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histoire

LACHEPAILLET EN VERT-DE-GRIS

Publié le par Cositas de toros

 

Soldat allemand devant la mairie de Bayonne

     Suite à l’armistice franco-allemande du 22 juin 1940, les troupes allemandes franchissent l’Adour, trois jours plus tard, le 25 juin 1940.

A partir de cette date, le Pays Basque est occupé par la Wehrmacht contrôlant tout le secteur côtier et frontalier.

Les autorités d’occupation instaurent une ligne de démarcation qu’elles feront sauter le 1er mars 1943 envahissant tout le territoire français. Les Basses-Pyrénées sont séparées par cette ligne, les 2/3 du Pays Basque Nord se trouve en "zone occupée" tandis que la Soule est en "zone libre".

Dès la fin de 1940, des femmes et des hommes tentent de résister. Pas tous…

Car, il y eut également des actes de franche collaboration dont les deux novilladas offertes aux officiers et soldats nazis.

 

Déjà, ils étaient 3 000 sur les gradins des arènes de Lachepaillet à Bayonne pour la course landaise du lundi de Pâques.

 

   

      Lors de ces deux jours, le samedi 17 et le dimanche 18 mai 1941, des oriflammes à croix gammées flottaient au vent, rincés par la pluie et des batteries anti-aériennes étaient installées sur les toits.

 

La Gazette de Bayonne, de Biarritz et du Pays Basque s’en fait l’écho le 13 mai :

    

     « Voilà deux ans bientôt que les aficionados de notre région sont privés de leur spectacle favori : pas de corridas en France ; impossibilité d’aller en voir en Espagne. Grande a été leur satisfaction en apprenant que nous allions avoir deux corridas à Bayonne le 17 et le 18 mai. Deux corridas si rapprochées ! Nous sommes gâtés…

     Ce seront des novilladas, direz-vous. Il y a bien longtemps précisément que nous étions nombreux à réclamer des novilladas en France. Je dirai demain pourquoi, et je ferai connaître l’opinion de mon ami Carlos de V. de Madrid, qui est peut-être l’espagnol qui a vu le plus de corridas, et qui aime tant les novilladas. N’avons-nous pas appris ces jours derniers que celle de la foire de Séville avait rempli les vastes arènes d’une foule enthousiaste ?

Les jeunes veulent se révéler, il y va de leur avenir, je crois bien que dans les arènes de Bayonne, la Séville française, nous verrons aussi de belles choses samedi et dimanche prochain. »

 

     Mais les aficionados vont déchanter.

 

 

     Voici, extrait du livre Bayonne sept siècles de premières, ce qu’écrivait Claude Pelletier :

     « … Ces deux courses seront presque exclusivement réservées aux militaires stationnés dans le secteur. Quelques dizaines de civils se glisseront à grand-peine dans la marée en uniforme. C’était un spectacle étrange et sinistre que ces gradins de "théâtre aux armées".

     Avec l’esprit pratique qui les inspire en toutes choses, les organisateurs ont pensé à tout, même aux batteries anti-aériennes postées sur le toit. Mais ils n’ont pas prévu le mauvais temps…

     Ce samedi 17 mai, il pleut des cordes. Normalement, la course n’est pas possible. Mais impossible n’est pas teuton, et les toreros sont fermement priés de faire comme s’il ne pleuvait pas. A la guerre comme à la guerre !

 

    

     A l’heure convenue, les camions déversent leurs cargaisons casquées et bottées tandis que les colonnes pédestres convergent vers Lachepaillet. Les spectateurs se rangent dans un ordre rigoureux devant les portes désignées à chaque chef de détachement. Des plans détaillés de l’arène ont été distribués à profusion. Un ordre claque. Des milliers de fourmis vertes et noires s’ébranlent à l’unisson. En cinq minutes, les gradins sont totalement investis. L’opération s’est déroulée avec une précision absolue et dans un grand silence. C’est ahurissant : pas une erreur, pas la moindre hésitation, et, bien entendu, aucune bousculade... »

 

 

     La première course eut lieu donc sous la pluie battante, le sol glissant, l’intérêt du spectacle en a souffert. Le dimanche, le temps était plus favorable et l’impression a été meilleure.

Revenons au samedi. José Belmonte est encore loin d’être un rejoneador de la classe de Simeo de Veiga qui plane sur les ruedos. Il se montrera aussi piteux à pied qu’à cheval.

 

Vivente Vega " Gitanillo de Triana"

 

     Vicente Vega "Gitanillo de Triana" capable de bien faire dans les passes de cape, est lamentable à la muleta et à l’épée.

Pedro Ramirez "Torerito" qui a déjà de l’expérience, montre sa bonne volonté et abrège sur la piste détrempée. La course est arrêtée après la mort du quatrième novillo de Lamamié de Clairac.

Le dimanche, Belmonte est remplacé par le novillero Pablo Gonzalez "Parrao".

 

 

     Pour La Gazette, "Parrao" est « celui qui produit la meilleure impression : de jolies pases de capa, variées, surtout serrées, calmes et lentes… Voulez-vous que je vous dise quel a été à mes yeux le héros de ces deux corridas ? C’est un héros inconnu ; aucun spectateur ne sait son nom ; il s’agit d’un modeste banderillero au costume bleu et blanc : samedi, alors que par crainte de glisser, l’on n’osait s’approcher du toro, sous la pluie et dans la boue, aussi bien que dimanche, du commencement à la fin de la corrida, toujours il a été sur la brèche. C’est lui qui calmait la fougue du toro entrant dans l’arène : c’est lui qui a intelligemment secondé les novilleros en difficulté ; Gitanillo peut lui être reconnaissant d’être intervenu à deux reprises pour lui éviter une blessure, et Torerito lui-même a eu besoin de ce banderillero, surtout samedi, quand il était aux prises avec le quatrième toro, puissant et dangereux. Et je n’oublie pas les banderilles "de frente " qu’il a plantées à l’un des toros. Je crois bien que ce jeune percera un jour... »

 

     Le mystère reste entier.

