LA LÂCHETE DU TORERO
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Je vais enfoncer une porte déjà ouverte et tant pis pour les courants d’air !
Nous entendons de la part de personnes adultes et responsables que tel torero n’a pas fait le boulot, qu’il est lâche, couard…
George Sand disait un jour à Gustave Flaubert : « Ce que j’ai de meilleur en moi c’est les autres. »
Tous les artistes et surtout les toreros pourraient reprendre ce mot pour leur propre compte : ce qu’ils ont de meilleur en eux, c’est le public, … à condition cependant que le public soit bon. Et pour que le public soit bon, il ne suffit pas qu’il connaisse la tauromachie, il faut encore qu’il sache émettre à propos son opinion, qu’il manifeste à bon escient. C’est ce manque de discernement qui fait que le bât blesse. Vous rajoutez à cela un manque total d’humanité et nous entrons dans la brutalité. Si nous faisons abstraction de cette partie des spectateurs – la plus nombreuse – qu’une expérience trop faible rend incapable d’apprécier une course, nous trouvons que sur cent connaisseurs, il y a une vingtaine de dilettantes – un peu capricieux – soixante-quinze exaltés et cinq bons aficionados.
De ces derniers, nous ne trouvons rien à redire, si ce n’est pour souhaiter qu’ils deviennent promptement légion avant que le rideau ne retombe.
Puis côté ombre, le plus souvent en barrera, sombrero sévillan, lunettes noires, le pur havane entre leurs dents blanches – ça sent la caricature –, voici les dilettantes.
La corrida peut commencer, les plus beaux coups d’épée peuvent succéder aux plus belles passes de capes, pas un muscle de leur figure ne tressaillira, pas un battement de mains ne viendra exprimer leur enthousiasme. Il y a aussi quelques échantillons de ce calibre dans le callejón. Sont-ils insensibles à la beauté du spectacle ? Non, mais vous n’avez pas saisi, ils sont délicatement épicuriens, ils jouissent de l’intérieur : applaudir, manifester sa joie sont des efforts qui diminueraient leur plaisir. Et puis, s’ils encouragent l’art par leur présence, il est inutile de l’encourager aussi par leurs approbations : trop est trop. Et surtout, ne pas faire comme tout le monde…
Les toreros ont besoin d’être stimulés ; ils se mettent plus que les autres artistes au diapason du public, et si nous vibrons, leur ardeur ne faiblira pas.
Mais ce genre de spectateurs est peu nombreux : la proportion de vingt pour cent est exagérée…
Aux antipodes, voici les exaltés, parfois enragés, souvent survoltés.
Ceux-là sont ennuyeux, bien plus, ils sont dangereux. Ils ignorent toute mesure dans leurs enthousiasmes ou leurs colères nombreuses. Souvent par le passé, leurs exigences ont provoqué des drames.
J’ai retrouvé quelques situations dans les feuilles du passé.
Il y eut un certain Manfredi obligeant Curro-Guillén à tuer a recibir un toro de sentido et voyant ce malheureux diestro tomber mort devant lui. Également, Fabrilo tué par la cruelle stupidité des aficionados de Valencia. L’histoire en connut d’autres.
Des colères, des exigences abusives comme tout ce qui est exagéré.
Pour quarante ou cinquante euros, on n’achète pas le droit d’envoyer un homme à la mort.
J’ai le souvenir encore récent du dimanche 14 juillet 2019 à Céret, donc après le temps des cerises.
Céret, l’ADAC que j’apprécie ainsi que les amis catalans.
Sous un temps chaud et un vent sec ou un temps sec et un vent chaud, sortirent six Saltillo en moyenne de 532 kg et 5 ans et 7 mois, puissants et de caste pas toujours bonne.
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Ce fut le calvaire pour Fernando Robleño, lui qui fut des années durant l’enfant chéri du ruedo cérétan. En 2012, dans la cité, on tourna un film franco-belge intitulé Paradis perdu, sept ans plus tard, le madrilène le perdit aussi. Il sécha devant du vrai toro qui nous ont ramenés fissa aux fondamentaux. Si il y eut un public aficionado qui sut reconnaître les bonnes phases de piques, de la lidia, etc, il y eut aussi un public de sauvages irrespectueux, vulgaires à l’encontre notamment de l’infortuné Robleño. Il est vrai que le chef de lidia fut transparent, sur le retrait, mais encore a-t’il eu le courage de venir dans ce fief du toro-toro. Combien sont-ils à accepter de tels défis ? A t’on le droit de traiter un torero de la sorte ?
Ceci ne faisant qu’un abcès de plus rongeant la Fiesta, nous n’avons que faire de tels abrutis affligeant le monde taurin et la corrida vacillante.
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Francisco Herrera Rodríguez "Curro-Guillén" né à Utrera (Séville) en 1783, trouva la mort à Ronda le 21 mai 1820 affrontant, aux côtés d’un autre sévillan, Leoncillo, des toros de Cabrera. La rivalité exacerbée chez certains spectateurs qui se comportaient plus en supporters qu’en aficionados, fit qu’ils furent accueillis au paseo par des marques d’hostilité. Selon certains, alors que Curro-Guillén se préparait à l’estocade, un certain Manfredi – a t’il existé ? – l’interpella. Curro-Guillén estoquant précipitamment le Cabrera, celui-ci lui planta la corne dans la cuisse droite, le précipita contre la barrière et le reprit alors sur la corne gauche. Ainsi mourut à l’infirmerie Curro-Guillén quelques minutes plus tard.
Julio Aparici Pascual "Fabrilo" né à Ruzafa (Valence) en 1866, est blessé par le toro "Lengüeto" de José Manuel de la Cámara dans la plaza de Valence, le 27 mai 1897. Les conditions atmosphériques étaient mauvaises mais le public insista pour qu’il pose les bâtonnets. La protestation monta et le malheureux torero s’exécuta. À la seconde tentative, il est accroché par la corne gauche à l’aine, le soulevant. Trois jours plus tard, le 30 mai une péritonite s’étant déclarée, il mourut dans de terribles souffrances.
Héros mais victimes.
Humeur vagabonde.
Comme vous le savez, la Feria du Rhôny de Vergèze est rayée des futurs programmes tauromachiques sur décision de la nouvelle maire de la cité.
A ce sujet, l'inévitable et nécessaire André Viard a adressé un message : "On pourra toujours regretter que la ville de Vergèze n'ait jamais voulu adhérer à l'UVTF malgré diverses sollicitations. Peut-être aurait-il été moins facile pour la nouvelle municipalité de prendre cette décision..."
"Moins facile..." ?! Pour aboutir au même résultat. Si l'UVTF était performante, cela se saurait, non ?
Tout est si élémentaire mon cher Superdédé. N'a t'il pas, il y a quelques années (2016), conclue définitivement que la corrida remontait à 23 000 ans. Voir Tauromachies universelles (UVTF-ONCT), page 11. "Villars - 23 000 ans, la première tauromachie". [...] Pour la première fois dans l'histoire de l'Humanité, une peinture représente un homme et un animal en interaction, et cette scène est une "tauromachie". La première d'une longue série."
Raisonnement simpliste. Quand les aspirations voudraient être réalité ! Tauromachies universelles n'en reste pas moins un précieux ouvrage et une belle exposition à but éducatif, alors justement pourquoi ces supercheries ?
Vous comprendrez pourquoi j'aborde ce sujet. Rendez-vous mercredi prochain.
Gilbert Lamarque