L’actualité madrilène et le renouvellement du Bombo pour la San Isidro méritent bien ces quelques lignes.
Le Bombo, comme chacun sait, est le fruit de la réflexion de l’empresa et producteur Simon Casas (cocorico) aux commandes de la plus grande arène du monde : La Monumental. Il s’agit en fait de mettre les noms de toreros dans un chapeau, mettre le nom de ganaderias dans un autre et « savamment » orchestrer le tirage au sort. La légitimité de ce tirage au sort est bien entendu conditionnée par les noms qui sont dans les chapeaux et notamment celui des ganaderias. Cette façon originale de monter les cartels avait vu le jour pour la feria d’automne madrilène 2018, elle est donc reconduite pour la San Isidro 2019.
L’avantage de cette méthode est qu’elle apporte plus de diversité et d’originalité dans les carteles mais aussi beaucoup plus d’intérêt pour les aficionados, le risque étant bien sûr que les vedettes de l’escalafón ne le boudent.
Or, par un communiqué du 11 février 2019, la gran figuradel toreo qu’est Sébastien Castella (re-cocorico) a, par communiqué de presse, annoncé sa participation au Bombo Isidril Le défi est lancé et, comme l’on pouvait s’y attendre les choses n’ont pas trainé. Très vite, d’autres figuras ont suivi. A ce jour, le Bombo est complet et le tirage au sort effectué, le résultat est consultable sur tout site taurin. Certains sont donc prêts à faire LE GESTE et c’est tout à leur honneur, car Madrid est Madrid et la présentation des taureaux sera n’en doutons pas dans la lignée madrilène.
Il est un fait que ces figuras n’ont plus rien à prouver (ils ne sont pas tous nés avec une cuillère d’argent dans la bouche, ne sont pas tous fils de… ou ne sont pas tous des Mozart de la tauromachie), et que dans ce cadre, ils ont plus de coups à prendre que de lauriers à récolter. Combien de personnes ayant commencé en bas de l’échelle et terminant leur carrière dans le fauteuil du PDG seraient prêtes à remettre leur bleu de chauffe et retourner, pour quelques jours, au rang de balayeur ?
Ces figuras sont souvent décriées (y compris par votre serviteur) dans des comptes rendus de prestations données il est vrai trop souvent avec des oppositions « choisies », par eux, leur permettant de maintenir leur train de sénateur, prenant en passant la monnaie adéquate. Faut-il leur en vouloir ? Tant qu’il y aura des organisateurs pour les inclure dans ces conditions et des aficionados prêts à payer pour aller les voir ils n’ont pas de raisons objectives pour cesser. Cependant, dans ce cas précis, ils ont accepté de remettre leur bleu de travail et pour le moins, cette décision mérite tout notre respect.
Ils ont bien entendu toute l’expérience, le professionnalisme, la connaissance du taureau et des terrains pour mener à bien ce défi qu’ils se sont lancé. Il n’empêche que le risque est toujours présent et que l’effort se doit d’être salué.
Ces figuras souvent décriées, ont gardé au plus profond de leur être le gusanillo et le pundonor qui font d’eux… des figuras.
C’est parti ! Ouverture de la temporada française sous un soleil gaillard.
Les arènes couvertes,… hélas.
En matinée, en guise d’amuse-gueules, le miraculé Thomas Joubert (Bayonne, septembre 2018) avait la charge d’une tienta de 3 vaches d’Alma Serena, accompagné par les élèves de l’École Adour Aficion.
Près de 400 personnes présentes pour voir ces jeunes pousses que sont Guillaume, Adrien, Tristan, Andoni et Jean le plus aguerri, défier et surtout se mesurer à ce bétail brave ne rechignant pas à aller plein gaz à la pique de Laurent Langlois. Certes, ces vaches montrèrent quelques faiblesses mais n’oublions pas que nous ne sommes pas encore sortis de l’hiver.
Bravoure, noblesse, faiblesse, ce cocktail permit toutefois à Thomas de lidier profitablement ainsi qu’aux élèves, heureux de l’aubaine.