 

     Le bétail était d’Antonio Luis Sanchez, et Gitanillo « … traîne l’estoc devant le dernier, achevant à n’en pas douter d’écœurer les âmes sensibles des "seigneurs de la guerre". » Claude Pelletier.

 

     Quelques mois plus tôt à Madrid, lors de la confirmation d’alternative de Pepe Luis Vazquez, un grand dignitaire nazi, chef de la Gestapo et planificateur de la "solution finale", avait peu apprécié ce spectacle donné en son honneur, dégoûté par notre « barbarie » !! Vous aurez reconnu le doux et  caressant Heinrich Himmler.

     

     Âmes sensibles, s’abstenir !

 

…………………………………………………….

 

     Quels parcours ont suivis nos jeunes toreros ?

 

- Vicente Vega "Gitanillo de Triana" (ne pas l’identifier à Francisco Vega de los Reyes, l’autre sévillan surnommé lui aussi Gitanillo de Triana né en 1903 et mort à Madrid le 14 août 1931 après une épouvantable agonie des suites de ses graves blessures à Las Ventas) est né en 1920 à Séville dans le quartier de Triana. Il fut novillero à partir de 1940. Il se retirera en 1950 et deviendra l’apoderado, entre autres de Paco Camino, Litri et Campuzano.

Toréant peu, il prit l’alternative le 10 août 1952 dans la plaza de Vista Alegre du quartier madrilène de Carabanchel. Les toros étaient de Miura. Il se tue en 1976 sur la route revenant d’un festival. Dans le véhicule se trouvait également Antonio Montesinos, torero dont il était l’apoderado. Cet accident lui fut aussi fatal.

 

Torerito à gauche, le jour de son alternative

 

- Pedro Ramirez "Torerito de Triana" est né lui aussi à Triana le 16 août 1912. Il prit l’alternative à Séville le 16 juin 1938 durant la corrida du Corpus en pleine guerre civile, des mains de "Rafaelillo", témoin Pascual Márquez, toros de Carmen de Federico.

Après la guerre, il renonce à l’alternative, le revoici novillero. Il meurt à Séville en novembre 1985.

 

Parrao

 

- Pablo Gonzalez "Parrao" a vu le jour à La Carolina, province de Jaen, le 14 janvier 1910 ; il décédera à Madrid le 23 avril 1988.

Il prend l’alternative au Mexique, à Ciudad Juárez, le 1er décembre 1946. Il la reprend à Madrid, le 1er juin 1947, le parrain est "El Estudiante", le témoin Pepe Dominguín, la ganaderia est celle d’Antonio Pérez de San Fernando.

Il se retire en 1949, restant dans les affaires taurines et devient apoderado.

 

- Quant à José Belmonte García, il était le plus jeune frère de Juan. Il fut novillero à partir de 1924 et prit l'alternative en 1925 au Puerto de Santa Maria. Il se retire en 1930 et se produit en de rares occasions comme rejoneador. Il deviendra par la suite ganadero et hommes d'affaires dans le milieu taurin.   

… Et le jeune banderillero au costume bleu et blanc, reste une énigme.

 

                                                                                          Gilbert Lamarque

 

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DE L’AÎNÉ AU CADET, LA FRATRIE DE TUDELA

Publié le par Cositas de toros

   

    La semaine dernière, vous aviez fait la connaissance de Julián Marín Arnedo, le torero navarrais de Tudela. Les présentations se prolongent, voici aujourd’hui, une courte biographie de son frère cadet, Isidro.

 

 

     Tout comme Julián, Isidro Marín Arnedo est né à Tudela le 15 mai 1926. Cette belle cité, baignée par l’Ebre, située au sud de la Navarre, à mi-chemin entre l’hallucinante aridité des Bardenas et le vert intense des terres maraîchères de la Ribera, a donc vu grandir les frères Marín à l’ombre du  joyau de la ville, la magnifique cathédrale de Santa Maria des XIIe et XIIIe siècles.

 

 

     Enfants, ils prirent certainement part aux fêtes de Santa Ana, patronne de Tudela, festivités se déroulant entre le 24 et le 30 juillet. Coururent-ils les encierros ? Toujours est-il qu’ils eurent l’occasion, plus tard, de fouler à maintes reprises le ruedo de la plaza " la Chata de Griseras", et d’y triompher. Griseras, c’est ce quartier situé vers la sortie en direction de Saragosse, "la Chata"* et le parc Otoño longent la longue avenida de Zaragoza.

Tudela est aussi le berceau de la famille Martinez Elizondo puis Martinez Flamarique plus connue sous le nom de Chopera**.

Influencé par son frère, les premières escarmouches d’Isidro débutèrent comme "becerriste" en 1943, l’année de ses 17 ans, et en août de la même année, il assista Julián dans l’arène de Tudela à l’occasion d’un festival caritatif aux bénéfices des Servantes de Marie. Un mois plus tard, il était annoncé à Sangüesa pour une novillada !

Au total, il toréa 81 novilladas dont 48 avec picadors, 67 corridas en Espagne, 23 en Amérique du Sud et 54 festivals.

 

 

Isidro (à droite) et Julian Marin

     Il prend l’alternative le 11 juillet 1951 à Pampelune, Julián est le parrain, les témoins sont Rafael Llorente et Diamantino Vizeu. Il coupe les deux oreilles et la queue au toro d’alternative et une oreille de son second, toros d’Amador Santos***. Seul cas en Navarre d’un frère en parrainant un autre et rare aussi en Espagne.

 

Même jour, triomphe

 

     A partir de ce jour et durant deux ans, les triomphes se répètent de plaza en plaza. Il coupe deux oreilles et une queue à Tudela, quatre oreilles et deux queues à Estella, en Navarre bien sûr !

