Retour à Madrid
Comme nous le savons, en Espagne, les régions décident.
Les terrasses sont pleines, les commerces, restaurants, théâtres et musées sont ouverts. Avec masques et limitation d’affluence, certes, mais ouverts. Depuis des mois, les photos de Madrid comme une oasis de la vie d’avant ont fait le tour de l’Europe et les rumeurs de fêtes ont fait des envieux. L’image est inattendue et provocante, dans un pays particulièrement frappé par la première vague de la contagion. Il faut dire qu’en Espagne, la lutte contre la pandémie s’est transformée au fil des mois en un immense chaos politique et géographique.
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Durant le printemps 2020, chaque négociation pour faire voter au Parlement quinze jours ou trois semaines de prolongation de l’état d’alerte a provoqué de durs affrontements avec l’opposition, ainsi que les protestations des régions contre cette intrusion de l’État central sur leurs territoires. Faute d’appuis parlementaires solides, échaudé par des mois de tensions, le gouvernement du socialiste Pedro Sánchez s’est résolu à jeter l’éponge. Il a passé le relais de la gestion de la crise sanitaire aux administrations régionales au moment de la montée de la deuxième vague de contagion.
Depuis l’automne, ce sont donc celles-ci qui sont aux commandes, avec pour cadre général un état d’alerte allégé qui fixe un couvre-feu à 23 heures et la possibilité de limiter des déplacements d’une région à l’autre. Le ministère de la Santé n’a plus qu’un rôle de coordinateur et chaque région, établit sa stratégie selon sa situation sanitaire et ses spécificités géographiques. Voire ses convictions idéologiques.
Pendant qu’à Barcelone, Bilbao ou Séville, bars et restaurants baissent le rideau à chaque remontée du virus, Madrid a fait le pari de la moindre intervention en laissant l’activité ouverte. L’économie passe avant tout, pour la présidente de la Communauté de Madrid, Isabel Díaz Ayuso, nouvelle égérie de l’aile ultralibérale du Parti populaire. Elle n’a pas fléchi en dépit d’un taux de contamination qui est, depuis des mois, le double de la moyenne nationale. C’est "gonflé", pour certains c’est suicidaire. Mais la stratégie a payé jusqu’à présent, et le score attendu aux élections du 4 mai a été à la hauteur de ses prévisions. La voici avec un second mandat et un gain d’envergure au sein de l’opposition.
Le chant des partisans.
Ione Belarra, ministre des Droits sociaux – ne pas confondre avec Belharra, la mythique vague du Pays Basque –, devient le successeur d’Iglesias à Podemos. Fera-t’elle quelques vagues ou seulement quelques clapotis ? « Ami, si tu tombes un ami sort de l’ombre à ta place... ». Le parti essaie de tourner la page rapidement et étudie l’avenir immédiat. Le leadership laissé vacant par le calamiteux Iglesias, va certainement se féminiser et se répartir entre Ione Belarra, mais aussi, dans un futur proche, Yolanda Díaz, troisième vice-présidente du gouvernement et ministre du Travail ainsi que la ministre de l’Égalité, Irene Montero, toutes les trois du parti Podemos.
Les dieux et divinités taurines sont tombés sur la personne de Pablo Iglesias. Lui qui proposait, il y a encore peu de temps, de retirer toute aide à la tauromachie et de fermer le Centre des affaires taurines de Madrid : « Un corps "fantôme" sans compétence ». L’ex torero Miguel Abellan, adhérent du Parti populaire et directeur du Centre, a certainement savouré. En pré-campagne, il souhaitait faire avancer la Communauté de Madrid au sujet de la protection des animaux, comme cela s’est produit au gouvernement avec la création de la première Direction générale pour les droits des animaux.
Isabel Díaz Ayuso annonçait, dans la foulée, un accord pour promouvoir 18 spectacles taurins dans les communes de moins de 8 000 habitants, dans la Communauté, lorsque la situation sanitaire le permettra.
Après avoir visité les arènes de Las Ventas où une nouvelle peinture murale en céramique en hommage à Victor Barrio, œuvre de l’artiste Luis Gordillo, elle a expliqué que le Conseil du gouvernement (la Junta) a donné le feu vert à la signature de l’accord de collaboration entre la Communauté de Madrid et la Fondation Toro de Lidia pour lancer la Fiesta del Toro 2021/2022, dotée de 900 000 euros. Ces célébrations commenceront avant le 31 décembre 2021 jusqu’au 1er juillet 2022.
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Pablo Iglesias jugeait inadmissible que la mort des taureaux dans les arènes soit de la culture et soit financée par l’argent de la culture… « les changements culturels doivent se faire de manière démocratique ». « Que le peuple décide, que le peuple vote », a-t’il souligné.
Voilà, le peuple a décidé, le peuple a voté ! Espérant que dans ces votes, l'engagement des aficionados a compté - un peu - dans le résultat.
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Dernière info : Enrique Ruiz Escudero, responsable de la Santé par intérim de la Communauté annonce qu'à partir de samedi 8 mai, il n'y aura plus de couvre-feu et la restauration ouvrira jusqu'à minuit dans toute la Communauté de Madrid.
Souriez, c'est vendredi ! Oui, 1er et 8 mai un samedi, j'entends les grincheux...
Gilbert Lamarque