Après-midi, 16h30. Devant un public abondant – tous n’avaient pas pris la route des plages – l’arène frisant le lleno, 6 Alma Serena bien présentés, costauds (trop?), aux comportements variés, nous firent comprendre que ce n’est juste que la reprise de la saison. Les automatismes sont à retrouver, les hésitations se multiplièrent, le rectangle de Magescq fit que tout ne tourna pas rond lors de ce premier atelier d’une longue temporada.
Pas de temps mort,
Solalito
reçoit le premier au capote. Cet eral a du gaz, le jeune maestro banderille a mas, mais trop de coups de cape sont donnés par les péones. Brindis à sa peña Los del Sol et à son jeune président. Solal Calmet alterne les beaux gestes bien léchés et des passes plus heurtées. Le cornu plus âpre de la corne gauche, rugueux, finira par lorgner les bordures. Entière contraire et tombe le premier pavillon millésime 2019.
Yon Lamothe
brinde au public un colorado brocho aux coups de tête désordonnés. Après un bon tercio de bâtonnets, le bicho noble reste sur la défensive demandant de nombreuses sollicitations. Yon ne s’accorde pas vraiment et transmet peu. Oreille après une rapière tombée et de côté.
Guillermo García
a lui aussi beaucoup à apprendre mais il possède une belle plastique et égrène de beaux gestes. L’Alma Serena est plus lourd, freiné par sa faiblesse. Il est difficile de maintenir cet opposant au centre. Le Madrilène nous livre une belle série de naturelles avant d’être victime d’une voltereta sans conséquences. La faena est trop longue. Échec à la mort, un avis, salut.
Le quatrième de la coursette fut selon moi, le dernier de la classe. Solal banderille de nouveau avec plus ou moins de bonheur. Le bicho se dégonfle vite regardant vers les burladeros à défaut de callejon. Guère de transmission malgré les efforts du torero. Nouvelle entière contraire, salut.
Du mieux avec le cinquième noble qui montre de l’entrain, démarrant avant le toque. Beaucoup, beaucoup trop de passes, mais quelques bons muletazos avant que l’Alma Serena n’abdique, se réfugiant dans les bordures. Yon rencontre des difficultés pour placer le cornu avant une entière au 2e essai. Vuelta qui ne s’impose pas, certes la dernière avant Mugron où le Tarusate passera dans la division supérieure.
Guillermo García hérite en conclusion d’un autre eral plein d’aspérités qui plonge goulument dans le tissu, se retournant vivement. Le jeune espagnol manque d’autorité montrant malgré tout son courage et sa volonté. Il termine par deux bons muletazos. Échec aux aciers, deux avis, silence.
Bref, je n’ai pas retrouvé lors de cette tarde, les qualités démontrées auparavant par les origines des pupilles des Bats Brothers.
Soulignons un train d'arrastre sortant vraiment de l'ordinaire, atypique.
Le prix "Bernard Ménard" du C.T. de Magescq au meilleur novillero est attribué à Solalito.
Le prix de l’ACOSO ( organisateurs du Sud-Ouest) est partagé entre Solalito et Yon Lamothe.
Imagevivante du dieu égyptien Ptah vénéré à Memphis, le taureau fût plus tard associé à Osiris. Figuré dans la division zodiacale où se trouve l’équinoxe du printemps, ce signe est le symbole du soleil qui, à cette époque de l’année, féconde la nature. Aussi attribuait-on la fécondité au taureau Apis et le pouvoir d’en communiquer la faculté aux femmes. Quand un taureau Apis mourait, les prêtres lui cherchaient un successeur. Il devait être né d’une vache fécondée par un rayon du soleil, ce que déterminaient certaines taches noire dans le pelage qui se devait par ailleurs d’être blanc. Une magnifique étable, tournée du côté du soleil levant, était alors construite au lieu même où l’on avait trouvé le nouveau dieu. Là, pendant quatre mois, il était abreuvé de lait. Une procession de prêtres le conduisait ensuite au bord du Nil et l’embarquait sur un vaisseau richement décoré pour l’amener à Nicopolis. Pendant quarante jours, les femmes venaient adorer le nouveau dieu. Il partait ensuite pour Memphis où un temple magnifique lui servait d’étable.