Il défile 16 fois obtenant 53 oreilles, 12 queues et 2 pattes en cette année 1951.

L’année suivante, il triomphe à Barcelone, Pampelune et à Huesca où il alterne avec Luis Miguel Dominguín et Antonio Ordoñez. Mais le 15 août de cette année 1952, il est sérieusement blessé à Xátiva. Il est entre la vie et la mort, les veines saphène et fémorale sectionnées.

Par la suite, Isidro triomphera, mais cette blessure l’a fortement marqué. Il y eut à ce stade, un avant et un après dans sa carrière.

En 1957, témoignant d’une grande solidarité, il entame une longue marche à pied de Pampelune à Valence pour récolter des dons en faveur des victimes des graves inondations dans la région valencienne. En ayant comme compagnon un chien, il fait la route durant plus d’un mois réunissant un demi-million de pesetas remis à l’archevêque de Valence.

 

 

     Il se retire en 1961 pendant les Sanfermines, le 16 juillet (les corridas allaient du 7 au 16 juillet) où il coupe une oreille à un toro de Bohórquez alternant avec Curro Girón et Mondeño.

Il restera plusieurs années doblador**** des encierros de Pampelune.

Isidro a été défini par nombre de critiques de la tauromachie comme un torero fin, artiste, un styliste et matador raffiné. El Cossío dit de lui qu’il était courageux, un bullidor***** avec beaucoup d’art et de volonté – qualités rarement reconnues dans son ensemble par José Maria de Cossío. 

Il combattit dans les années qui étaient celles de Miguel Baez "El Litri" (alternative le 12/10/49), Antonio Ordoñez (06/08/51) et Julio Aparicio (12/10/50) ; ces trois-là connaissaient des saisons formidables. Mais Isidro sortit souvent sur un pied d’égalité, parfois même supérieur.

 

 

     Il travaille par la suite dans un abattoir de volailles de Tudela, fonction moins glorieuse mais moins dommageable.

Il meurt à Pampelune, le 11 décembre 1991.

Autant Julián fut un torero brave et poderoso (puissant), autant Isidro fut plus fin et stylé mais il n’atteignit jamais le niveau de son aîné.

 

 

 

La Chata de Griseras

 

* La Chata. La traduction ici est certainement celle qui a valeur de compliment dans le langage familier, la plaza identifiée comme une personne. La chata ou poule en terme affectueux démontre l’attachement des Tudelanos pour leur plaza. ¡ chata ! Ma poule ! (cette traduction n’engage que l’auteur de ces lignes).

 

** Chopera. La Casa "Chopera" a été fondée par Severino Martínez natif de Salvatierra de Alava à 25 km de Vitoria Gazteiz. On le surnomma "Chopera" car il avait pour habitude de boire la bière dans une chope (du hollandais schopen) a couvercle mobile qu'il inventa pour barrer l'entrée aux mouches et insectes divers, pour plus d'hygiène quand il travaillait à San Sebastián. Il se désaltérait à la Cervecería de Strasburgo où ici comme ailleurs, on avait l'habitude de boucher (tapar) la chope avec une soucoupe et bien sûr, on mettait sur ce tapón des... tapas. Il surgissait du travail et criait dès la porte franchie : "Pon me una chopera !"

A la fin du XIXe, il couvrait plusieurs arènes avec ses cuadras de caballos. Il fait fortune dans le transport de bétail mais aussi dans la collecte des ordures, un précurseur de Loulou Nicollin. Il meurt accidentellement en 1930 dans son camion, livrant une novillada de la ganaderia de Bernaldo de Quiros pour les arènes de Bilbao. Près de Bailen, le pont de Mengibar sur le Guadalquivir s'effondra sous le poids du véhicule.

Les trois fils, Pablo, Antonio et Manuel Martínez Elizondo prennent sa suite dirigée par Pablo né à Tolosa en 1895, époux de Luisa Flamarique Lasa. C'est lui qui créa véritablement l'empire "Chopera" : le transport, l'organisation, l'élevage, les cuadras de caballos, l'apoderamiento...

Le 17 octobre 1968, Pablo meurt à Pamplona. Toute la famille est unie jusqu'en 1974 où les cousins se séparent. Les deux fils de Pablo, Jesús et Manolo, et les deux fils de Manuel, José Antonio et Javier voient les arènes et les représentations se diviser entre les deux clans. Jesús et Manolo, les fils gardèrent le surnom de "Chopera". José Antonio et Javier Martínez Uranga deviennent les "Choperita". L'oncle Antonio, lui, restant célibataire, s'occupera d' élevage. Les "Chopera" se taillent la part du lion sur le marché taurin. Jesús et Manolo se complétaient dans les actions professionnelles et ils se marièrent le même jour à Ronceveaux aux soeurs Labiano !

Jesús meurt en 1998, il eut plusieurs enfants mais aucun ne s'intéressa aux affaires.

 

Manolo "Chopera", le seigneur

Manuel Martínez Flamarique, un seigneur racé et distingué, décède à l'âge de 75 ans dans sa ville natale, San Sebastián, le 2 septembre 2002 à l'âge de 75 ans.

La Casa gérait dans les années 1980, en Espagne : Almería, Almendralejo, Badajoz, Bilbao, Burgos, Calahorra, Hellin, Logroño (propriétaire), Madrid (de 1981 à 1989 avec 52% des actions de la S.A. Madrid Toros), Salamanque, Talavera, Tolède, Tudela, puis Gijón, perdant certaines plazas, en en regagnant d'autres comme Saragosse... En Amérique du Sud, en Colombie, Manizalès et Medellin mais aussi, Cali, Bogota, Quito, Lima... En France, dans la plupart des cas, il s'agit de fournir le plateau, toreros et bétail choisis par les commissions taurines : Bayonne, Eauze, Hagetmau, Mont-de-Marsan, Orthez, Soustons, St-Vincent-de-Tyrosse et une partie de la gestion de Vic-Fezensac. Toutes les affaires françaises sont gérées par Manolo avec ses deux fils, "Choperas" juniors. Ils construisirent Badajoz, Illumbe à San Sebastián ainsi que la nouvelle plaza de Logroño. En Espagne, il est associé avec les neveux "Choperitas".

