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"Tardes de soledad"

Publié le par Cositas de toros

Documentaire, "Tardes de soledad" par Albert Serra (France-Espagne, 2h05)... une plongée inédite au coeur de  la corrida.

Le Nouvel Observateur du 27 mars, n° 3157, billet signé par Guillaume Loison, journaliste dans les pages Culture, Cinéma. Guillaume Loison, chroniqueur culturel, ni anti, ni aficionado, ici, élément objectif, oeil neuf sur le sujet. Mais peut-on être détaché, impartial sur ce thème sensible ?

     "Le torero nous rappelle que la vie est faite de risques et que la mort est inévitable." A. Serra.

"Menton en l'air, regard de cartoon, déhanchements syncopés, et puis ces frôlements contre le flanc de la bête écumante qu'il se prépare à mettre à mort : ainsi gesticule Andrés Roca Rey, torero star du moment, dans le documentaire d'Albert Serra, continuum de rituels, de tics, de jurons saisis entre rigueur chirurgicale et goguenardise un peu fourre-tout chère au cinéaste de "Pacification". Ce dernier dit revendiquer sa neutralité quant au spectacle sanglant de la corrida, bien que cela paraisse difficile, sinon miraculeux. Disons que le film, roublard au carré, réussit à s'adresser quasi simultanément à deux publics que tout oppose. Aux aficionados de la première heure, il offre une plongée inédite au coeur des offensives du matador et ses affidés, face aux taureaux offerts en pâture (seuls les instructions et les encouragements du cercle rapproché du champion rythment le combat, quasi dénué des bruits du public), et exploite sans vergogne l'esthétique de la discipline avec un talent indubitable. Cadrages resserrés, mouvements d'appareil soyeux, "Tardes de soledad" embrasse dans un même élan une symphonie barbare de froissements d'étoffes, de textures et de chair, où se déploient à parts égales l'impétuosité sidérante du torero et la puissance animale adverse, bouillonnements de rage et déluges de sophistication. A cette aune, comment séduire les anti-corrida ? Par ce regard d'entomologiste mi-malicieux, mi-cruel porté sur le personnage d'Andrés Roca Rey, petit monstre narcissique ivre de lui-même qui, à bien des égards, semble importé du cinéma de Werner Herzog. Le torero n'est qu'un rouage dans ce petit monde de la tauromachie dont Albert Serra passe au crible l'étouffant jeu de rôles. Des adjoints de Rey, petits bouchers confits d'obséquiosité et de virilisme beauf, aux protocoles ancestraux mêlant le gore au non-sens, "Tardes de soledad" lézarde l'ensemble d'éclairs sensationnalistes qui soulignent la barbarie ordinaire, les images cachées par le carnaval folklorique - comme les derniers râles du taureau, poussés bien après sa mort annoncée." Guillaume Loison

     La corrida au grand jour, victime aussi de quelques sarcasmes. Au moins, cet article à le mérite d'exister dans ce court espace médiatique.

                    Gilbert Lamarque

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