Le taureau est présent à des degrés divers dans nombre de religions, les cultes d’Apis et de Mithra notamment. Divinité d’origine perse, Mithra est le dieu Sauveur, le Vainqueur invincible que les armées romaines ont célébré dans l’empire jusqu’à l’avènement du christianisme. Mithra est né d’un rocher, après le solstice d’hiver, un 25 décembre, quand le soleil renaît et que les jours recommencent à grandir. C’est sur l’ordre du Soleil que Mithra égorge le taureau impérieux après l’avoir dompté. De son sang versé et de sa moelle naîtront végétaux et animaux. Ce culte marque l’alternance cyclique de la mort et de la résurrection ainsi que l’unité permanente du principe de vie. Le christianisme pour s’imposer devra lutter contre ces cultes païens et éliminera progressivement le taureau du bestiaire médiéval pour lui préférer le bœuf docile de la crèche.
Yahvé parla à Moïse et dit : "Si quelqu’un pèche par inadvertance contre l’un des commandements de Yahvé et commet une de ces actions défendues, si c’est le prêtre consacré par l’onction qui pèche et rend ainsi le peuple coupable, il offrira à Yahvé pour le péché qu’il a commis un taureau, pièce de gros bétail sans défaut, à titre de sacrifice pour le péché. Il amènera ce taureau devant Yahvé à l’entrée de la Tente du Rendez-vous, lui posera la main sur la tête et l’immolera devant Yahvé.
Puis le prêtre consacré par l’onction, prendra un peu de sang de ce taureau et le portera dans la Tente du Rendez-vous. Il trempera son doigt dans le sang et en fera sept aspersions devant le rideau du sanctuaire. Le prêtre déposera un peu de sang sur les cornes de l’autel des parfums qui fument devant Yahvé, et il versera tout le sang du Taureau à la base de l’autel des holocaustes qui se trouve à l’entrée de la Tente du Rendez-vous[…] " Lévitique. Chap 1 et 4.
Le prophète Ezéchiel eut la vision : quatre êtres qui paraissaient avoir une forme humaine. Chacun avait quatre visages, chacun avait quatre ailes. Droites étaient leurs jambes dont les sabots semblables à des sabots de taureau, étincelaient comme du bronze poli. Ils avaient tous quatre un visage humain par devant, tous quatre une face de lion à droite, tous quatre une face de taureau à gauche, et tous quatre une face d’aigle. A terre, à côté de chacun des quatre êtres, une roue et dominant la scène l’image du Seigneur.
L’attribution de quatre symboles différents aux quatre évangélistes a sa source dans la vision d’Ezéchiel (paragraphe précédent) et dans la vision de l’Apocalypse. L’aigle est associé à Jean, l’homme à Matthieu, le lion à Marc et le jeune taureau préfigure Luc.
Au XIIe siècle, les clercs et les lettrés enseignèrent aux infidèles les significations qu’ils attribuaient aux trois animaux : de Jésus on disait qu’il fut homme en naissant, veau (jeune taureau) en mourant, aigle en montant au ciel. De même chaque chrétien se devait d’être à la fois homme, veau, lion et aigle : homme parce qu’il est doué de raison, veau parce qu’il faut pouvoir se sacrifier pour Dieu, lion parce que le juste doit éprouver le courage de ne rien redouter, aigle pour contempler les choses célestes et éternelles…
Le bœuf (veau) est l’un des trois animaux évangélistes qui accompagnent Luc, Marc et Jean. Les enlumineurs du Moyen Âge aimaient peindre Luc, leur saint patron et le représentaient avec son animal évangélique. Le bœuf de saint Luc n’a pas toujours été un bœuf. Les irlandais du haut Moyen Âge lui préféraient un veau, symbole d’innocence, et les Carolingiens, un taureau, symbole de puissance, mais au poil blanc, symbole de pureté. Au temps des carolingiens, le bœuf est l’émanation même de Dieu qui souffle à saint Luc la parole divine.
Il apparaît souvent ailé et nimbé comme ci-dessus.
Peu à peu le bœuf se transforme en compagnon du saint lui tenant son livre, lui servant de lutrin et même parfois de repose pied comme sur cette statuette de bois.