La famille avait hérité également d'un élevage de toros en Navarre, à Tudela (Herederos de Don Antonio Martínez Elizondo) d'encaste Santa Coloma qui vira par la suite au sang Domecq mais elle conserva du Santa Coloma sous le fer de La Ermita.

Dans l'apodoramiento, il y eut, Ordoñez, Aparicio,  Camino, Antoñete, "El Cordobès", Curro Romero, R. de Paula, Nimeño II, Manzanarès, Juan Mora, Ortega Cano, Pablo Hermoso de Mendoza, Antonio Barrera, Javier Castaño, Fernandez Meca... Les affaires des "Chopera" sont dans les mains de Pablo et Oscar Martínez Labiano rejoints par le fils de celui-ci, Manuel Martínez Azcárate et depuis 2017, la Casa "Chopera" s'est alliée avec le groupe BAL de Mexico, d'Alberto Baillères. Cette association se nomme BMF.  L'empire a quelque peu perdu de sa splendeur depuis la mort de Manolo et du contexte actuel.

Pas de cadeaux entre cousins, "Choperas" et "Choperitas" (Taurodelta) : en janvier 2010, les premiers ont piqué le gestion de Salamanque aux seconds. Ces derniers avaient battu les "Choperas" dans le concours pour Saragosse, juste avant !

 

*** Amador Santos. … José García y Gómez meurt en 1929, Maria del Carmen García Hernán, sa veuve, hérite. Il y eut ensuite en 1931, la vente en partie du lot à Amador Santos Sanchez qui rajoute du sang des Herederos de José Maria Galache par deux "sementals".

En 1954, c’est au nom de Manuel Santos Galache. En 1990, il acquiert un lot de vaches et un semental de Vicente Charro d’origine Atanasio Fernandez, et il est annoncé au nom de sa petite fille, Maria Loreto Santos. En 1991, il a de nouveau acquis 54 vaches et plusieurs sementales d’Atanasio Fernandez et un an plus tard, la ganaderia Sepúlveda. En 2001, tout a été éliminé, remplacé par du bétail de El Pilar, origine Juan Pedro Domecq Diez !

L’élevage de Maria Loreto Charro Santos a quitté la région de Colmenar Viejo pour le Campo Charro.

L’ancienneté du fer date du 09/04/1933.

 

     

Cet élevage était issu du fer historique d’Aleas. Manuel Aleas Lopez fonda son élevage en 1783. A  son fer en forme de 9 est associé la plus grande ancienneté des élevages en activité : 05 mai 1788.

Le fer restera dans la famille 200 ans car ce fer a été racheté en 1983 par José Vazquez Fernandez. Mais depuis plus d’un siècle, c’est du sang Santa Coloma qui est présent grâce à plusieurs apports : Santa Coloma, Graciliano, José Escobar, Buendia…

 

 

**** Doblador. Depuis 1930, les dobladores, ex-matadors, ex-novilleros ou subalternes munis d’une cape et stratégiquement disposés dans le ruedo, ont pour mission d’attirer les toros vers le toril, vite, pour éviter les accidents sans toutefois effectuer des passes avec le capote.

 

***** Bullidor. Torero combattant avec entrain, mobilité, se faisant souvent remarquer par ses desplantes.

 

                                                                                         

Gilbert Lamarque

 

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UN ENCIERRO TRAGIQUE À PAMPLONA

Publié le par Cositas de toros

    

    En octobre 2019, nous vous avions proposé un sujet sur l’encierro de Pampelune. Pour nourrir ce dossier et l’agrémenter un peu plus, voici la traduction d’un texte tiré de Historia trágica del encierro de Pamplona par Luis del Campo, parue dans la revue Toros en date du 19 novembre 1978.

 

    

     « … 1947 : le 10 juillet de cette année fut marqué par un encierro cruel et douloureux qui causa la mort de Casimiro Heredia et de Julián Zabalza. Dès la fin du drame la "vox populi" avait répandu la terrible nouvelle. L’après-midi, dans la plaza, les cuadrillas des peñas portaient un crépon noir et, durant la corrida, entre les combats des toros, un silence impressionnant tombait sur les gradins et les mozos observaient une attitude statique.

 

    

     Les toros étaient encore des Murubes et appartenaient à Antonio de Urquijo, auparavant doña Carmen de Federico. Ils avaient fait l’objet de louanges de la part des nombreux aficionados qui défilaient aux corrales del Gas. Cette corrida marquait aussi la réapparition du pauvre Manolete peu de temps avant le drame de Linares. Le lot de toros, bien présenté, comprenait un très bel animal, magnifique estampe du toro de lidia, qui portait le n° 11 et répondait au nom de "Semillero". Les cloches de Saint-Saturnin venaient à peine de sonner la messe de sept heures que la première bombe éclata pour annoncer l’ouverture du portail et à l’éclatement l’encierro était lancé : précédé des agiles coureurs pamplonais, le groupe toros-cabestros était compact dans la côte de Santo Domingo et arriva ainsi à la mairie avec en queue "Semillero" qui, dès la rue Mercaderes, portait son attention sur les invites du public, fusant tout au long du parcours, se laisser distancer et entrait très en retard dans la rue Estafeta, les autres restant unis jusqu’aux corrales des arènes. Inutile de montrer le péril d’un toro détaché des autres, d’autant que l’encierro change sa psychologie. Alors que groupés, ils suivent souvent comme des bœufs, levant la tête et sautant l’obstacle comme le montón, le toro isolé, solitaire, obéit à son tempérament, à ses instincts et ne suit plus la loi générale de la psychologie des masses ; le danger se fait alors plus précis et souvent la tragédie est à la pointe des cornes.

