lui-même à mon assaut recule,

Au prix de votre sang veuillez payer ma mort !

 

Et ne me blâmez pas d’aborder la bataille,

De préférer périr par un coup d’espada,

Affrontant seul à seul un héros de ma taille,

Honneur au torero ! Gloire à la Corrida !

 

 

 

 

Nous vous souhaitons à tous, de passer d'agréables fêtes de Noël dans la joie et le partage.

 

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