Deuxième signe du Zodiaque, le Taureau (21 avril-20 mai) se situe entre l’équinoxe du printemps et le solstice d’été. Symbole d’une grande puissance de travail, il figure aussi tous les instincts, principalement celui de la conversation, de la sensualité et d’une propension exagérée pour les plaisirs. Ce signe est en effet gouverné par Vénus, selon le langage astrologique. C'est-à-dire que la constellation du Taureau se trouve en parfait harmonie avec cette bachique à la gloire de Vénus. C’est un chant de plénitude lunaire dans l’exaltation de la mère-nature.
Dans le bestiaire de la mort, le bœuf joue un rôle important : il sert de monture au XVe siècle, à l’allégorie de la mort. Depuis le XIIe siècle et jusqu’alors, elle était montée sur un cheval et, armée d’un arc et d’une flèche, pourchassait les vivants. Elle allait au galop et ne se presse plus, adoptant le pas lourd et sage d’un animal de labours, qui symbolise bien la fatalité d’un évènement inéluctable. Le symbole s’appuie sur des éléments de réalités. Novembre est à la fois le mois des morts et celui où le boucher médiéval tuait le bœuf. Pour des raisons d’hygiène, en milieu urbain, on pratiquait la vente et le sacrifice des bœufs dans les cimetières à l’écart des villes.
Bien avant la naissance du Christ, Isaïe pouvait écrire : "Le bœuf reconnaît son bouvier et l’âne la crèche de son maître, Israel ne connaît rien, mon peuple ne comprend rien." Rien d’étonnant à ce que le bœuf et l’âne se soient penchés sur la couche de l’enfant Jésus. Pas un mot pourtant à ce sujet dans les évangiles sauf dans les évangiles apocryphes. Cette légende de la crèche envahit toutefois l’iconographie médiévale.
…
Nous, vulgaires et méprisables, nous avons transformé la crèche en arène, l’âne en cheval et le bœuf en taureau furieux. Et ce, pour le plus grand ravissement des uns et le plus grand courroux des autres.
Que les foudres de l’Éternel ne s’abattent point sur nos humbles esprits !
La lecture de l’ouvrage de Michel Pastoureau : Le Loup – une histoire culturellle. Éd. Du Seuil, particulièrement jouissive, m’a donné l’idée de divaguer dans les manuscrits et enluminures. Au chapitre 5 intitulé : Ysengrin : un loup pour rire ?, l’auteur nous conduit au cœur du Roman de Renart, souvenez-vous des aventures d’un goupil rusé et querelleur nommé Renart ! les plus anciens écrits sont datés de 1174-1205 formant un noyau cohérent ; les autres plus disparates, ont été composés dans la première partie du XIIIe siècle. C’est donc un "roman" à plusieurs mains dans lequel nous voyons s’affronter Renart et le loup Ysengrin, les deux héros principaux : Renart représentant le petit peuple (un "gilet-jaune" moyenâgeux), Ysengrin, la bourgeoisie lourde et patentée.
Mais pourquoi aborder le roman de Renart ? Révisons nos classiques… Cette œuvre n’est pas un roman, mais un recueil en langue romane, donc en français. C'est un ensemble de récits animaliers, véritable satire avant la lettre. Il existe dans cette longue liste de "personnages" avec Renart, le renard alias Goupil, Ysengrin, le loup éternel ennemi, Noble le lion, Tibert le chat, Baudoin l’âne, Chanteclerc le coq, Blanche l’hermine… un taureau nommé Bruyant. Celui-ci agrémente discrètement les pages de cet ensemble tout comme le taureau dans le bestiaire médiéval où il est beaucoup plus présent.
J’ai donc extrait le document ci-dessus d’un manuscrit provenant de la Bibliothèque nationale de France. Cette enluminure, en haut à gauche, met en scène le roi Noble le lion armé d’un coutelas, Bruyant le taureau et Tardif le limaçon portent l’enseigne à la poursuite de Renart qui s’est réfugié dans son château de Maupertuis.
