DEMAIN, JE SERAI LIBRE
C'est jeudi 24 mai aux environs de 19 h que s'est déroulé au Pôle Culturel du Marsan à Saint-Pierre-du-Mont, le lancement du livre "évènement" écrit par Nestor Garcia, l'apoderado d' Ivan Fandiño.
L'amphithéâtre était copieusement garni par un public débordant largement les frontières landaises.
Invités, Guillaume François, Olivier Baratchart, le peintre colombien Diego Ramos, créateur de l'affiche de la San Isidro 2018, Antoine Capdeville, Elisabeth Gil, infirmière dans l'équipe médicale des arènes de Lachepaillet et Céline Galdeano, fandiñista de Saint-Gilles (Gard).
Tout d'abord, la parole fut donnée à Nestor Garcia, interviewé avec pertinence et sobriété par Julien Lescarret, propos traduits par Miguel Darrieumerlou. L'auteur-apoderado résuma la quinzaine d'années passée au côté d'Ivan. Il conta les diverses difficultés et les obstacles qu'ils combattirent pour se hisser au rang qui fut celui du torero d'Orduña.
Bien naturellement, le solo madrilène du 29 mars 2015 fut évoqué ainsi que ses prestations dans le Sud-Ouest et plus particulièrement à Mont-de-Marsan, le Plumaçon son arène "talisman".
En deuxième partie, chaque invité nous conta son vécu, ses souvenirs auprès d' I. Fandiño.
Le montois Guillaume François ouvrit la maleta aux souvenirs et fit part de la relation privilégiée du maestro avec Mont-de-Marsan où il triompha régulièrement.
Olivier Baratchart évoqua le basque, torero et pelotari que fut Ivan.
Antoine Capdeville, l'ayuda en activité le jour du drame, nous fit partager cette relation forte et professionnelle qui existait entre lui, le torero basque et son apoderado.
Diego Ramos nous dit quelques mots sur son amitié et aussi, comment en est-il arrivé à réaliser l'affiche de Madrid.
Elisabeth Gil, avec émotion, nous raconta cette amitié qui n'acquit alors qu'elle lui prodigua les soins durant son hospitalisation après sa sérieuse cogida dans les arènes de Lachepaillet, le 10 août 2014. Amitié et confiance qui perdurèrent par la suite.
Enfin, la Saint-Gilloise Céline Galdeano décrivit Ivan comme un homme débordant d'empathie, accordant sa confiance et son amitié avec naturel et simplicité.
Sur scène, pour conclure, montèrent les deux jeunes aficionados qui reçurent en cette triste après-midi aturine, le dernier trophée d'Ivan. Ils échangèrent un émouvant abrazo avec Nestor Garcia.
Tout au long de la soirée, l'émotion fut palpable, planant sans débordement.
Cet ouvrage, "Demain, je serai libre" de 350 pages, écrit dans l'urgence par l'ami fidèle et apoderado est la somme de l' histoire de deux personnages humbles partis défier le système implacable de la Fiesta. C'est le destin, la trajectoire d'un torero loyal qui crut en son étoile. Cette étoile qui s'éteignit, il y a maintenant un an, le 17 juin 2017, le torero passant de la vie à la légende.
C'est un livre où l'auteur ne prétend en aucune manière "au meilleur des genres littéraires".
Vous consulterez, en fin de volume, 50 pages de statistiques et de données sur toute la carrière du torero. C'est véritablement un livre document illustré par de nombreuses photos en noir et blanc.
Aux Editions Atlantica. 22 Euros.
Bonne lecture. Lire avec quelques tapas, l'extrait qui suit l'affiche ci-dessous.
Gilbert LAMARQUE
Extrait, pages 98 et 99.
"... Cette corrida de Pampelune lui insuffla une force intérieure dont il avait grand besoin pour poursuivre son ascension vers le sommet de cette importante campagne. Après Pampelune, il coupa quatre oreilles à Manzanares et fit ses débuts dans les arènes les plus importantes de sa carrière : Mont-de-Marsan.
Mont-de-Marsan est une belle ville du sud-ouest de la France, capitale des Landes, de grande tradition taurine. Pour Ivan, elles tiennent de l'icône, de la référence et du talisman. Et pourtant, cette histoire d'amour commença mal. Le matin, j'avais eu une grosse altercation avec Guillaume François, président de la Commission taurine. Il souhaitait mettre dans le lot de la corrida un toro "hors du type" qu'on avait embarqué en tant que réserve. Ce qui me heurta davantage, c'est qu'il nous manqua de respect en invoquant des principes "toristes". Comme toujours, j'étais tout seul contre le reste du monde. Je lui ai répliqué que nommer de la sorte la corrida de FuenteYmbro était un manque de respect vis-à-vis des toreros. Je lui ai conseillé aussi de jeter un coup d'œil dans le corral d'à côté, où se trouvait le lot, ridicule comparé au nôtre, que devait tuer El Juli et Talavante. Finalement, ma logique fut respectée et le fameux toro n'entra pas dans le lot. Guillaume, un homme moderne, véhément, et peut-être un peu élitiste, a toujours respecté Ivan dans ses arènes. Nous n'avons pas été de grands amis mais nous avons gardé de bonnes relations.
L'après-midi, les choses se sont compliquées un peu. Nous nous étions perdus pour arriver aux arènes. Nous ne connaissions pas l'itinéraire et le chauffeur se laissa guider par le banderillero David Diaz "Llaverito". Il avait toréé ici l'année précédente. Après avoir tourné et tourné dans la ville et à cinq minutes du commencement, un édifice énorme coupait l'accès aux arènes. Nous avons tous regardé David en attendant une explication :
- Je vous jure, l'année dernière cet édifice n'était pas là, nous dit-il.
Cela nous fit rire, la construction devait avoir plus de 20 ans... en sorte que nous sommes arrivés juste à temps pour accrocher le capote de paseo. A la mort du quatrième toro, Matias Tejela avait coupé une oreille au premier et gracié le célèbre "Jazmin" ; David Mora toucha un toro de réserve qui fit le tour de piste après lui avoir coupé également une oreille. Le premier toro d'Ivan était sorti mauvais. Pour comble de malheur quand le cinquième sortit à son tour, il avait un problème de vue. Nous nous sommes regardés tous les deux pendant le tercio des banderilles, conscients de notre sort. Essayant de briser la glace et pour lui remonter le moral je lui dis :
- Ivan, aujourd'hui, il faut faire une "fandiñade".
- Tranquille, aporedaro, me répondit-il.
Il coupa deux oreilles et fut désigné comme le grand triomphateur de la feria. Meilleure estocade et meilleure faena, voilà une "fandiñade" en bonne et due forme. Et cette faena lui ouvrit tout en grand et pour toujours les portes de Mont-de-Marsan... "