 

    

     Casimiro Heredia, vaillant et excellent garçon, coureur-né de l’encierro, boucher de profession, travaillait dans la fabrique de glace de la rue Estafeta. Il accommodait alors chaque année sa passion de l’encierro et ses obligations professionnelles en courant les toros depuis le début de sa rue jusqu’au lieu de son travail. Ce 10 juillet il bavardait avec un ménage ami sous un porche de la rue, et quand les toros approchèrent il eut le temps de prononcer ses dernières paroles : « Anita, métete más adentro ; hasta luego » (Anita, place-toi plus à l’intérieur ; à tout à l’heure). Il court alors près des toros, ignorant la présence de "Semillero" à l’arrière. Personne ne saura s’il le vit ou fut surpris. Ce qui est certain c’est que le Murube, qui était tombé en poursuivant un corredor entre Mercaderes et Estafeta, suivait rapidement la rue semblant vouloir rattraper ses frères, lançant au passage des derrotes aux acteurs de l’encierro. Casimiro fut l’un d’eux, mais la fatalité voulut qu’il tombât au milieu de la rue, favorisant au sol la cornada, alors que le mozo ne put faire un suprême effort pour se dégager.

 

Casimiro Heredia et Semillero. 10 juillet 1947

     Le toro le frappa de la corne, l’enleva du centre de la rue jusqu’au trottoir et pour tous les présents, à la vue des taches de sang sur le sol, la blessure ne faisait aucun doute. Alors les vaillants mozos : un, deux… d’autres encore, citent le toro a cuerpo limpio pour l’éloigner : sa bravoure était si grande qu’il allait de l’un à l’autre, ne pouvant refuser les appels. Aussi à un mouvement du blessé à terre, il rechargea celui-ci, l’enleva à nouveau du bord du trottoir pour le jeter sur le mur. Mais la mort avait déjà presque fait son œuvre quand le jeune Heredia reçut un coup de plat de corne à l’épaule. Assisté d’un docteur et d’un religieux, spectateurs de l’encierro, le jeune mozo fut soutenu dans ses derniers moments. Conduit au poste de secours on lui reconnut la funeste blessure causée par la corne : celle-ci avait pénétré dans la région abdominale et en remontant avait labouré le foie et le poumon. Pendant ce temps le fauve, entouré des coureurs, avait suivi la rue Estafeta.

 

 

     A l’entrée de la plaza les mansos l’attendaient avec les conducteurs pour le conduire mais le toro ne suivit pas les bœufs et chargea dès l’entrée de l’arène un meneur qui, son bâton à la main, fuyait et eut la présence d’esprit, au souffle de l’animal, de faire un écart qui le sauva, la corne perçant la chemise et effleurant la peau. Alors la bête, furieuse, bondit sur le coureur suivant qui oblique à droite dès l’entrée, est déviée par son élan, mais rectifie sa course et presse l’homme, l’atteint et le retourne contre les planches. Déjà les capes de "Chico de Olite" et "Niño del Matadero" enlèvent le toro, un corps retombe sur le sable : cent bras se tendent et enlèvent le garçon pendant que les capotes tirent l’animal vers le passage d’accès aux corrales. La bombe claque, l’encierro est terminé, un filet de sang laisse une trace jusqu’à l’infirmerie où le blessé est examiné : « Un énorme grand trou au niveau de la région scapulaire gauche signale l’entrée de la corne qui a fracturé les quatrième, cinquième et sixième côtes, déchiré le poumon gauche, percé le médiastin et perforé le poumon droit. Autre blessure, traduite en simple coup de pointe, sur la face externe de la partie supérieure du muscle droit » (Traduction littérale du texte).

     On tamponne les blessures, pompe l’hémoptysie accompagnée des râles de l’agonie. Le pouls ne réagit pas aux toniques injectés. Les sacrements sont administrés. Tout est terminé en trois ou quatre minutes après l’entrée du blessé à l’infirmerie.

     « Deux morts dans la matinée », tel fut le drame causé par "Semillero", toro de bandera, d’une extrême noblesse, qui permit à Gitanillo de Triana et Manolete d’offrir l’essence même de leur art à la cape et au vaillant torero Marín, qui le tua d’une grande estocade, de réaliser une des meilleures faenas de sa vie. "Semillero", bien que durement châtié par le piquero, lutta bravement sans jamais ouvrir la bouche jusqu’à la mort. »

 

Un encierro en 1932

 NB. Une seule photo (voir légende) correspond à ce jour funeste, les autres sont proposées pour l'illustration.

   

      Depuis cette date de 1947, hélas, l’histoire s’est répétée le 13 juillet 1980. Cette journée a, elle aussi, enregistré également deux décès par un même toro. Il s’agit d’"Antioquio" de Guardiola.

Depuis 1924, date de la première victime documentée de l’histoire, on recense seize morts, le dernier en 2009, le 10 juillet par un toro de Jandilla.

Mais je crois pouvoir vous annoncer qu’à Pampelune, cette année, aucun ne périra sur le pavé !

 

    

     Mais l’histoire est belle pour Marín malgré la tragédie – Luis del Campo est avare de détails à son sujet.

Julián Marín Arnedo est un modeste torero navarrais. Une fois l’encierro terminé, il alla frapper à la porte de la chambre de Manuel Rodríguez "Manolete". « Maestro, laissez-moi tuer votre deuxième toro... » Manolete comprend et accepte. Et lors de cette tarde « plombée », Julián coupe les deux oreilles et la queue de "Semillero" !

Une question d’honneur pour el león navarro ! 

 

 

     Il est mort à 81 ans, le 9 décembre 2000, né à Tudela le 14 octobre 1919. Il prit l’alternative le 7 juillet 1943, premier jour des Sanfermines, Pepe Bienvenida comme parrain et Manolete, témoin, comme il le fut en ce jour si singulier de 1947, toros de Samuel Hermanos*.