« Le Roi demanda qu’on lui présentât les ôtages et ne voulut pas faire grace d’un seul. Ysengrin livra pour les siens Brun l’ours, Tybert le chat, Chanteclerc le coq et sire Couard le lièvre. Renart choisit de son côté ceux dont l’expérience étoit le mieux connue : Bruyant le taureau, Baucent le sanglier, Espinart le hérisson et son cousin Grimbert le blaireau. La bataille fut remise à quinze jours ; Grimbert se portant garant que damp Renart se présenteroit à la place et à l’heure dites, pour abattre l’orgueil d’Yssengrin. "Allons, dit le Roi, ne ranimez pas les querelles ; mais que chacun de vous retourne paisiblement à son hôtel."
Renart n’étoit pas assurément de la force d’Ysengrin ; mais il possédoit mieux tous les secrets de l’escrime, et cela l’avoit décidé à accepter la lutte. S’il est moins vigoureux, il sera plus adroit ; il saura tirer partie de l’entre-deux, il se repliera pour découvrir son adversaire au moment favorable ; il connoit à fond le jambet, les tours françois, anglois et bretons, la revenue, les coups secs et inattendus. Pour Ysengrin, il ne croit pas avoir besoin de préparation ; fort de son bon droit et de la faiblesse de Renart, il va tranquillement dormir a son hôtel, en maudissant les ajournemens qui retardent l’appaisement de sa vengeance.
… » (sic)
Partant de cette lecture, j’ai souhaité pousser plus loin la corne en introduisant ci-dessous le bestiaire médiéval en privilégiant le Taureau. Car dans ce bestiaire nous trouvons le lion, l’ours, la colombe, le cerf, le renard, l’agneau, la licorne, le dragon et autres animaux fantastiques et bien sûr, le taureau.
Toutes les iconographies suivantes sont issues de manuscrits du Moyen Âge, généralement du XVe siècle nous contant l’histoire du Taureau dans la mythologie, l’antiquité et les religions.
Vous trouverez les différentes illustrations issues des manuscrits abrités par la BnF à l’exception d’une seule provenant de la Bibliothèque municipale de Troyes et datée du XIIe siècle.
Au Moyen Âge, les bovins sont surtout élevés comme instruments de travail. Le bœuf joue en effet un rôle majeur dans les labours et le transport. Plus lents que les chevaux, les bœufs sont capables de traîner des charges plus lourdes. Le bœuf est donc le symbole de richesse et de force. Il est aussi chargé d’une puissante symbolique christologique : créature douce et paisible, dotée de patience et de bonté, il creuse comme le Christ des sillons fertiles et se sacrifie pour le service des hommes.
On a longtemps imaginé que le Moyen Âge se nourrissait d’herbes et de racines et était privé de viande à l’exception de la charcuterie. Il n’en n’est rien. En dehors des périodes de crises, les derniers siècles du Moyen Âge atteignent des consommations de viande et le bœuf est la viande la plus consommée.
Par rapport au veau, le bœuf est une viande de peu de noblesse, aussi est elle peu représentée dans les livres de cuisine aristocratiques. Elle fait partie des "grosses viandes" en général bouillies.
Dans la tradition grecque, le taureau blanc est l’animal divin par excellence. C’est sous cette forme que Zeus avait enlevé la jeune Europe pour la conduire en Crète où ils s’unirent et eurent trois fils. L’un d’eux, Minos, disputant la royauté à ses frères, demande à Poséidon de lui assurer son soutien en faisant surgir sur les flots un taureau qu’il lui sacrifiera en retour.
Avec une robe blanche éclatante, l’animal est d’une telle beauté que Minos rechigne à tenir sa promesse et en immole un autre. En châtiment, Poséidon rend le taureau furieux et inspire à la reine Pasiphaé un amour monstrueux pour l’animal dont naîtra le terrible Minotaure… Emporté sur le continent par Héraclès, le taureau de Crète sera maîtrisé à Marathon par Thésée (une des premières faenas…), héros athénien qui vaincra aussi le fils, cette créature hybride recluse dans le labyrinthe.
L’enlumineur a-t-il eu méconnaissance du mythe pour représenter un taureau noir ? Ou bien est-ce un choix délibéré marquant une condamnation implicite de l’acte contre nature ?