Il avait commencé à toréer en 1937 à l’âge de 18 ans. Durant 6 ans, il prit part à 161 novilladas – quand aujourd’hui certains se contentent de deux douzaines au mieux !

Le navarrais, en une seule temporada, toréa 8 fois à Barcelone, et lors d’une autre, 7 fois à Valence.

Julián Marín prit part à onze temporadas, défilant 193 fois comme matador dont 33 en Amérique du Sud et en Afrique du Nord. 

Il fit sa despedida dans sa chère plaza de Pampelune, le 18 juillet 1953.

Il débuta sans chevaux à Madrid, le 8 juillet 1939 en novillada nocturne. Ceci l’amena à y faire sa présentation officielle, le 17 août 1941 en festival piqué combattant des utreros de García Boyero et Enriqueta de la Cova ; complétaient le cartel Alcalareño hijo et El Ferroviario.

 

 

     Deux ans plus tard, il confirme à Madrid le 3 juin 1945. A cette occasion, c’est le mexicain Cañitas qui lui cède les trastos en présence de Morenito de Talavera, les toros sont du fer de Graciliano Pérez Tabernero.

A Pampelune, il "actua" 36 fois, 21 en corridas comme matador, coupant 29 oreilles et 4 queues, 6 comme novillero, coupant 4 oreilles et une queue, et participant à 9 festivals.

A Tudela, dans la cité qui l’a vu naître, il défila en 47 occasions. Durant la guerre civile en 1937 et 1938, il torée 15 festivals. De 1939 à 1943, il intervient à 7 autres reprises et coupe 20 oreilles, 6 queue et une patte. En tant que matador, il y défile 16 fois, 10 corridas pour 22 oreilles, 6 queues et une patte et 6 festivals. 

 

 

     Il alterna à maintes occasions avec Arruza, Manolete, Bienvenida ou Domingo Ortega.

Une fois retiré, jeune, à 34 ans, il participe à 9 festivals. Ole !

Un mozo de la Ribera persévérant et honnête, invité pour les corridas dures.

Domingo Ortega a dit de lui qu'il était l'un des lutteurs les plus complets qu'il ait jamais connu.

Cositas est heureux de remettre un obscur en pleine lumière !

 

Julian (à gauche) et Isidro aux arènes de Vichy en 1951

 

     Julián avait un frère, Isidro, torero comme lui. Ce sera l’occasion de le rencontrer bientôt.

 

     * Samuel Hermanos.

 

Fer de Samuel Hermanos, aujourd'hui celui de Samuel Flores

   

      Les trois frères Melquiades, Leonardo et Samuel, héritiers de Gil Flores, s’unirent en 1914 afin de créer un autre bétail que celui de caste Jijona. Cette nouvelle devise est nommée Samuel Hermanos provenant des achats successifs de Patas Blancas de José Vega et du fer  prestigieux d’Eduardo Olea d’origine Marquis de Villamarta. Melquiades décède en 1931, puis éclate la guerre civile. Les fincas sont situées en zone républicaine, très mauvais en matière taurine. Les Flores sont arrêtés, le troupeau décimé. En 1939, le conflit terminé, il ne reste plus – dit-on – qu’une dizaine de vaches et quelques toros marqués du fer S. Hermanos. Leonardo décédé, Samuel se sacrifiera à la reconstruction de la ganaderia. Dès 1945, la devise retrouve la reconnaissance. Mais, deux ans plus tôt, le 7 juillet 1943, qu’en était-il, sachant que les empresas n’avaient guère le choix par l’appauvrissement des élevages ?

                                                                                  

                                                                                         Gilbert Lamarque

 

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LE CHEVAL DE CORRIDA - 10

Publié le par Cositas de toros

                              TEMPS PESANT ET FUTUR LOINTAIN

 

     Se projeter dans le futur aussi bien proche que lointain est devenu pour la plupart, difficile. Cette maudite anxiété, cette actualité plombante modifient la perception du temps et tout le monde ne dispose pas d’un moral d’acier.

Il devient difficile pour certains de distinguer un mardi d’un jeudi, le temps leur semble étrange. Chez les uns, il s’étire, chez les autres, il passe plus vite.

 

L'ennui

   

     Quand tout va trop vite, le temps permet une pause à beaucoup de gens inquiets, sous pression. C’est une rupture radicale avec le quotidien. Et après la stupeur, c’est la peur pour certains d’être confrontés à l’ennui. Le temps sera long, il se traduit en intervalles vides, flippants pour les uns. Pour les uns et les autres, le temps est horriblement lent, et alors que faire ?

 

L'ennui définitif

 

     Aujourd’hui, on ne le remplira pas, on l’organisera avec des rendez-vous avec… soi-même. Et plutôt que boire son café d’après déjeuner au lance-pierre, dégustons-le en une demi heure. Mais c’est vrai, il sera froid. Et alors ? Cela vous fera peut-être réagir et passer à une source potentielle d’activité.

Essayons, et si nous n’y arrivons pas, remettons tout cela à demain.

Nous avons le temps ! 

 

 

 

     Pour ne pas rester face à vous même, moment désagréable, lisez donc Un roi sans divertissement de Jean Giono - le livre de Pierre Sansot sur la lenteur, exposé dans ces colonnes il y a peu, a trouvé quelques échos chez certains d'entre vous.

Cela fera 50 ans cette année que Giono est mort. En hommage à l'écrivain et à son oeuvre, procurez-vous ce roman "labyrinthique" !

Hiver 1843. Dans un petit village du Trièves que la neige a coupé du monde, une jeune femme disparaît. On a beau fouiller les environs dès le dégel, son corps reste introuvable. L'année suivante, alors qu'un épais manteau blanc recouvre à nouveau le village, un deuxième habitant est "rayé de la surface du globe", bientôt suivi par deux autres. Qui fait disparaître ces villageois et pourquoi ? C'est ce que se demande le capitaine de gendarmerie Langlois, appelé en renfort...