Selon le mythe grec, Jason, pour recouvrer le pouvoir, devait rapporter la Toison d’Or en son royaume. Avec ses compagnons les Argonautes, ils arrivent en Colchide où Jason doit imposer le joug aux taureaux d’Héphaïstos, le dieu du feu. Réputés indomptables, ces deux bêtes monstrueuses portent des sabots d’airain et soufflent le feu par les naseaux. Cette condition signifiait que le héros devait dompter ses passions avant de conquérir la Toison d’Or, symbole de la perfection. Prise d’une passion pour lui, Médée, la fille du roi, viendra à son secours contre la promesse de l’épouser.
Pendant plusieurs siècles, la religion s’opposa au culte de Mithra, d’autant que c’était aussi une religion monothéiste, croyant en une résurrection. Quand le christianisme l’emporta au IVe siècle, il chercha à éliminer le culte de Mithra et notamment le symbole du taureau tué par Mithra dont le sang avait fécondé la nature et l’avait fait revivre. Le taureau est alors diabolisé ; son sang devient vénéneux, il devient un des attributs de Satan et la tête, les pieds, la queue et surtout les cornes du taureau sont associés au diable. L’Église combattit les symboles cornus qui restèrent cependant associés à une force magique dans les champs de bataille et dans les tournois.
Autrefois, la blessure par coup de corne entraînait inévitablement après une période de repos, une convalescence suivie d’une réadaptation qui pouvait se prolonger lorsque le torero avait repris le chemin du ruedo. Ses moyens physiques étant quelque peu diminués lui permirent de bénéficier au cours de l’histoire taurine, de facilités, de faveurs, qui, par la suite, sont devenues la norme pour tous les toreros.
Pourquoi le burladero ?
Cet abris de planches, placé en avant de la barrière, de la talanquère comme disent les coursayres, et formant chicane par où se glisse le piéton à la fin (ou pas) d’une suerte, est né d’une doléance exprimée par des maestros relevant de blessure et qui de ce fait, ne pouvaient sauter aisément l’obstacle de la barrière.
Dans un premier temps, on plaçait les burladeros lorsque figurait au cartel, un torero convalescent et on l’annonçait sur les affiches. Puis, cet abris protecteur étant fort utile voire commode, il fut mis en place de plus en plus fréquemment et vint le jour où sa présence dans l’arène fut incontournable, donc permanente.
Pourquoi l’épée factice ?
Même participation… l’épée factice ou ayuda fut utilisée au départ avec une autorisation de la présidence par un matador qui, en période de remise en forme, de convalescence, après une quelconque blessure, ne pouvait utiliser lors de la faena de muleta, l’épée d’acier trop lourde.
La tolérance ici aussi, est devenue la règle. Le mérite de l’utilisation de l’épée de muerte n’en n’est que plus grand, et remarquons qu’à cet instant, le toro n’est pas abandonné à lui-même en fin de faena, situation contraire à ce que nous vivons aujourd’hui au changement des épées. Le diestro lampe sa gorgée d’eau dans sa timbale argentée, s’essuie le visage, prend quelques conseils pendant que parfois, un péon vole une passe de cape à ce toro, soulevant force sifflets et l’état moral et physique se modifient durant ces précieuses secondes, éternelles !
Sinon peu de modifications ont été apportées par l’expérience acquise au fil du temps. J’en veux pour preuve, l’équipement du torero, son habit de lumières. Un détail cependant : autrefois il utilisait une large ceinture en tissu qu’il enroulait en plusieurs fois autour de sa taille comme les écarteurs landais la porte toujours. Elle était destinée à protéger le bas ventre de la corne !…
Le peto du cheval a été revu, le poids pachydermique du canasson itou, et le cavalier a, dans l’ensemble profité d’un régime amaigrissant. La forme de la pique a vu quelques modifications.
Que l’on protège la monture et son cavalier, soit, mais arrêtons de tricher avec les varas ! Mais cela est une autre polémique déjà débattue.
Face au danger de la cornada et aux suites généralement terribles, l’homme a fait preuve de recours et d’intelligence ; et même si quelquefois il a modifié en sa faveur le règlement, on ne peut guère lui jeter la pierre. Au contraire, nous ne pouvons que nous en féliciter !
N.B.
L’épée ou estoque mesure environ 90cm, légèrement courbée sur les 20 derniers cm, généralement fabriquée en acier de Tolède. Son prix est de l’ordre de 500 € environ.