Jean Giono a qualifié de "plus grande malédiction de l'univers" l'ennui, face à face impitoyable avec soi-même. Une grande lumière tempère cependant la noirceur de ce texte : ce sont les liens d'amitié, d'empathie qui unissent les personnages. Humanité consolatrice que celle de ces "amateurs d'âmes" qui ne sont pas nés de la dernière pluie, savent aimer, compatir et aussi lire, comme le lecteur, entre les lignes.

 

 

L'Obs, page 45, illustration de Pep Montserrat

     Oui, le Covid-19 occupe le centre du ruedo. Le toro battu, oui, blessé (hélas), à mort, non, espérons-le.

    

L’Obs/N°2893-16/04/2020, page 47 :

Alors que son pays est l’un des plus touchés par le Covid-19, le grand écrivain Javier Marías, confiné en Espagne, répond à "L’Obs".

     « … Nos politiciens, qu’importe leur parti, sont médiocres et irresponsables, mais, sur ce point, j’ai bien peur que les citoyens de n’importe quel pays ne puissent dire la même chose de leur dirigeant, à de rares exceptions près. Si nous regardons Trump, Boris Johnson, Erdogan, Orbán, Duterte, Kaczynski, Maduro, Daniel Ortega au Nicaragua… Il y a de quoi se mettre à trembler. Et le pire c’est qu’à peu près tous ont été nommés ou élus, y compris Poutine, Dieu du Ciel ! Y compris Bolsonaro, re-Dieu du Ciel ! Je me dis parfois que de nos jours trop de gens sont devenus idiots. Ça oui, c’est une pandémie sans espoir de guérison... »

 

 

     Le "dossier" sur le cheval de corrida est arrivé à son terme, aussi en ai-je fini de mes élucubrations que je vous inflige depuis le 28 mars. Si cela en a agacé quelques uns parmi vous, ce dont le plumitif frustré que je suis ne doute pas, c’est fâcheux.

Merci de votre fidélité et souhaitons la bienvenue aux nouveaux abonnés. La famille s’agrandit… par ces régimes de confinement, est-ce raisonnable ?

 

Portez vous bien, chères et chers cloîtré(e)s.

 

Post tenebras lux

                           Après les ténèbres, la lumière.

 

 

"En mai fait ce qu'il te plaît"... tu parles !

      

     

 

 

 

               

                             LE CHEVAL DE CORRIDA

 

10e partie : le pruneau sur la tourtière.

 

    

    Pour être plus exhaustif, terminons par un livre que je vous invite à engloutir vivement pour enfin, boucler la boucle. D’un cheval l’autre est le premier récit de Bartabas, l’écuyer d’exception, metteur en scène, créateur de l’Académie du spectacle équestre de Versailles. Il retrace ici, son autoportrait à travers l’histoire des chevaux qui ont marqué sa vie. À 62 ans, le fondateur du Théâtre Zingaro raconte tous les chevaux qui l’ont accompagné. C’est un autoportrait mais indirect, un miroir où se réverbèrent les dizaines de chevaux qui ont été les siens depuis l’âge de 17 ans. Son premier s’appelait Hidalgo, puis suivirent Zingaro, Chapparo, Micha Figa, Quixote, Lautrec, Horizonte, Vinaigre, Van Gogh, Le Caravage… jusqu’à Tsar. Il nous raconte avec énergie mais aussi mélancolie, les passions qui ont rythmé sa vie. Il prépare sa dernière apparition sur scène. « Je ne vais pas continuer pour continuer, comme les vieux chanteurs. Place aux jeunes. »

 

Clément Marty, alias Bartabas

     Dans ce livre passionnant et émouvant, Bartabas fait de nombreuses références au monde taurin et à la tauromachie, use de termes taurins, du vocabulaire, cite Rafael de Paula, Christophe Yonnet décédé en juin 1996 qui, en pleine déroute lui avait cédé Dolaci « avant de s’évader de la vie. », traverse la planète, des arènes de Nîmes et Madrid, à Tokyo et New York.

Bartabas était signataire de la tribune pro corrida publiée le 17 octobre 2019, opposée à l’interdiction de la corrida aux mineurs.

Il offre à ses compagnons de route leur plus beau tour de piste. L’homme qui murmure à l’oreille des chevaux rend hommage aux destriers de sa vie.

Dans ce qu’il nomme « la caravane de mes nuits », il énumère chaque cheval qui a partagé son existence. Et dans cette liste incroyable, nous trouvons Antoñete, Arruza, Belmonte, Bombita, Cagancho, Chamaco, Chicuelo, Conchita Cintrón, Dominguín, El Cordobès, El Gallo, El Soro, El Viti, Espartaco, Frascuelo, Joselito, Manolete, Manzanares, Nimeño, Paquirri !

« Cheval taureau face au belluaire, dominant dominé, de ma frustration de n’avoir pu être matador, je me suis fait matamore, et le minotaure mangeur d’hommes n’était peut-être qu’un gamin farceur aux sabots ailés. »

Bartabas, « ce Bonaparte des arts éphémères, est surtout un autodidacte qui marche à l’instinct. » (Grégoire Leménager, L’Obs du 06/02/2020).

arts éphémères, tout comme l’art tauromachique.

 

« Les chevaux sont les maîtres à qui je soumets mon destin. » Bartabas.

 

                                                                 

FIN

                                                                              

Gilbert Lamarque

 

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LE CHEVAL DE CORRIDA - 9

Publié le par Cositas de toros

                                                          SOLITUDE

 

« Malheur à l’homme seul ! Car, lorsqu’il sera tombé, il n’aura personne pour le relever. » La Bible.

 

     « Je l’ai trouvée devant ma porte

     Un soir, que je rentrais chez moi

     Partout, elle me fait escorte

     Elle est revenue, elle est là

     …

     La solitude, la solitude. » Barbara, La Solitude, 1965.

 

 

     Lieu désert, vie isolée, état d’abandon-absence-manque, solitude venant du latin solitudo.

 

À en croire son étymologie, la solitude n’aurait rien de réjouissant. Autrefois, elle était recherchée, on y voyait le moyen d’approfondir sa connaissance de soi et de cultiver son jardin intérieur, notion chère à Voltaire « Il faut cultiver son jardin. », Candide ou l’optimiste. C’est sa conception, il faut commencer à rechercher son propre bonheur, ou plutôt sa propre philosophie et grandir intérieurement, vaste programme. Pirouette de la part de Voltaire, un pied de nez à l’idéalisme ?

La solitude est toujours bafouée, par le bruit, la promiscuité.

Mais le plus terrible, c’est l’isolement. L’isolement, c’est une séquestration, une petite mort. L’isolement n’est pas souvent volontaire, il est vécu comme une déshumanisation.

Confinés, isolés pour les uns, pas forcément pour les autres, mais il est difficile d’échapper à soi-même.

Combien au bout de cette pandémie ayant appris à se connaître, vont se détester ? Et s’ils ont appris à se connaître, ne serait-ce qu’un peu, ils auront franchi une étape.

Pour sortir de notre boîte pour les moins altérés, pour s’évader de leur bagne, de leur cachot pour les plus meurtris, il nous reste encore, par exemple, à lire Les Contemplations ! Hugo nous en sera reconnaissant.

 

 

     Il n’a pas écrit ces 158 poèmes en vain. Se plongeant dans les prédictions de l’apothicaire Nostradamus, il y avait relevé l’année 2020 et son grand fléau, le Covid-19 !

 

 

     Pour nous être agréable, il nous a donc offert ce recueil en partie autobiographique, recueil de l’amour, de la joie mais aussi de la mort, du deuil ; vous choisirez selon votre humeur, votre amertume du jour, de la météo ou de vos émotions, c’est selon.

 

Prenez « Melancholia », poème paru en 1856.

     « Où vont tous ces enfants dont pas un seul ne rit ?

     Ces doux êtres pensifs que la fièvre maigrit ?

     Ces filles de huit ans qu’on voit cheminer seules ?

     Ils s’en vont travailler quinze heures sous les meules ;

     Ils vont, de l’aube au soir… »

Arrêtons ici, ne donnons pas de mauvaises idées à nos gouvernants et au MEDEF !

 

     Évadons nous aujourd’hui plus qu’hier et beaucoup moins que demain.

 

 

                LE CHEVAL DE CORRIDA

 

9e partie : le cheval de corrida dans l’art. Chapitre III. Picasso. Conclusion.

 

    

     Pablo Picasso a su représenter dans l’art tauromachique, le couple de l’homme à la lance et de la maigre rosse. À ce titre, l’affiche exposant les coupelles tauromachiques conservées au musée de Céret est parfaitement éclairante : seules six des vingt-huit céramiques de la collection ne se réfèrent pas au thème de l’intervention du cheval dépourvu de caparaçon.

 

La série date pourtant de 1953, et l’on sait que le gouvernement de Primo de Rivera avait imposé le peto en 1928. En fait, les artistes semblent jeter un voile sur l’armure protectrice qu’ils tiennent peut-être pour une insulte à la fiesta. C’est le cas de Picasso, de Braque et bien d’autres. L’exception vient de Botero, mais il faut admettre que le peintre colombien trouve en la circonstance, l’occasion rêvée d’ajouter un peu plus d’embonpoint à son habituel système stylistique.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Fernando Botero

 

     Picasso consacra de nombreux tableaux, huiles sur toile, sur bois, mines de plomb, plume et encre noire au cheval : Picador et cheval mort, 1899 ; Scène de corrida, les victimes de la fiesta, 1901, dominée au premier plan par les dépouilles de deux chevaux de piques, l’un blanc, la tête levée vers le ciel, qui figurera dans le répertoire picassien jusqu’à Guernica (ces deux tableaux non représentés ici) ; puis les mines de plomb de 1921, Taureau et cheval blessé  ainsi que Cheval blessé, 1923. 

 

Taureau et cheval blessé, 1921. Musée national Picasso, Paris

 

Cheval blessé, 1923

 

     Enfin, Guernica, 1937 avec la présence d’un taureau de combat et d’un cheval de pique gisant. L’Américain J. Seckler croit que d’après le témoignage de Picasso, le taureau représente la force brutale et le cheval, le peuple. Ici, le cheval ne meurt pas de la corne mais d’un coup de lance.

 

   

     Tout a été dit sur Guernica, le plus grand exemple de l’art issu de la Guerre d’Espagne, et cette œuvre comporte parmi ses personnages ceux de la fiesta a los toros, personnages principaux martelant ainsi les paroles d’Hemingway : « La fête des taureaux est une tragédie. » Œuvre immense aussi par ses dimensions : 350×780.

 

Etude pour Guernica

 

     

       

       Conclusion.

 

     On ne rencontre pas, non plus, d’œuvres consacrées au cheval de corrida chez Vázquez Díaz, Barceló, Picabia, Buffet, Raoul Dufy, Bacon, Joaquín Sorolla. Cette énumération n’est pas exhaustive. Les œuvres présentées tout au long de ce dossier ne sont qu’une infime partie de la somme existante et les choix sont faits dans la mesure de la facilité de les reproduire.

L’œuvre de Goya et de Picasso continue d’attirer les artistes de tout horizon, de toute condition, disposés à fixer l’art éphémère du monde des taureaux, laissant une place modeste au cheval.

Sachez que le cheval est, dans l’art, l’animal le plus représenté et ce, depuis la Préhistoire.

 

 

… à suivre

                                                                                   Gilbert Lamarque

 

 

 

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